Dans le cadre de Casanova Forever, le musée Pierre-André Benoît à Alès accueille (seulement jusqu’au 12 septembre) un trio qui s’est coopté, deux hommes et une femme, un triangle entre les pointes duquel circulent et se répondent messages de séduction et de connivence. Dans cette partie à trois bandes, c’est la femme qui introduit une rigueur lisse, dépouillée, propre, sa touche de folie ne se révèlant qu’au prix d’une grande attention. Ses robes transformables, monacales, au plus près du corps offrent parfois des surprises comme cette robe cache-sein au couvercle amovible à volonté,
allaitement ou impulsion soudaine. Marie-Ange Guilleminot conçoit depuis des années des robes grain de beauté (homothétie parfaite, autant que je puisse en juger, de sa peau), des robes nombril (percées à l’endroit adéquat), des robes transpiration (élégamment tachées sous les bras), des chapeaux-robes et des collants-sacs à dos. En plus de ces transformations bien connues, et,
pour tout dire, qui ne surprennent plus guère et tournent un peu au gadget, son Émotion Contenue demande au spectateur (elle-même sur la photo), assis sur un tabouret instable, d’enfiler un bas noir sur son visage, d’accommoder de son mieux et
de tenter de discerner un visage incertain au bout du tunnel de vision.
Elle présente aussi ici un projet architectural de maison de poupées destinée à accueillir une collection de vilaines petites filles, exposées dans la salle voisine (Odile Ségui, Chagrin). Ce contrepied à ses robes, si froid, si moderniste, si oriental, est peut-être son rempart inconscient face aux deux hommes du trio qui, eux, ne parlent que de séduction et pour qui les robes semblent plutôt faites pour être ôtées prestement.








S’est-on éloigné de Casanova ? Je ne crois pas, si l’on songe au reclus de Dux écrivant ses Mémoires, en forme d’autoportrait menteur et camouflé. En tout cas, il est fascinant, au bout de toutes les séductions jalonnant ce périple, d’entrevoir, au détour d’un piercing, une réflexion sur l’instauration du tableau remontant aux Flamands du XVème siècle.
Photos Guilleminot 3 et Trenet 2 courtoisie du Frac Languedoc Roussillon; autres photos de l’auteur, excepté van Eyck. Marie-Ange Guilleminot, Didier Trenet et Paul-Armand Gette étant tous trois représentés par l’ADAGP, les photos de leurs oeuvres seront retirées du blog à la fin de l’exposition, et il ne vous restera plus que la poupée d’Odile Ségui et le bout de cuirasse de van Eyck…
Voyage à l’invitation du FRAC Languedoc Roussillon.
