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Les avions passent… les poules trépassent ! Sarko passe : l’agriculture trépasse !

Publié le 28 août 2010 par Kamizole

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Non, ça n’est pas du tout “iogolo” comme disait naguère un enfant de la famille… Quand j’ai vu ce titre sur Libération hier matin 4800 poules terrassées par la peur en Bretagne, il est bien évident que j’en voulus savoir davantage. Cela s’est passé le 24 août 2010 à Pléguien, près de Saint-Brieux (Côtes d’Armor) vers midi. Deux avions militaires ont survolé à basse altitude – on se demande bien pourquoi ! - l’exploitation d’Etienne Le Méhauté, éleveur de poules. Il était en train de manger et dit-il «Quand ils sont passés, ça nous a fait des vibrations dans le dos, tellement c’était fort»

4.800 jeunes poules (10 mois) de son élevage – qui en compte 68.500 - ont encore moins supporté. Certainement prises de panique, elles se sont toutes entassées sur le même côté du bâtiment où elles ont péri étouffées. Etienne Le Méhaudé estime le préjudice entre 12.000 et 15.000 euros. Le ministère de la Défense a bien confirmé le passage de deux avions de chasse mardi midi mais «reste cependant prudent sur le lien entre le passage des avions militaires et la mort des animaux»

Ben, voyons ! . Ils vont trouver n’importe quel prétexte – une “bonne décanche” dirait un Solognot pour mauvaise excuse - pour ne pas indemniser l’éleveur. Lors même qu’un vétérinaire qui a pratiqué des autopsies sur quelques poules confirme qu’elles étaient encore vivantes avant le passage des avions. Ce qui n’a rien de surprenant, de quoi seraient-elles mortes si rapidement et en si grand grand nombre ? Sans doute d’une grippe aviaire fulgurante

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  • Vous verrez que dans 10 ans, l’affaire sera toujours pendante et que l’éleveur n’aura encore que ses yeux pour pleurer… L’Etat est le plus mauvais payeur de France et de Navarre.
  • Pourtant, Nicolas Sarkozy n’est pas avare de promesses – constamment recyclées d’une fois sur l’autre ! – envers le monde agricole, électorat traditionnel de la droite. Petite irone : il devait être le 27 août 2010 à nouveau au chevet des agriculteurs en crise (dépêche de l’AFP du 26 août 2010)… Je ne sais pas s’il vous en souvient mais le 27 octobre 2009 à Poligny dans le Jura, il avait prononcé un discours – historique ! – sur les aides à l’agriculture. Or, les nouvelles promesses qu’il faisait n’étaient que le copié-collé d’un autre discours prononcé en février 2009, promesses jamais tenues, au demeurant.

    Le linguiste Jean Veronis, interrogé par 20 minutes notait à cette occasion «le manque de professionnalisme des équipes qui travaillent à l’Elysée et rédigent les discours» de Nicolas Sarkozy «un ventriloque qui prononce des choses qui ne viennent pas de lui»… Plaisante formule

    :)

    Ne croyez surtout pas que Nicolas Sarkozy entende améliorer le sort des paysans dont il se tape littéralement. Il a tout simplement les foies : les agriculteurs l’ont boudé lors des régionales de mars 2010. Ils ne sont plus guère nombreux à se fier à ses discours : ils ne voient rien venir ! Il pourra toujours promettre «qu’il ne les laissera pas tomber» ou se dire prêt au clash pour défendre la politique agricole commune… Et mon cul, c’est du poulet ?

    Nicolas Sarkozy s’est cru obligé de plaider la sincérité de son engagement auprès des agriculteurs. Alors un conseil : quand Sarko affirme quelque chose, il faudrait – comme les psychanalystes – avoir deux oreilles distinctes : l’une qui entend ce qu’il dit et l’autre qui décrypte le non-dit et comprend qu’il pense tout le contraire.

    Il dénonce le côté “folklorique” de l’intérêt qu’apportait Jacques Chirac au monde agricole… Sans doute mais c’était le côté sympa – sûrement bon vivant - et sans prétention de Chirac. Les paysans ne s’y trompent pas qui ils lui font encore un accueil triomphal au Salon de l’Agriculture. Sarko ne pourrait jamais soutenir la comparaison sans être grotesque s’il s’y risquait. Il n’a ni l’art ni la manière. Trop bégueule et ne parvenant même pas à cacher son mépris profond. : ce n’est ni le «premier cercle» des généreux donateurs de l’UMP ni le salon des Bettencourt. Nicolas Sarkozy qui est malappris comme ce n’est pas possible a le dédain aussi facile que l’injure contre les petites gens. «Casse-toi (pöv c.) t’es pas de ma bande» !

    Jean-Michel Le Métayer (FNSEA) aura beau dire «Il a raison de montrer qu’il s’intéresse à l’agriculture» et attendre «un signal fort»… Tu parles ! Le signal, sans les actes qui suivent, c’est pipeau de chez «demain on rase gratis»… Benoît Gavin, patron des Jeunes agriculteurs a bien compris «l’impatience de ses troupes (…) qu’il tente de calmer : la prochaine fois, si rien n’a avancé, on aura du mal à tenir la base»

    Peut-être un jour la base comprendra-t-elle que ces gnolguis sont du côté du pouvoir et profitent à fond du système en faisant semblant de défendre les intérêts de leurs adhérents. On est autrement direct et lucide chez les petits syndicats agricoles : «Les producteurs ont compris qu’il ne fallait pas trop se fier à ce genre de discours» (François Lucas, président de la Coordination rurale) ou Philippe Colin, porte-parole de la Confédération paysanne : «Ce n’est que de la gesticulation»

    Laurent Fabius ne s’y trompe pas qui vendredi dénonçait “une présidence gesticulatoire”. Certes, au sujet de la calamiteuse politique de reconduite des Roms mais le principe est exactement le même : faire oublier que la France va très mal non pas tant du fait de la crise économique et sociale mais à cause de la gestion calamiteuse de l’économie et des finances publiques.

