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[Soirée DVD] In the loop

Publié le 23 mai 2010 par Cuttingpapers

Affiche In The Loop

Récemment avec Myscreens, nous avons eu un échange via twitter concernant le fait que les films traitant de la guerre en Irak commençaient à tourner à vide.
D’une certaine manière à cause des médias, qui nous ont abreuvé d’images de ce conflit ad-nauseam.
Comment donc le cinéma pouvait-il nous donner une vision complémentaire de ce dernier ?

Armando Iannucci a trouvé la solution en choisissant de parler du lancement de la guerre sur un ton satyrique.
Je n’avais pas entendu parler du film à sa sortie l’année dernière et c’est uniquement en voyant la bande annonce pour sa sortie DVD que j’ai eu l’irrépressible envie de le regarder.
In the loop (dans la boucle, la confidence) est une comédie comme seuls nos amis d’Outre-manche savent en faire.
Caustique, cynique, absurde et réaliste, un peu à l’image de son sujet.

Comme le demande la bande-annonce : « Mais de quoi ça parle ? »
Et bien du lancement de la guerre en Irak et de la manière dont les britanniques se sont rangés au côté de leurs frangins yankees.
Simon Foster (Tom Hollander, assez connu pour son rôle dans Pirate des Caraibes – le méchant qui saute sur son bateau à la fin de la trilogie), secrétaire d’Etat au Développement International enthousiaste mais franchement nul commet une boulette à la radio en disant que la guerre est quelque chose d’ « imprévisible ».
Il se met donc à dos le responsable de la communication gouvernementale Malcolm Tucker, sorte de Perry Cox croisé avec Joey Starr, qui lui recommande clairement de la boucler. Chose que notre secrétaire ne fera évidemment pas, en s’empêtrant dans de nouveaux propos ambigus.
Dès lors, celui-ci devient un pion que les clans pros et contre guerre américains veulent contrôler pour s’adjoindre le soutien des britanniques dans la guerre, alors qu’il rêve de devenir la star montante de la politique…

En traitant d’un sujet qui n’a finalement rien de drôle sur un ton jouissivement acide, Iannucci accouche d’une comédie féroce de haute volée, tournée à la manière de The Office (en gros comme un documentaire un peu naze des années 90).
Comme dans toute satyre, les personnages sont outranciers au possible pour souligner les travers inhérents à chacun d’eux.

Ainsi, Foster se révèle être une sorte de Candide des temps modernes, flanqué d’un secrétaire personnel à priori plus intelligent, mais qui se révèle être d’une bêtise phénoménale. Et voir ces deux idiots se promener à Washington et assister à des « comités » comme des gosses visitant DisneyWorld et absolument tordant.
Il faut dire que le réalisateur n’épargne pas le gouvernement britannique, qu’il rabaisse au rang de toutou.
La palme revient à Peter Capaldi et son personnage de Malcolm Tucker.
Outrancier, excessif, colérique et grossier au-delà de l’entendement (voire de l’hystérie), chacune de ses apparitions et l’occasion de rire aux éclats et d’apprendre de nouvelles injures.
Exemple. A un assistant d’une vingtaine d’année chargé de le briefer :

« Toi, le gamin, à cette heure tu devrais être en bizutage, la tête dans les chiottes. Nous, Britanniques, avons déjà anéanti cette capitale de coincés en 1814 et je suis tout prêt à recommencer. En commençant par toi, l’enculé du collège. Arrête tes sarcasmes ou je bourre ta sale petite gueule de coton hygiénique, que ça te ressorte par le cul comme la queue du lapin de Playboy. »

A ce titre, si vous souhaitez enrichir votre (mauvais) vocabulaire britannique, ce film vous est hautement recommandé en VO.

Mais le côté américain n’est pas en reste.
La tête pensante du conflit s’en prend aussi plein la figure.
Rapports écrits à la va-vite, comités secrets, lèche-culs, manipulateurs et militaires lâches, tout y passe.
Entre pros et contre, les coups bas pleuvent et on s’aperçoit vite que tous les moyens seront bons pour faire passer l’ordre d’invasion devant l’ONU (le dernier quart d’heure absolument épique).
Les palmes sont ici attribuées à David Rasche et James Gandolfini. Le premier (alter-ego de Dick Cheney) est savoureux en chef de la politique étrangère américaine d’un cynisme et d’une froideur sans nom, et prêt à tout pour aller faire sa guerre, et le second (alter-ego de Colin Powell) excelle en général pacifiste, grande gueule… mais sans couilles.
Et ce ne sont que les têtes d’affiches dans la jolie galerie qui compose le film.

Sous couvert de fonctions factices, de noms de dossiers bidons et de situations outrancières (mais il est au final permis d’en douter), Armando Iannucci énonce clairement ses cibles, et nous mets face à une vérité glaçante.
Car chaque personnage, aussi drôle soit-il, n’est au final qu’un être humain faillible et complètement déconnecté de la réalité.
Le pauvre Simon Foster est sans doute le plus à plaindre. Lancé dans cette fosse aux lions comme un vulgaire bout de viande, il tente de devenir une figure clé alors qu’il arrive à peine à résoudre les conflits de son arrondissement.
Tous font penser tantôt à des gamins se chamaillant dans des cours de récré, tantôt à des fous ne quittant jamais leurs bureaux et leurs couloirs glauques, et prenant malgré tout des décisions capables de changer la face du monde.
Tous finalement déconnectés et jamais à leur places.

In the loop, est une satyre politique aussi réjouissante qu’ intelligente.
Une réflexion sur la manipulation, le pouvoir des médias, mais aussi l’arrivisme politique et les ambitions individuelles.
Au final un miroir déformant des raisons qui ont poussé des tas de personnes dans un bourbier inimaginable, et assurément une des comédie britannique les plus euphorisantes de ces derniers mois.

In the loop est sortie en DVD le 18 mai.


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