Premières images : la mer , un bateau au loin, des écueils, des grottres ,cavernes dans les rochers où des sans-abri essaient de vivre, ramassent du bois mort, font un feu, gestes simples de la vie quotidienne de tous les temps...Nous sommes à Gênes , dans les quartiers pauvres , près du port ; cela baigne dans une lumière teintée d'ocre et de marron dans laquelle se meuvent des silhouettes ; une certaine poésie se dégage du film , dès le début ; et je doute, est-ce une fiction ? un documentaire ? ; les deux à la fois, en tous cas un film original dans le cinéma italien.
Enzo fait son apparition; il sort d'un train, suit les parois de tôle d'un container ; il vient de passer en tout plus de vingt ans en prison , en plusieurs séjours . Grand, massif , moustache abondante, il semble sortir d'un film de gangsters ou d'un western .. Il erre dans la ville comme lorsqu'on retrouve un lieu après une longue absence, ce qui a changé, les endroits qu'il se réapproprie , occasion pour voir des images d'archives qui font un portrait émouvant d'une Gênes qui n'existe plus.. et toujours dans cette même teinte ocre-marron .. Une voix off un peu éraillée, raconte.... Enzo a rencontré au cours d'un premier séjour carcéral un transexuel , Mary, et une belle histoire a commencé entre eux. Mary , sortie de prison, l'a attendu , lui préparant chaque soir un repas qui a refroidi .. Ils se retrouvent enfin et c'est un beau moment du film , les dix ou quinze dernières minutes ; ils se retrouvent avec leurs trois chiens dans leur rêve de maison simple avec un banc devant pour contempler le monde, paisiblement et avec chaud au coeur.
Ce film fait espérer en un cinéma italien qui renaît peu à peu à travers le documentaire. J'attends le film de Frammartino qui était à Cannes "le quattro volte". Et il y en a d'autres , beaucoup d'autres . L'institut culturel italien a dédié trois saisons au cours de ces trois dernières années au " nouveau documentaire italien" sous le titre "histoires d'it." .Grâce à ce genre, le cinéma italien sort peu à peu de la gangue sentimentale souvent mièvre et vulgaire dans laquelle il s'était englué. Je pense au cinéma grand public , heureusement il y a les grands - Bellocchio , Moretti.... et des plus jeunes, Munzi , Costanzo , Garrone ....