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Louis-Ferdinand Céline nous parle

Publié le 30 juin 2010 par Petistspavs

Je vais vous faire un cadeau extraordinaire. Du moins celles et ceux que ça intéresse. Quoi, ça ? La littérature, le style en littérature, les voix éteintes mais dont les traces nous parviennent.

Les Editions Frémeaux ont pour vocation à faire revivre le temps, en restituant les sons et les voix passés. Louis Armstrong, le Général de Gaulle, Albert Camus, "Martine fête son anniversaire", on trouve tout chez Frémeaux.

C_line__Copenhague_1947

Il y a quelque temps déjà, cet éditeur a publié dans une version luxueuse par son iconographie autant que par le contenu sonore, une "anthologie officielle de Louis-Ferdinand Céline" enregistrée en 1955. Des extraits du Voyage... ou de Mort à crédit sont lus par Michel Simon, Arletty, Pierre Brasseur. C'est plus qu'émouvant, ça serre le coeur et interpelle l'endroit où la cervelle s'interroge sur le sens des choses. Un jour, je vous passerai Le certificat d'études par Arletty, passage de Mort à crédit, cette littérature populairement élitaire ou le contraire ?

Le plus émouvant pour moi (et j'avoue qu'en découvrant l'EXISTENCE miraculeuse de ces enregistrements) sont des extraits d'entretiens avec L.F. Céline, qui aurait pu rester le Docteur Destouche, le médecin des pauvres, mais qui a préféré faire le métier de génie de la Littérature, doublé d'un français douteux. "Pas très résistant(e)", comme avait déclaré Arletty à un journaliste venu l'interviewer à Fresnes où elle était incarcérée pour faits de collaboration.

Oui, Louis-Ferdinand Céline a écrit des choses odieuses. Peu d'ailleurs. Il n'était pas, comme d'autres qui ont eu ensuite leur brevet de gaullisme à Je suis partout ou à Gringoire. Mais il a écrit, sur les juifs en particulier, des choses ignobles.

En même temps, on ne peut pas dire qu'il a profité de la collaboration. Collaboration qu'il justifiait par son pacifisme. Il faut admettre que bien des personnages de l'époque auraient collaboré joyeusement, comme Jacques Duclos et Marcel Cachin, qui avaient commencé à négocier avec l'occupant la reparution de l'Humanité en 1940, l'occupant ne restant pas de glace devant cette occasion de s'allier avec les représentants de la Classe ouvrière. Cela ne se fit pas. Et cela n'excuse pas certains propos de Céline.

Mais contrairement à Cachin et Duclos qui étaient des politicards véreux et versatiles, L.F. Céline était un écrivain. Et quel écrivain !

Dans l'enregistrement que je vous propose, essayez de dépasser la difficulté de l'homme à parler haut et fort. Moi, j'imagine un homme tellement seul que, quand on vient l'interroger, il se répand dans une bile verbale qu'on n'arrête plus, avec cette rage de dire ce qui n'a pas été dit, cette langue populaire-savante de l'homme blessé qui sait, au fond de lui, qu'il est meilleur que les autres, non comme homme, mais comme écrivain. Ses développements sur le style pourraient, je pense, être repris mot par mot par des auteurs aussi exigeants que Philippe Djian en France, Brett Easton Ellis dans le monde.

Je vous en prie, cet enregistrement dure 16 : 58, ça peut paraître long mais ça vaut tellement le coup. Ce qu'il dit sur "le style en littérature" est si actuel, si pertinent, si important. Prenez quelques minutes, une bière ou un coca, asseyez-vous et, en essayant de vous acclimater au phrasé qui dérange un peu, écoutez. Ce type a peut-être été historiquement un salaud, ce qu'il dit de la littérature est essentiel.

Incroyable, non ?


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