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The Besnard Lakes - Are The Roaring Night (2010)

Publié le 05 mai 2010 par Oreilles
The Besnard Lakes - Are The Roaring Night (2010)The Besnard Lakes are the roaring night : fin d'un tryptique passionnant pour les Besnard Lakes, commencé en 2003 avec Volume 1, et poursuivi en 2007 avec Are the Dark Horse, tout en nocturnes rugissantes, en lieu et place de la noire toison chevaline du précédent album.
Les trois albums, en effet, conçus comme des récits d'espionnage, modulent les mêmes thèmes de façon obsessionnelle - agent secret, réception radio par ondes courtes, cryptographie - et creusent le sillon d'un post-rock trés avancé, entre parties vocales éthérées et shoegaze progressif.
Et toujours cette ambition poétique dans les textes, cette cohérence dans l'élaboration des albums, chez un groupe structuré autour du couple Jace Lasek/Olga Goreas, duo vocal en studio, amoureux transis à la ville. Alors que les compositions de Are the dark horse fonctionnaient sur la logique du crescendo, et la mise en branle progressive de chaque instrument, Are the roaring night marie le clair et l'obscur, et joue des contrastes. Car rien n'est trés évident dans cette nuit sonore, où les amants s'espionnent et butent sur d'indéchiffrables regards :"what's in your empty eyes?".
"Like the ocean, like the innocent" : la voix de tête de Lasek, dès le début du premier morceau, nous propulse vers des hauteurs stratosphériques, tandis que, sans prévenir, batterie et guitare nous font revenir brutalement sur terre. La voix, elle aussi, atterrit, dévale l'octave et gagne en puissance ; même si les aigus de Lasek ne sont pas trés cristallins, sa voix est portée par un souffle certain dès qu'elle se fait plus grave. C'est, d'ailleurs, particulièrement beau sur "Light up the night", morceau dépouillé à l'ambiance liturgique, où la voix fait montre d'une "sacrée" puissance.
Sublime "Chicago train", avec bleu à l'âme (ville oblige, "sweet home Chicago", si on veut) pour séparation amoureuse déchirante sur quai de gare. Une longue introduction suspend magiquement le temps, avec ces cordes et cette voix qui étirent délicatement les durées. Mais le riff de guitare contracte soudainement la douleur et nous assombrit l'âme.
"Albatros", vieille compo ressucitée pour l'occasion, rappelle immanquablement les Beach boys, en déroulant ses harmonies vocales à deux, aux aigus survoltés, jusqu'au déluge shoegaze, massif, joué regard au sol, et qu'on n'attend pas. Tellurique et stratosphérique à la fois.
La face B s'ouvre sur le magnifique "Land of living skies", après intro bruitiste hantée. Mise en musique de la morsure du remord ("this fire that follows me"), le texte est superbe, servi par un crescendo qui renoue avec le style du cheval noir.
"I'll be sitting on that beach
Thinking "was it ever too late?"
What once was great all falls into place
We make our mistakes and take them to our graves
".
Changement de tempo sur l'entêtant et ironique "And this what we call progress", adresse à "l'indien sans âge" génocidé, porté par une section rythmique qui approfondit les basses, et prend nettement ici le dessus. Puis, après passage ébourriffant par l'église ("Light up the night") et défoulement vocal, l'album se termine sur la poésie naïve et apaisée de "The lonely moan" ("we caught the sun, it was so simple, so simple"). Trip psyché pour la route, on décroche le soleil à deux, et on congédie la batterie pour flotter doucement entre les eaux de l'omnichord et celles de l'orgue Hammond.
Hypothèse de lecture au final : l'espionnage n'intéressait les Besnard Lakes que comme métaphore de la relation amoureuse, et, plus encore comme mise en récit distanciée d'une histoire d'amour fondatrice, celle du couple nodal.
En bref : un troisième album à la hauteur du second, et un cycle qui s'achève sur la beauté d'un clair obscur. Les Besnard Lakes tiennent le cap d'un rock délicat et puissant, déchiré entre le ciel et la terre, et qui n' a de cesse de travailler l' harmonie.
The Besnard Lakes - Are The Roaring Night (2010)
Le site officiel et le Myspace
"Chicago Train" :


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