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Le maître ignorant, de Jacques Rancière

Publié le 19 mai 2010 par Onarretetout

rancieremaitreignorantCe livre est une biographie, politique et philosophique, de Joseph Jacotot. Ce révolutionnaire exilé, au début du XIXe siècle, a perturbé l’Europe savante en affirmant que l’on peut « s’instruire seul et sans maître », que l’on peut enseigner ce qu’on ne sait pas. « La première vertu du maître est une vertu d’ignorance ».

Cette affirmation repose sur un principe : tout ce qui est humain est dans chaque être humain. L’éducateur qui cherche à transmettre son savoir est, bien souvent, quelqu’un qui se décrète supérieur à un autre. Mais ce régime de supérieurs et d’inférieurs veut aussi que l’on soit tout à la fois supérieur à quelqu’un et inférieur à un autre. Or, pour justifier cela, les éducateurs doivent inventer des formules.

Si tout ce qui est humain est dans chaque être humain, il n’y a plus de supériorité qui tienne, les hommes sont égaux. Ainsi, « celui qui a fait l’addition des fractions est le même être intellectuel que celui qui a fait le mot Calypso. (…) Cet artiste ressemble à celui qui a imaginé les moyens d’écrire le mot dont il s’agit. Il ressemble à celui qui a fait le papier sur lequel on l’écrit, à celui qui emploie les plumes à cet usage, à celui qui les taille avec un canif, à celui qui a fait le canif avec du fer, à celui qui a procuré du fer à ses semblables, à celui qui a fait l’encre, à celui qui a imprimé le mot Calypso, à celui qui a fait la machine à imprimer, à celui qui explique les effets de cette machine, à celui qui a généralisé ces explications, à celui qui a fait l’encre à imprimer, etc. etc. etc… »

Il faut donc travailler à l’émancipation. « Ce que peut essentiellement un émancipé, c’est être émancipateur : donner non pas la clef du savoir mais la conscience de ce que peut une intelligence quand elle se considère comme égale à toute autre et considère toute autre comme égale à la sienne. »

La réflexion qui se mène dans cet ouvrage tourne autour de cette question de l’égalité. Est-ce que la société a pour rôle de mener à l’égalité ? On voit bien que cette formule voudrait qu’il y ait ceux qui mènent et ceux qui sont guidés, ce que refuse Joseph Jacotot. « Il faut choisir de faire une société inégale avec des hommes égaux ou une société égale avec des hommes inégaux. Qui a quelque goût pour l’égalité ne devrait pas hésiter : les individus sont des êtres réels et la société une fiction. C’est pour des êtres réels que l’égalité a du prix, non pour une fiction. »

Et voilà le principe sur quoi s’appuie cet « enseignement universel » : « L’égalité n’est pas un but à atteindre, mais un point de départ, une supposition à maintenir en toute circonstance. » Il s’agit là de l’égalité des intelligences, puisque tout ce qui est humain est dans chaque être humain.


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