Une double page se charge de présenter ces personnages oubliés. J’étais en train de lire ces passages fort intéressants (le soleil était plus haut dans le ciel) lorsque je fus interrompue par deux félins venus m’offrir, dans mon bureau et à l’heure du petit déjeuner, un oisillon agonisant. Je tentai d’abord de m’illusionner sur la nature du présent, mais un vol de plumes et un petit cri caractéristique ne me laissèrent aucun doute. Je jetai mon livre, épouvantée, m’enfuis du lieu du crime et entrepris de réveiller la maisonnée de mes cris. Une course-poursuite dans ma bibliothèque aurait pu durer des heures (j’ai vu mes chats savourer longtemps dans le jardin le plaisir de l’attente), mais cette fois lorsque mon sauveur intervint, il ne restait plus grand-chose de la victime. Dans l’heure qui suivit, j’éprouvai une forme de répugnance à reprendre la lecture du livre de Spiegelman là où je l’avais abandonnée. Voilà comment je ne terminai pas tout à fait À l’ombre des tours mortes et comment je fis l’expérience dérisoire de deux missiles lancés contre le petit nid douillet que j’avais installé dans mon bureau. Je ne me montrai dans ces circonstances pas plus héroïque que l’illustrateur.
