Dernier album du joueur de bugle français Alex Tassel, celui-ci est dans la continuité de ce qu'avait commencé d'entreprendre le musicien lors de son précedent disque solo Movements, avec toutefois cette fois-ci deux espaces d'expression musicaux bien distincts, répartis en 2 disques, le premier étant "acoustique", alors que le second se revendique plus "électrique", permettant au groupe de laisser exprimer une palette plus large de texture jazzifique, assez différente, mais très réussie.
En acoustique
Vraiment convaincant, ce premier disque aborde des thèmes aux accords chauds et modernes, assez simplistes (cela n'a rien de péjoratif), et sans ostentation technique, ce que pour ma part j'apprécie tout particulièrement.
Sans prétendre à révolutionner le genre, cette formation s'appuie d'abord sur une parfaite connaissance de ses membres, évoluant pour la plupart ensemble depuis maintenant plus de 10 ans. Ce projet est pour A.Tassel un juste retour à l'origine de sa passion pour le jazz. Après avoir, pour ses premiers albums, quelque peu délaisser le jeu acoustique, il lui importait ici de revenir à ses premiers amours, expérience déjà tentée lors de ses 20 ans, mais pour laquelle les 2 albums produits à l'époque n'ont jamais été édités. Suivront de très nombreuses collaborations remarquées et très différentes aux cotés de grands musiciens comme Laurent De Wilde ou Manu Katche, ainsi que plusieurs albums en association avec Guillaume Naturel, et pour lesquels ils invitent des artistes comme Marcus Miller, Song, ou Guru. Il participe aussi à l'enregistrement de l'album "Soulshine" de Dj Cam récompensé au UK Hip-Hop Awards de 2002 dans la catégorie meilleure production européenne Nu-Soul.
A.Tassel : «L'acoustique me manquait même si, en tant que sideman, je n'ai jamais arrêté de jouer dans ce contexte. C'est important de le mentionner car, si mes premiers disques commercialisés ont été des formations électriques, je n'en ai pas moins commencé à jouer et à enregistrer en formation acoustique. Pour ce disque, j'ai eu l'occasion d'y revenir dans de bonnes conditions techniques, avec un groupe constittué de musiciens qui m'accompagne depuis longtemps»
En électrique
Tous les titres sont composés au piano par A.Tassel (a l'exception de "Anouman" écrit par Django Reinhardt). Sur les 2 disques, très peu d'effets ou d'artifices sonores. Le bugle est joué de la même manière, en évitant les pédales d'effet ou la sourdine. Seule la basse électrique diffère de la contrebasse, tout comme l'arrivée du Rhodes, préféré au piano pour illustrer la deuxième partie du projet, l'idée principale étant, à partir de thèmes identiques, de pouvoir faire évoluer les ambiances et les atmosphères à travers 2 styles bien distincts mais finalement très complémentaires.
Après de nombreuses écoutes, et une fois digérées les 100 minutes que les 2 volets proposent, je peux affirmer que ma préférence pencherait légèrement pour le jeu acoustique du premier disque que je trouve plus intense et mieux fourni. Pour tout vous dire, lorsque j'ai décidé d'acheter cet album, le disquaire chez qui j'ai pu en découvrir des extraits ne proposait en écoute que la partie électrique, déjà très convaincante, et en tout cas suffisante pour que je décide de repartir avec. Ce n'est qu'une fois chez moi que j'ai pu en apprécier l'ensemble et en comparer les genres. Je l'écoute très régulièrement et je ne m'en lasse pas. J'aime tous les thèmes abordés, très facilement mémorisables et parfaitement interprétés par le groupe. Enfin, et pour achever de me ravir, la sonorité de A.Tassel au bugle n'est pas sans rappeler l'estime et l'influence qu'il porte à Miles Davis et que l'on retrouve dans sa manière de jouer, laissant une place importante aux silences, et sans modulation de vibrato.
Pour conclure, je dirai que ce double album est une très belle réussite et aura, de par le large panel musical offert, l'avantage de rassembler aussi bien les amateurs que les novices du jazz. De belles émotions en perspective pour tous les amoureux sensibles à la musique bien faite.