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Retraites: derrière les chiffres, il y a des personnes

Publié le 19 juin 2010 par Dominique Lemoine @lemoinedo
Nous avons entendu, à longueur de journée, une couverture médiatique méticuleuse et savamment orchestrée par le gouvernement afin de créer un climat anxiogène propice à faire passer une réforme des retraites dure, injuste et non crédible.
 Et, pour le gouvernement qui souhaite détricoter tous les acquis sociaux, les retraites ne font pas exception...Revenons à la communication gouvernementale : des chiffres, encore des chiffres, toujours des chiffres...
 Mais le gouvernement a oublié l'essentiel : derrière les chiffres, il y a des personnes !
 La campagne sur l'équilibre des retraites a été complètement déshumanisée et le seul objectif reste donc financier. Cette campagne est complètement inhumaine à un point tel que le système de pénibilité qui a été retenu est honteux éthiquement et humainement et il nous ramène au temps les plus sombres de Zola.
 Eric Woerth a tout simplement oublié, volontairement je suppose, que les systèmes de solidarité met en exergue le type de société que l'on veut créer. Aujourd'hui, on voit bien que tout contribue à développer une société de castes : d'un côté, les grands argentiers et leurs courtisans dociles et, de l'autre, les "intouchables" qui ont le devoir de travailler jusqu'à l'usure irréversible.
 Dénonçons de suite une formulation bien faite et tellement logique que plus personne n'ose la contredire : "l'espérance de vie se rallonge, il est normal que le temps de travail soit plus long". 
 C'est une imposture car cette formulation barbare voudrait-elle nous imposer que la vie ne doit se résumer qu'à la seule dimension du travail : exit la famille, le repos bien mérité, la culture, les voyages pour rencontrer d'autres cultures, le farniente tout simplement ?
 Et puis, derrière cette formulation qui lie irrémédiablement temps de travail et espérance de vie, il y a une quasi-escroquerie : l'espérance de vie moyenne reflète statistiquement le comportement d'un groupe d'individus qui prend en compte de nombreux facteurs comme la mortalité infantile, les accidents de parcours (travail, transport, maladie) qui fait fortement fluctuer cette espérance de vie moyenne.
 Comment peut-on, sans lire dans une boule de cristal ou dans le marc de café, dire que l'espérance de vie va continuer à augmenter en 2050 alors qu'elle commence à régresser dans certains pays comme les Etats-Unis, probablement par des maladies liées à l'atteinte à l'environnement.
 C'est donc un calcul qui s'applique à une population, pas à un individu or la VIE s'applique bien à un individu.Autres points importants, on meurt de plus en plus vieux et la dépendance avec les maladies Alzheimer et autres maladies explosent : alors que veut dire espérance de vie, l'âge de la mort, ou l'âge où l'on est plus capable de sortir de chez soi, où on ne peut, comme le chanter si bien Jacques Brel qu'aller du lit à son fauteuil et de son fauteuil au lit !
 On voit donc que tous ces arguments basés sur l'espérance de vie sont fallacieux surtout en prenant en compte que rien n'est fait pour prendre en compte la dépendance qui laisse des familles entières dans le désarroi dans un premier temps puis dans des difficultés financières dans un second temps.
 Revenons à la communication gouvernementale. Celle-ci a  avant tout pour objectif de montrer que le système est en train d'exploser et elle prend pour propagande une voie devenue à la mode : ne pas faire porter à nos enfants le poids des retraites !
 Sauf que, le système par répartition est justement basé sur ce principe, les travailleurs d'aujourd'hui paient la retraite des travailleurs d'hier et les travailleurs de demain paieront la retraite des travailleurs d'aujourd'hui.
 On ne peut pas être pour le système de répartition et utiliser l'argumentaire qu'il ne faut pas faire porter le système de retraite sur les générations futures où alors il faut radicalement changer le mode de financement.Le tout est de savoir si le coût du système de financement des retraites sera ou non supportable par nos enfants.
 On nous prend l'exemple des autres pays européens qui reportent l'âge de départ à la retraite sans prendre en compte une spécificité française : les femmes françaises font plus d'enfants que leurs voisines européennes.Ce qui manque pour financer nos retraites actuellement ce ne sont pas les têtes et les bras mais du travail. On reporte l'âge de départ à la retraite du tiers de seniors qui travaillent en laissant plus longtemps au chômage les jeunes et les deux tiers de seniors qui ne travaillent pas et dont la majorité aimerait trouver du travail.
 Alors, le premier travail du gouvernement serait de donner les conditions d'une ré-industrialisation du territoire pour les métiers de demain qui ne doivent pas se résumer aux seuls services.
 Si tous ce que nous consommons est fabriqué en dehors de nos frontières, dans des pays sans couverture sociale alors nous avons deux solutions : appliquer une "certaine protection à nos frontières par une taxe sociale sur les produits importés de pays où l'homme est véritablement exploité (et certains pays ne se gênent pas !), ou l'Etat doit mobiliser de grands moyens pour rendre compétitive à l'heure du robot tout azimut, notre industrie.
Quand les hommes sont remplacés par les robots pour augmenter la productivité et abaisser les coûts, il serait alors logique que ces robots paient une contribution sociale.
Dominique Lemoine

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