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Stefan Zweig : "Brûlant Secret"

Par Manus

Stefan Zweig : "Brűlant Secret"

Quelques heures en voiture, direction la France, m'auront permis de goûter à Stefan Zweig, écrivain, dramaturge, journaliste, et biographe autrichien.

C'est par "Brûlant Secret" éd. Grasset   Cahiers Rouges ) traduit de l'allemand par Alzir Hella, que je me laissai happer par cet auteur magistral, révélant les processus émotionnels de ses personnages sous l'impulsion de leur inconscient, ce qui revient à approfondir le détérminisme dont les êtres seraient sujets, ces derniers menant un combat d'une violence innouïe pour tenter de se tenir en hommes debouts, dotés de leur libre arbitre.

Quatre nouvelles composent cet ouvrage qui  tiennent le lecteur en haleine, tant l'auteur oeuvre avec finesse l'art de décortiquer l'âme humaine.

Nouvelles liées les unes aux autres, les personnages changent de peau comme les serpents lors de leur mue, et d'une histoire à l'autre, Zweig utilise la structure psychologique modulée selon les événements vécus par ses héros, pour y poursuivre le déterminisme implacable par lequel ces derniers seront enchaînés au fil des autres nouvelles.

Dans "Brûlant Secret" qui débute ce recueil, Zweig nous introduit dans un hotel du Semmering où se reposent une jeune maman et son fils, Edgar.  Un fonctionnaire en villégiature dans cette station y languit, et décide, pour tuer son ennui, de s'adonner aux exercices de la séduction.

L'homme usera de tous les moyens pour s'offrir cette femme, et c'est au travers du jeune enfant que son macchiavélisme prend corps :  d'amitié en manipulation, il parvient rapidement à créer une relation passionnelle entre Edgar et lui, l'innocence de l'enfant s'ouvrant en confiance absolue à cette amitié qui lui est proposée, le coeur de ce jeune garçon dilatée comme jamais à tant de possibilités d'altérité.

Subtilement, le baron s'approche de la mère par ce biais innocent et pur qu'est l'enfance, et de ligne en ligne, Zweig attisera la braises entre ce séducteur et cette femme mariée. 

Captivé, le lecteur suit cette passion dévorant les héros, consume les corps et l'esprit des personnages en place, et délaisse lentement mais sûrement, cette amitié entre Edgar et l'homme.

Issue tout droit de l'idéal qui caractérise encore les âmes emplies d'espoir, l'amitié d'Edgard n'était en réalité qu'une jaillissante passion qui l'emportait entièrement, s'engouffrant dans les moindres pores de sa peau, dans les plus infimes interstices de son âme. 

Avec une douleur sans nom, ce dernier réalisera l'esprit malin qui anime le baron en vue de l'éloigner de sa mère afin qu'elle puisse mieux tomber dans ses bras avides.

Fou de souffrance, l'enfant, à coups de couteaux dans le dos, sortira peu à peu de l'innocence, et rongé par la jalousie, tentera tout pour détruire la passion qui unit les deux adultes.

Zweig signe quatre nouvelles où la passion, le désir, la séduction, et l'érotisme s'introduisent dans le coeur de l'homme, cherchent à croître en fouillant dans les zones d'ombres, creusant d'interminables souterrains qui mettent en lumière la boue collant à leur âme. 

Pour assouvir leurs désirs, les héros se jeteront avec délectation au-delà de leurs frontières interdites, plongeant de leurs mains nues dans le visqueux du mensonge, du vice, et de la perversité calculée et froide en vue d'atteindre leurs objectifs.

Révélant avec brio les parties inavouées et inadmissibles qui bouillonnent secrètement à l'ombre de ces visages souriants, Zweig nous ouvre à l'Homme, dans toute son horreur, et dans toute sa grâce.

Panthère.


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