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Publié le 15 février 2010 par M.
Les dimanches soirs se ressemblent tous un peu. Peu importe ce qui est ou n’est pas arrivé durant la semaine, peu importe les visages qui ont défilé, c’est le moment de passer le balai, de jeter les poubelles et d'accrocher les souvenirs comme on punaise un dessin, c’est comme une fin de soirée au petit matin, en plus solitaire et moins tardif. C’est le temps le plus froid, par contraste. Je regarde ces photos d’anniversaire où tous les visages connus collectionnent le même air triste, et je me dis que l’homme est bien fou avec son instinct de protection, parce que même si t'entoure quelqu’un de papier bulle, même en le serrant précieusement 24h/24, t'auras forcément un moment d’inattention qui changera la donne. Mes petits frères si grands. L'être humain, il a trop la confiance, parfois. Ou l'inconscience. Peu importe. C'est pas trouver le mot juste qui est important, pour une fois. C'est réaliser continuellement, et ça c'est pas simple, crois moi. Faut tenir le cap. Un clin d’œil, un éternuement, n’importe quoi, une demi-seconde les yeux clos et tu peux te réveiller les mains vides. Juste un manteau sur les genoux. Une fraction de seconde, c’est juste suffisant pour perdre l’équilibre. Pour avaler de travers, pour prendre n’importe quelle décision ordinaire mais fatale. Un claquement de doigt. Une absence. Un raclement de gorge. Une flaque de sang au pied d’un escalier. Le flash d’une photo. Hurlement pour un gamin perdu, requiem pour une mère à la dérive. Si mineur. Il n’y aura jamais assez de bouées de sauvetage. Je contemple leurs visages et les parties en moi s’entrechoquent, mon heureux présent et mes racines fracturées. Les dimanches soirs ne sont jamais vraiment pareils, ils laissent seulement la même empreinte éthérée, le même goût ni acide ni sucré, les dimanches soirs manquent de sel. Mais c’est la même chose avec le chauffage, si je n’avais aucune occasion de le baisser, j’augmenterai encore et encore jusqu’à prendre feu par inadvertance. Vinaigre et miel, again. Dimanche soir, je compte les points. J’écris des post-it. Je remets les compteurs  à zéro. De plus en plus, je me rends compte que je ne sais pas en vouloir aux gens. L’amour inconditionnel et sans colorant, sans joli nœud rose bonbon, l'amour papier kraft granuleux, tu sais celui qui t’envoies méchamment cogner des fois et d’autres te colle un sourire tellement grand qu’il dépasse de chaque côté, c’est pour ma pomme. Je suis plus débile animal blessé que rancunière, tu vois. Sous mon enveloppe plastique, que je gratte à l’ongle un peu plus tous les jours, je ne suis tellement pas modérée. Mais ça me va comme ça. La nuit du dimanche au lundi est toujours la plus froide, parce que les draps ne sont pas défroissés et qu’il n’y a pas encore tout à fait que moi, parce que les cendriers toussent et dégueulent un peu de cendre sur mes meubles, parce que les dernières bulles meurent dans le fond des bouteilles de coca. La plus froide par contraste. Je me répète. J’ai envie de dormir ailleurs, juste comme ça, pour changer de lieu. Dans un sens, je ne serai probablement jamais quelqu’un de royalement indifférent. Je regarde les photos, une fois, remballe mes élans de fraternité parce qu’ils sont intraduisibles autrement qu'en gesticulations maladroites et inachevées, la seule chose que je sais, en vérité c’est que s’ils venaient frapper à ma porte, je ne les laisserai jamais dehors. Et j’ai beau proclamer la vanité du geste, je serai probablement toujours dans le rang des sonnés qui cherchent à épargner. Dans le camp des héros de pacotille et des faux méchants. C’est joliment désespéré, naïvement optimiste. C’est peut être con mais ça me convient. Bref. Parlons d’écologie. Parlons de lèvres en carton. Taisons nous brutalement et dormons collés comme des pingouins, parce que les pingouins, c’est trop bien. 

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