Le temps de la chaise

Toujours les choses m'échappent
mais pas les chaises
je suis dans le bus et les façades défilent je fais les cent pas dans la cour et des visages se détournent
ou est-ce moi qui regarde ailleurs?
La fête bat son plein et je bats les sandales
toujours le temps m'échappe
parce que je le veux bien
je m'évertue à le rattraper: il n'est déjà pas là
toujours la musique m'échappe, j'ai besoin d'une bande-son pour ma vie
sinon je ne suis rien
toujours les passions qui ont le plus compté pour moi m'échappent
- le cinéma, les livres, les voyages
toujours il n'y a que des chaises
et des moments assis
Envie d'évasion, pourquoi donc?
L'argent ne met pas de gants quand il fait le bonheur sale
toujours ces phrases qui ne veulent rien dire
et qui ne parlent à personne
issues de la paresse et du dégoût
sur un chemin descendant dans la grande ville
que j'aurais voulu habiter
toujours ces voitures que j'abjecte bloquant les routes
accélération forcée, esprit matraqué
le corps est un mécanisme qu'il est aisé de mener
par le bout du nez
l'esprit assommé susurre sous le capot la chanson des pilotes d'antan
toujours je pense que je m'en sortirai, que le temps reviendra
alors que c'est écrit
toujours cette torpeur, cet ennui, cet oubli
ce blog idiot comme la mer cadenassée
toujours je passe dans la rue
des questions dans les poches
le regard hagard
toujours vous ne me parlez pas
craignant le rejet
je m'en suis fait une raison
toujours vous n'êtes pas là
ailleurs l'herbe est plus verte
espace de soupirs
toujours je m'explique devant le miroir
pour les murs
pour le futur