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Le 13 n'est pas au départ

Publié le 14 juillet 2010 par Hongkongfoufou

Par GoudurixYZ

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J’ai vu deux fois mon grand-père. La première, j’avais 10 ans, il ne savait pas qui j’étais. Et la seconde. J’ai appris récemment qu’il était supporter du Red Star et qu’il avait un portrait de Staline punaisé dans le placard de sa cuisine. A l’intérieur, prudence. Je ne sais pas pourquoi, mais j’en éprouve une certaine fierté. Il s’appelait Charles. Comme Charles Steene à une époque où les pères ressemblaient à des grands-pères, espérance de vie oblige. Moi, c’est Thierry. Le Théodore de l’après-guerre. Théodore comme Théodore-Charles le Coq, le Théodore Poussin du livre, ou comment passer du coq à l’âne, ou de l’âne au coq en l’occurrence. Mais oui, Théodore Poussin, le jeune employé aux écritures du port de Dunkerque qui s’embarque à 25 ans sur le Cap Padaran pour tenter la grande aventure comme Marius Olivier s’embarque à 22 ans sur la Malaisie pour tenter la grande aventure. Eh oui, en voilà deux qui sans le savoir n’ont pas résisté au même moment à l’appel de la mer. Marseille et Dunkerque, c’est toujours les meilleurs qui s’en vont. 80 ans plus tard, si Marius avait été fonctionnaire, il se serait retrouvé muté du côté de Dunkerque et on n’en aurait pas fait toute une histoire. Tout juste un film tellement poignant et bouleversant sur les ch’tis et vous seriez déjà en train de faire autre chose. Arrêtons donc de faire le Yoyo (contre la lune noire) entre Dunkerque et Marseille pour cause de mal de mer.

Hier soir, je me suis tapé pour la quinzième fois Marius sur Paris Première. Marseille sur Paris Première, un comble. J’avais le choix avec les Bidasses au régiment su W9 et les Charlots font l’Espagne sur Virgin 17. Je me suis dépêché pour être à l’heure, il n’y a que les 5 premières minutes que je ne connaisse pas par cœur. J’adore Charpin, Maitre Panisse. C’est peut-être mon acteur préféré. (Avec Tim Curry dans Rocky Horror Picture Show.) Mais peu importe. J’aime bien Poussin. Théodore Poussin. J’en ai lu un après avoir vu l’autre. J’en ai relu un après avoir revu l’autre.

Arrivé à ce stade, je tiens à prévenir les moins nostalgiques, la suite ne présente pas un grand intérêt et n’a pour but que de me lamenter sur l’inanité de l’existence en alignant les lieux communs à l’intention des plus âgés d’entre nous.

La semaine prochaine, je pars en Malaisie, comme celle qui a emmené l’un et où est parti l’autre. Pas comme Marius, avec femme et enfant. Pas comme Théodore, avec billet retour. M’est d’avis qu’on ne va pas passer Marius dans l’avion. Si je n’avais pas peur de l’excédent de bagages, j’emporterais l’intégrale de Théodore Poussin. Pavé à l’intention de… de qui d’ailleurs ? De ceux qui ne connaissent pas et qui en veulent quatre d’un coup ? De ceux qui ?... Euh. Mais à l’intégrale, nul n’est tenu. Seul avantage de ce genre d’enterrement de première classe, les bonus, comme pour un vulgaire DVD. Les voilà, dans le rayon de la FNAC au chaud sous leur décevante de couverture, éparpillés dans les volumes à venir. C’est à se demander si Franck Le Gall est au courant que ce livre est sorti. Je ne me demande même pas s’il est au courant que j’aimerais bien lire un Théodore Poussin. Qu’on aimerait bien lire un Théodore Poussin (on est deux). Le numéro 13 par exemple... On devait le retrouver pendant la guerre de 40… Comme il y a autant de chance qu’il ne me lise que l’analphabète capitaine Town ne lise sa biographie, le passager porté disparu n’est pas près de réapparaître. Au point où j’en suis, je serais presque prêt à lire Théodore chez les Picaros.

Quelque chose m’a toujours laissé songeur moi qui habite une ville de province. Taille oblige, vous croisez des gens, recroisez des gens, ces gens deviennent des connaissances, ces connaissances des relations, puis des copains et un peu plus encore, vous savez ça comme moi. Un beau jour vous réalisez qu’il y en a un, qu’il y en a deux, que vous n’avez pas vu depuis des lustres. On vous aurait dit, on m’aurait dit qu’ils ont raté un virage, on aurait mis deux jours à s’en remettre, et là, rien, presque rien. S’il existe de drôles d’endroit pour une rencontre, il n’existe pas de drôle d’endroit pour une disparition.

Mais comment oublier ses livres à coté de la cheminée ou sur l’étagère du couloir ? Impossible. Impossible de m’y faire. De m’y faire que Théodore Poussin et Victor, Phil, Jean et Isaac soient aux abonnés absents.

Marius, Theodore : 3 films + 12 livres = 15 moyens de quitter la réalité et de ne pas penser à soi. Il paraît que c’est la fin qui justifie les moyens. Allez, tous les moyens sont bons, je vais quand même regarder le catalogue Dupuis ou emporter Les aventures de la fin de l’épisode. Oui, je crois que je vais faire ça.

Théodore Poussin, l’intégrale tome 1


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