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Une lettre publique et ouverte à l'attention du Club Histoire - favorable à une Histoire contre la Révolution Française ?

Publié le 10 juin 2010 par Jcgrellety

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Il y a quelques semaines, je me suis abonné à votre club, le "Club Histoire".En effet, passionné d’histoire, j’ai décidé de passer par votre intermédiaire pour de temps en temps me procurer quelques livres sur des thèmes, des périodes, des personnages et des problématiques qui m’intéressent. Quelle n’a pas été ma surprise de recevoir le dernier numéro de juin 2010 de votre catalogue, et de trouver en deuxième et troisième pages de celui-ci une offre commerciale pour deux ouvrages, de François Furet, «La Révolution Française» et de Nathalie Meyer-Sablé et de Christian le Corre, «La Chouannerie et les Guerres de Vendée», intitulée « Contre la Révolution ». Ce courrier mensuel était accompagné d’un numéro spécial du magazine «Historia», destiné à susciter un abonnement, intitulé «France, où sont nos racines», illustré par un tableau montrant le couronnement de Clovis, et dont le premier article s’intitule «Louis XVI était un petit gros médiocre – Idée reçue». Le citoyen-lecteur se trouve confronté à un tir croisé qui vise «la Révolution». La Révolution ? Française, bien entendu. Or, la République actuelle en est issue, bon an mal an. Ai-je lieu de m’en plaindre ? Devrais-je regretter le régime, la royauté, de ce Louis XVI que l’article d’ «Historia» s’évertue à me présenter comme bon et intelligent ? C’est qu’il est 003
curieux que cette France, dirigée par un être si brillant, ait pu prendre de telles distances qu’avec lui, qu’un jour des hommes l’aient accompagné place de la Concorde pour le guillotiner. Est-ce donc que la Révolution ait eu sa peau, comme l’auraient voulu à tout prix les Révolutionnaires ? Croire cela, c’est ne rien connaître à l’Histoire. La majorité des dirigeants de la Révolution n’étaient pas très révolutionnaires, et ne voulaient surtout pas porter atteinte à la personne et à l’aura du roi. Mais ces grands bourgeois pour certains ne voulaient plus lui laisser et laisser à ses amis de la noblesse les cordons de la bourse, qu’il gérait si mal, malgré son génie personnel (dixit l’article d’ «Historia »). Sa condamnation à mort, après son procès, est la conséquence tragique de cette fuite arrêtée à Varennes. Sans cette fuite, sans les lettres retrouvées et dans lesquelles les révolutionnaires ont pu lire la volonté royale de les écraser par l’action sur le sol national des armées étrangères, ce Roi serait resté roi et aurait conservé un pouvoir semblable à celui du roi ou de la reine d’Angleterre. Mais l’absolutisme royal français l’a traversé et l’a conduit à cette démesure que les Grecs connaissaient et stigmatisaient dans la figure de l’hégemon et du tyran. Mais au-delà de cette discussion sur la personne, le physique et l’intelligence propres à Louis XVI, il me semble légitime d’interroger la certitude qui est exprimée autant par votre catalogue que par l’édition spéciale du magazine «Historia», à savoir la bonté royale :«Soucieux du bien être de son peuple» est-il écrit dans cet article « Louis XVI était un petit gros médiocre». Sur quels éléments peut-on se fonder pour penser cette « bonté » ? Comment comprendre que ce roi si bon ait été si abandonné par son peuple au moment fatidique ? Parce que le roi «bon» dirigeait un peuple «mauvais» ? Que connaissait ce roi de son peuple ? L’article égrène les acquis de sa formation scolaire. Louis XVI était cultivé, bien, mais que connaissait-il au peuple de France ? Combien de voyages a-t-il fait dans son royaume ? Louis XIV a fait construire un véritable piège pour la noblesse et finalement pour la royauté elle-même : le château de Versailles. Il s’agissait de mettre le peuple (de Paris) à des kilomètres, la conséquence a été de mettre la royauté à des années-lumière des yeux et du cœur du peuple. Dans cet éloignement, le roi n’a pas compris à quel point des réformes, réelles, structurelles, étaient