L'écrivain face à la création.

L'écrivain face ŕ la création.

Nietzsche

Dans "Ainsi parlait Zarathoustra", l'enfant du mariage, Nietzsche dit notamment ceci : "Tu dois construire plus haut que toi-même.  Mais il faut d'abord que tu sois construis toi-même.  Tu dois construire un corps d'essence supérieure, un premier mouvement, une roue qui roule sur elle-même.  Tu dois créer un créateur."

Il m'arrive régulièrement, lorsque je lis un livre, de me demander où cet écrivain a bien pu pêcher toutes ses idées.  En découle d'autres questions que je me pose, à savoir ce qui engendre la création.  Non pas l'imagination, mais bien l'acte de créer.

Il m'arrive aussi aujourd'hui, alors que je suis en plein rewriting de mon manuscrit, de songer à la signification même du terme "créer".

Par cette citation de Nietzsche, qui induit la réflexion sur le fait de d'abord être soi, de s'inventer - première création de l'être finalement -, je poursuis, dans ce même ordre d'idées, que ce serait le désir de se dépasser qui pousse à créer.  

Cette "roue qui roule sur elle-même", ce "premier mouvement" est la base de l'être.  Etre.  Non pas, "je pense donc je suis", mais simplement, "je suis parce que je suis".  Dès cette prise de conscience d'être, une sorte d'ébullition intérieure se met en route.  Travaille sans cesse comme "la roue qui tourne sur elle-même".  Engendre non seulement une création en soi par la prise de conscience d'être, mais aussi, mue par ce créateur sans cesse en devenir qui est en nous, à tendre vers l'extérieur.  

Cet extérieur, c'est le monde, l'altérité, dont notre essence propre tente de s'imprégner.

L'esprit ouvert à soi et au monde, l'acte de créer se met lentement en place.

Par le fait d'être soi et de s'abreuver à la connaissance du monde, une puissance venue des profondeurs pousse l'être à vouloir créer, ce qui en réalité est une façon de chercher à se et à comprendre toute chose en le matérialisant.

Cette oeuvre créée, née de ces aspirations profondes qui sont ce mélange de nos pensées, de notre intelligence, et de nos émotions, se matérialise.

La création est donc un acte qui puise sa source dans l'infini - notre essence propre et l'altérité - pour se matérialiser à chaque fois par un acte fini.

C'est pour cela que l'acte de créer ne laisse jamais de répit.

L'écriture, me semble-t-il, traduit le même cheminement.

L'auteur, mû par sa conscience d'être, se tourne alors vers l'humanité, rassemble ce tout en lui pour accoucher de ce qu'il est.

Ecrire, ce n'est pas seulement inventer, c'est poser un acte créateur.

Car chaque ligne posée, est le fruit ce ce que l'auteur est essentiellement, est la résultante de quelque chose qui n'a pas encore existé, est le produit de son désir, intrinsèque, de créer pour être et, être en créant.

Je dirais donc que pour que l'auteur sache, ou ait envie d'écrire, il doit simplement se réfléchir, se créer lui-même, donner naissance à ce qu'il est, et enfin, une fois qu'il s'est vu naître, il pourra commencer à donner corps à lui-même par l'écriture.

Panthère.