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Cannes à Paris : La Casa Muda

Par Tred @limpossibleblog

Cannes à Paris : La Casa Muda
On a beaucoup parlé, cette année, du changement de direction de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes. Nouvelle tête (Frédéric Boyer), avec un désir d’ouverture vers le cinéma de genre. Parmi les films symbolisant clairement cette volonté d’ouverture, un qui a fait couler pas mal d’encre pendant le festival, l’uruguayen La casa muda (La maison muette / The Silent House) s’est clairement posé en incontournable. D’où ma surprise de voir la salle 500 du Forum des Images si désert pour le découvrir quelques jours après son passage remarqué à sur la Croisette.
La raison pour laquelle La casa muda a beaucoup fait parler de lui tient en un défi technique : le film a été réalisé en un plan séquence de 78 minutes avec une caméra qui est apparemment un appareil photo haute définition (d’excellente qualité bien sûr). Bien sûr, le défi est bluffant. Bon, malheureusement, on ne s’en rend souvent presque pas compte tant on est plongé dans l’obscurité pendant l’intégralité du film et que si le cinéaste avait voulu placer des plans de coupe, on ne s’en serait probablement pas aperçu.
Le début de ce long plan-séquence commence dans un champ. Un homme, la soixantaine, et une femme, la trentaine, avancent en direction d’une maison seule entre les champs et la forêt. Ils s’y arrêtent. Bientôt, une voiture arrive, et le propriétaire de la maison en descend. Celui-ci n’habite plus ici depuis des années, et veut la remettre un peu en état avant de la vendre. Le vieil homme et celle qui s’avère être sa fille sont là pour cela. Ils doivent rester sur place quelques jours pour travailler. Alors que le propriétaire vient de repartir et que les deux arrivants s’apprêtent à passer leur première nuit dans la maison, calés au rez-de-chaussée, des bruits viennent du premier étage. Annonciateurs d’un cauchemar d’une heure pour les protagonistes.
Cannes à Paris : La Casa MudaAu-delà de la prouesse technique, La casa muda déçoit un peu. Un peu, car il faut bien avouer que les prémices sont remarquables. Le tournage léger en plan séquence offre une vivacité au cadre qui imprime rapidement l’ambiance. La rapidité d’exécution nous interdit dans un premier temps les questionnements pour nous plonger avec tension dans une angoisse invisible. On ne voit rien, mais on ressent un danger permanent. Le réalisateur Gustavo Hernandez a au passage l’excellente idée de jouer avec les codes du genre, nous poussant à attendre les reflets dans les miroirs et les apparitions derrière les portes lorsque ceux-ci ne viennent finalement pas. Les sursauts se font donc rares, mais l’angoisse, elle, s’emmagasine sans pouvoir être expulsée. Il s’amuse aussi avec le point de vue de la caméra, nous faisant parfois croire à une caméra subjective lorsque ce n’en est pas une, et la surprise s’ensuit.
Si le film déçoit, c’est par son dernier acte, totalement raté. Tout à coup La casa muda tombe dans la facilité narrative, dans l’attendu, dans l’agaçant, alors qu’Hernandez maîtrisait jusqu’ici parfaitement son sujet. On tomberait presque dans le n’importe quoi à force de vouloir justifier et expliquer. Connaît-il si mal le genre, l’uruguayen, pour ne pas savoir que le non-dit est comme le non-vu ? C’est ce qui fait toute la force d’un film de ce type. Heureusement que la scène du polaroïd, flippante, se situe dans ce dernier acte, pour relever le niveau.
Si c’est cela la révolution de la Quinzaine des Réalisateurs 2010, je préfère me rappeler que The Host du coréen Bong Joon-Ho avait débuté dans la même section en 2006. C’était du cinéma de genre brillant de bout en bout à côté duquel La casa muda fait un peu pâle figure…

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