Magazine Cinéma

"Nos héros retrouveront-ils leur ami mystérieusement disparu en Afrique?" : divorce à l'italienne

Par Vierasouto


09 - 12
2007
-

     
    On est quand même frappé par l'évolution de l'affiche de cette sympathique comédie italienne signée Ettore Scola : tout d'abord l'affiche d'époque (1968) sans prétention avec les deux acteurs principaux : Alberto Sordi et Bernard Blier, ensuite, la version italienne où on a viré Blier pour Nino Manfredi qui joue un très petit rôle même si son absence est le moteur du film, enfin, le DVD tel qu'il est sorti fin novembre en France avec un côté sérieux film d'auteur, le fond couleur savane, le beau Nino Manfredi en premier plan et les deux compères Blier et Sordi rapetissés et flous en arrière-plan, à croire qu'ils dérangent... 

Homme pressé, surbooké, submergeant ses collaborateurs de consignes depuis sa Rolls, commandant une salade à la piscine en se faisant bronzer pendant le seul quart d’heure libre de la journée, l’éditeur Di Salvio est un homme riche et surmené. Les jeux d’adultes oisifs de la Dolce vita romaine, le domestique anglais, le handicap au golf, son épouse sophistiquée, Di Salvio n’en peut plus, sourd aux mondanités, il rêve de l’Afrique. Car son beau-frère Oreste Sabatini dit Titino, disparu depuis bientôt trois ans, vient d’être repéré par l’agence de détective au fin fond de l’Angola, une piste à creuser sur place… Di Salvio (Alberto Sordi) décide de se dévouer, il part en Angola avec son comptable M (Bernard Blier) qui n’en demandait pas tant.
-----
Les deux compères débarquent alors dans un pays inconnu aux paysages de rêve auquel ils ne comprennent rien et, en premier lieu, le portugais. Déguisé en explorateur, short, chaussettes et petit galon en fourrure zébrée sur son chapeau, Alberto Sordi est filmé par la population locale dès son arrivée tant il est ridicule tandis que Bernard Blier ne quitte pas son costume cravate noir de comptable terne. La bonne volonté de s’intégrer de Di Salvio est touchante, ému aux larmes par une autruche ou un morceau de savane, se fâchant avec le guide qui n’a pas voulu saluer un frère pygmée, photographiant tout et n’importe quoi, enregistrant des carnets de voyages aux accents lyriques. Une scène très drôle m’était restée en mémoire car j’avais déjà vu ce film il y a des lustres : tandis qu’une larme coule sur la joue d’Alberto Sordi, sous ses lunettes miroir, la caméra s’éloigne, dévoilant la scène : l’un, l’éditeur, ému aux larmes par la beauté des chutes, l’autre, le comptable, tournant le dos au paysage somptueux, tapant des comptes à la machine assis devant une table pliante.
Après de multiples péripéties, les deux hommes vont enfin retrouver Titino (Nino Manfredi), le beau-frère de l’éditeur, devenu le gourou d’une tribu mais acceptera-t-il de rentrer à Rome? Oreste/Titino ayant refait sa vie en Afrique, le comptable ne pensant qu’à potasser les horaires du retour en Italie, l’éditeur di Salvio, assis entre deux chaises, est le plus malheureux des trois. Débordant soudain d’amour de la nature et des gens simples qu’il n’a jamais l’occasion de rencontrer à Rome, Di Salvio se révèle beaucoup plus humain que ne l’imaginait son comptable souffre-douleur mais, à la différence d’Oreste, il ne vivra une autre vie que quelques jours, s’étant offert le luxe de mettre son rêve de l’Afrique en images.
Tourné en 1968, le film est très daté début des années 70 avec beaucoup de liberté de ton et de créativité dans le montage (parfois) un peu psychédélique des images, un voyage aussi pour le réalisateur (belles poursuites des animaux en jeep), le générique en BD papier craft sur percussions des tam tam donne le ton. L’Afrique est filmée avec beaucoup d’amour et de générosité, les populations, les enfants, tout est beau, les paysages sont splendides (le film fut vraiment tourné en Angola), on navigue entre premier degré, on irait bien aussi là-bas comme Nino Manfredi… et comédie, l’impuissance de l’occidental surcivilisé démuni devant le moindre pépin, terrifié devant un animal sauvage, perdu hors de son univers aseptisé qui demande si il y a un wagon restaurant dans le train!
Une comédie satyrique sans prétentions avec une analyse légère mais tout à fait pertinente du fantasme d’une autre vie, du comportement des occidentaux en Afrique, d’excellents acteurs même si on est gêné de ne pas entendre la voix de Bernard Blier doublé par un acteur italien, on sait de toute façon qu’en Italie à cette époque, tous les films sont post-synchronisés avec la voix des acteurs du film quand ils sont italiens.
A noter que cette nouvelle collection éditée par M6 vidéo a sorti plusieurs films italiens introuvables dont «Le Cri» d’Antonioni au prix conseillé de 19,90 Euros (ce qui n'est pas le cas à la FNAC où j'ai eu la sottise de l'acheter).


Note CinéManiaC :
Notez aussi ce film !


Mots-clés :

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Vierasouto 1042 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines