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I used to love you, asshole.

Publié le 24 février 2010 par M.
T'as toujours voulu l'être, pas vrai. Ma victime. C'est rien, ça m'est revenu dans le bus, cette obsession que t'avais pour mes carnets meurtriers, pour mes si belles boucheries manuscrites, mes amours imaginaires fracassants sur papier carrelé, c'est le carnet bleu qui t'avais décidé à m'aimer. Tu ne voulais pas de moi en amie mais en bourreau, j'étais celle qui magnifierait ton existence en te poussant du haut de la falaise, celle qui t'embrasserait jusqu'à ce que tu deviennes bleu. Mais je ne l'ai pas fait. Je t'ai laissé t'en aller, j'ai creusé la distance en aimant d'autres gens, j'ai continué à marcher tant bien que mal - j't'avais prévenu pourtant, et maintenant tu me recolles dans ce rôle de coupable. Tu m'accuses à tort et à travers, et peu à peu tu tombes en désuétude, tu perds de ton éclat, ta voix ne sonne plus claire c'est comme si tu mâchais de la boue. Comme si les vers t'avaient déjà rongé. T'as les dents noires, mec, toi dont le sourire était si éclatant. Mais j'te flinguerai pas. Ouais. Ce jeu avait un sens c'est vrai mais il s'est aujourd'hui dissolu dans les secondes passées à trépigner sans toi, aujourd'hui c'est pas différent qu'un quelconque récit glauque. J'rentrerai pas dans le costume que tu m'offres. Même si c'est vrai, tu me connais si bien, tu sais où tirer pour que je crache mes boyaux, tu connais les cordes à couper, t'es conscient que ça me démange de te planter les ongles dans la cornée, que tu puisses enfin chialer même si c'est artificiel, ça me démange de défigurer ce si joli visage contre un mur ciselé de clous, et de te faire trébucher du balcon. Tu sais ce que tu réveilles dans mes entrailles et je suis juste tellement ennuyée d'avoir à combattre ces instincts débiles. Tellement fatiguée que je demande l'asile pour ressusciter le sourire que t'écorches, éclates comme un ballon. Même la voix de mon père lointaine au téléphone ne baisse plus le voile rouge sous mes paupières crispées, mais toi. Toi le plus mignon, le plus gentil, toi mon intouchable gamin chéri, voila que tu te transformes en parfait connard. Tu sais j'ai même cru à cette théorie de vengeance, j'ai cherché mon crime et je ne l'ai pas trouvé, même quand je te pose la question tu n'as rien pour te justifier. Je croise des filtres de clope tâchés de rouge sur le trottoir et ça me rappelle des histoires, je commence à me demander, est ce que t'es soudainement devenu le roi de la méchanceté gratuite, ou est ce que c'est toi même que tu cherches à démolir ? J'ai pas la réponse à ça, et personne pour me la donner, mais t'as l'air d'avoir oublié l'essentiel, et l'ancienne conclusion de tes lettres, dans nos bras de fer, même quand je chiale, c'est toujours moi la plus forte. Je ne connais plus tes rêves mais je sais ce que t'essaies de faire et tu ne m'auras pas, même si c'est vrai, tu fais mal à l'espoir. Tu fais gronder, appuyer sur mes épaules molles le désarroi de cette situation merdique, et je signe tes chèques en arrivant presque à penser que je serais mieux chez mes parents. Je veux dire, je ne serais pas heureuse, mais j'aurais un toit et pas le ventre grinçant. Tu me donnes envie de t'éclater la gueule, tu me donnes envie de foutre le camp, tu me donnes envie de me maudire. Mais je suis résistante, va. Et puis j'ai tellement mieux. Je fais des compromis avec ma pomme et j'essaie malgré tout de me repêcher. Puis tu vois, peut être bien que je reste debout pour une illusion, pour ce décor en carton qu'est Paris, pour mes illustres sentiments, mes précieux amours, pour mon droit subtil de régner sur ma propre vie, pour m'affranchir du déboire génétique - pour rien, peut être, ou bien pour tout. Pour tout. Peut être que c'est toi qui a raison et que je n'ai aucun avenir, que le rideau va tomber un matin de brouillard, mais je vais rester quand même, question d'honneur, je préfère crever sur le champ de bataille que me replier. C'est pas être masochiste, seulement bornée. Question d'attaches, aussi. De toute façon, je ne compte pas perdre. Je ravale ma morve, enfile ma capuche et te fait remballer ton mépris rouillé par la même occasion, non, t'es pas meilleur que moi, même si je me dis parfois que vivre est plus simple que survivre. Puis que j'aurais besoin d'un héros pour me tirer de là. Mais j'le vivrais mal au fond, je préfère mieux croire en moi et être mon propre héros. Tu crois que c'est possible ? Disons que oui. Et toi, tu t'en boufferas les doigts et même les mains, parce que rien ne disparait vraiment, les choses se planquent seulement jusqu'au moment opportun pour ressurgir, et ça peut être n'importe quand, demain ou dans cinquante ans, ou bien tu seras déjà mort le bon jour et alors tu resteras à jamais ce connard stupide qui ne te ressemble pas. Je ne sais pas quoi te souhaiter. Peut être que tu t'es endormi à l'intérieur de toi même et que t'as soudainement grandi de travers, une mauvaise poussée de croissance qui t'as pourri dans les poumons, j'espère que tu t'en sortiras. You want me to be the bad guy and I want you to be the nice one. Les cartes sont inversées, garçon. Tu m'es étranger désormais mais j'ose croire que tu vis encore quelque part, que tu palpites toujours un peu même si c'est au fond d'un trou. Emportant sous le bras mes boîtes de souvenirs je m'écarte avec un rictus, t'es pas rentré ce soir et je ne sais pas quand tu reviendras, t'as emmené des affaires mais pas tant que ça, et tu sais tant que je ne te reconnaîtrai pas, ton absence, c'est tant mieux. Je ne sais pas de quoi le nouveau toi est capable, après tout ce serait pas la première fois que t'essaies de m'étouffer sous un oreiller, même si avant c'était. Différent. Je ne te connais plus assez pour être sûre que t'ouvrirais pas le gaz pendant que je suis sous la douche. Je te fais plus confiance. Mais j'te jure, oh boy, tu m'auras pas. T'imagines pas à quel point je suis protégée. Puis comme t'es con de faire comme ça le vide autour de toi. J'espère que tu fais juste semblant d'être devenu aussi froid, aussi sec, aussi imperméable et méprisant, méprisable, aussi futile. Tu ne seras plus jamais le personnage de mes grandes tragédies lyriques, tu sais - tu l'mérites pas. T'as perdu même ça. Et t'as pas la mémoire pour te consoler, parce que le reste, tu l'as brûlé. Tant pis pour toi. C'est la troisième fois que je ramasse des morceaux de verre dans l'évier, mais je ne me souvenais pas qu'il y avait un truc cassé. C'est peut être toi, peut être pas. J'm'en fous tu sais, j'ai tout lavé, tout jeté, toi avec. C'est marrant, depuis que j'en ai effacé notre histoire et ses relents amers, c'est le centième message que j'écris ici, j'aime bien ce côté rituel qui ne signifie rien sinon que comme promis, je me souviens mais que ça ne m'arrête pas. Je ferme souvent les yeux mais debout, je sais pas rester immobile. J'ai trop de choses à te déballer froidement, mais t'as même pas la décence de venir les écouter.

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