nécessaires, et que la plupart concernaient la noblesse et le clergé, qui ont été dans cette situation si conservateurs. Contre cette minorité si puissante, il fallait de la volonté. Il n’en eut pas assez. Contre les faibles, on sait à quel point le pouvoir politique a toujours été «dur», terrible. Et que dire des esclaves dans les possessions françaises ? Bref, ce Roi a travaillé à sa perte d’une manière remarquable, et, j’ai beau cherché, j’ai bien du mal à nourrir une colonne qui lui soit favorable par des décisions ou des actions significatives. La présentation de l’ouvrage «La Chouannerie et les Guerres de Vendée» semble très neutre, mais le titre de la page est pourtant très clair : «Contre la Révolution». Or on sait que concernant cette rébellion d’une partie de la population française contre la direction parisienne de la Révolution, celle-ci fait l’objet d’un culte de la part des ennemis classiques de la Révolution, à commencer par des descendants de la noblesse. Qu’ils aient des convictions est leur droit. Que des ouvrages existent qui puissent alimenter et justifier ces convictions est aussi le droit des auteurs et de ces lecteurs. Mais qu’une entreprise commerciale s’adresse à ses clients en faisant la promotion d’une idéologie aussi clairement contre-révolutionnaire n’est à mon sens pas légitime. C’est à chacun de se faire son opinion par ses lectures, grâce au support des livres qu’il peut se procurer chez vous. En tant que client, citoyen de cette République, je n’apprécie pas que vous vous adressiez à moi et à vos autres clients en faisant la promotion d’une idéologie qui est si contraire à l’Histoire et aux principes de la France actuelle. Dans le magazine «Historia» qui accompagne votre catalogue, on trouve un article « Etre français, c’est ringard» qui entend pointer les mauvais «Français» qui se moqueraient de leur «identité nationale». Ce petit article cumule des sommets dans le ridicule. Il commence par affirmer que «la Résistance française durant la Seconde Guerre Mondiale semble bien être le dernier symbole de l’unité nationale». Cette phrase suscite le vertige. Car y a-t-il une époque dans les 100 dernières années qui ait incarné le plus possible la division entre les Français, entre des collaborateurs zélés du nazisme, une minorité résistante, constituée par toutes les parties de l’échiquier politique français mais dominée par les partis et les mouvements de gauche, et une majorité qui était à priori hostile au nazisme et à la collaboration, et qui oeuvra surtout pour sa survie… ? ! Or, s’il y eut une telle division, c’est parce qu’une partie des Français, à savoir les hommes et les femmes de l’extrême-droite politique et économique, méprisaient et mettaient en cause, au nom d’une identité qu’ils jugeaient si peu «ringarde» ces Français qui ne l’étaient pas assez ou pas du tout à leurs yeux, et pour cela, ils ont osé s’associer avec des Nazis allemands qui oeuvraient chaque jour à la destruction programmée de la France, avant l’élimination industrielle des Français dans les camps, s’ils avaient remporté la victoire. La vie et l’Histoire adorent les paradoxes : les prétendus meilleurs «patriotes» furent des traîtres, comme ce Maurras qui sera condamné à «l’indignité nationale». Ensuite, dans cet article, l’auteur prétend que les jeunes français ne se sentent pas français. Par mon métier, d’enseignant, je suis au contact de ces jeunes adultes (entre 16 et 20 ans) et s’ils ne se sentent pas spécialement français, c’est qu’ils se savent être français, par la langue qu’ils parlent, par leurs cultures, locales, nationales, par leurs références. Pour qui donc cette identité française fait obsession ? Pour cette extrême-droite qui pourtant a tant trahi les Français dans leur Histoire. (...) Je m’engage à faire connaître votre réponse et vous invite d’avance à ne pas me menacer d’une action juridique, car je ne céderai pas dans la diffusion de cette lettre qui est seulement basée sur des constats, des questions et une analyse critique.

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