    Faire oublier la réforme des retraites, faire oublier les scandaleuses affaires, Bettencourt-Woerth et toutim : l’argent des con…tribuables généreusement distribué au multimilliar-daires du COUAC/40 cependant que le plus grand nombre des Français tire la langue et doit s’attendre à un serrage de ceinture d’un degré dont nous n’avons même pas le souvenir. Sauf sans doute les octogénaires et nonagénaires qui auront connu la grande dépression des années 30.

    Le sort réel – dramatique - des agriculteurs est au demeurant le cadet des soucis de Nicolas Sarkozy. Ségolène Royal s’insurgeait très justement vendredi contre cette “politique spectacle” qui doit beaucoup plus à la commedia dell’Arte – masque compris ! – qu’à la gestion sérieuse et prudente des dossiers “Assez des mises en scène !”. Plutôt que de sempiternelles visites à grand spectacle digne de Barnum et Pinder réunis, elle réclame des actes pour une population «dans le désarroi».

    Rencontrant des producteurs de lait à La Rochelle, elle exige que «le lait soit correctement rémunéré (…) que l’on répartisse mieux la valeur ajoutée et que le prix du lait aille aux producteurs (…) que les primes agricoles soient mieux réparties car les agriculteurs sont dans la souffrance, ils sont dans le désarroi».

    Je ne peux que donner raison à Ségolène Royal quand elle affirme qu’il faut «respecter nos agriculteurs, nos paysans et nos éleveurs car ce sont eux qui préservent l’identité rurale de la France : sans eux la France n’est plus la France ! (…) Voici une identité qui est menacée. On les laisse mourir dans l’indifférence et dans le silence !»

    Ségolène Royale prêche une convertie : petite-fille d’un éleveur de charolais et fille d’un écolo avant la lettre qui s’insurgeait devant toutes les conneries infligées aux campagnes depuis les années 50 – à commencer par le funeste “remembrement” des terres qui a outrageusement avantagé les plus gros agriculteurs et anticipé tous les désastres environnementaux et catastrophes prétendues naturelles en supprimant les haies, les arbres et les fossés - au nom du productivisme ravageur, j’en suis intimement persuadée depuis ma plus tendre enfance.

    Ne croyez surtout pas que Nicolas Sarkozy soit animé le moins du monde de ce respect de l’agriculture à taille humaine, de la préservation de l’environnement et préoccupé du sort des paysans. C’est tout le contraire ! Il suffit de lire la dépêche de l’AFP du 27 août 2010 reproduite par un Flash-info du Figaro Les aides agricoles maintenues en 2011. Certes, Nicolas Sarkozy promet de “sanctuariser” – s’il y a un terme que je ne supporte pas, c’est bien celui-ci, utilisé à toutes les sauces comme s’il y avait quelque chose de religieux dans les décisions politiques ! – «dans le budget 2011 les aides à l’élevage et à l’agriculture dans les zones défavorisées, nonobstant la priorité donnée à la lutte contre les déficits»

  • A force de concessions et de reculades, il ne devrait pas rester grand chose de toutes les entourloupettes que Sarko et ses sbires envisageaient : preuve une fois de plus que la mobilisation est payante !
  • Mais surtout, il faut lire ce que recommande Nicolas Sarkozy aux producteurs : «travailler avec les grandes surfaces – leurs principaux clients – avec la nécessité de mieux structurer leurs filières de production pour peser d’un poids plus lourd dans leurs négociations commerciales»… Tu parles ! Nicolas Sarkozy reste fidèle à sa conception d’une agriculture de plus en plus “industrielle” et productiviste telle qu’elle a été définie par la dernière loi de programmation agricole. Je n’ai pas le texte sous les yeux ni le temps de le rechercher mais suffisamment de mémoire pour affirmer sans aucun risque de me tromper que cela sonne le glas des petites exploitations.

    Nicolas Sarkozy aura beau affirmer vouloir garder «une agriculture puissante» (Sud-Ouest le 28 août 2010) et insister «sur la nécessité, pour l’Europe, de s’assurer que les importations de produits agricoles, la viande au premier plan, soient soumises aux mêmes règles sanitaires, environne-mentales et de traçabilité pour leur production que celles imposées à ses propres producteurs (…) pour d’éviter des distorsions de concurrence “phénoménales” et assurer que «la capacité de la France à céder dans les négociations sur ces dossiers est nulle» point n’est besoin d’être grand clerc ou la Pythie pour savoir par avance que dans l’Europe communautaire totalement soumise à la loi de la jungle ultralibérale les multinationales finissent toujours par imposer leurs règles fût-ce en contradiction avec la stricte légalité.

  • «Adieu veau, vache, cochon, couvée» ! Assurément - comme Perrette - l’esprit de Sarko «bat la campagne» - électorale ? - faisant force «châteaux en Espagne»… Devrons-nous également - «en farce» - «l’appeler Pot au lait» ?
  • Nonobstant son double discours permanent, le “progrès” selon Sarko est le triomphe de l’hyper-productivisme ravageur, fer de lance de l’ultralibéralisme et de la globalisation des marchés. Qu’importent les besoins des populations ! Les agriculteurs doivent passer sous les fourches caudines des multinationales de l’agro-alimentaire et de la grande distri-bution, complices. La compétitivité : il s’agit moins d’exporter – tous les pays y tendent, ce que Jérémy Rifkin avait naguère brillamment démontré dans «La fin du travail» - que de soumettre les producteurs aux prix les plus bas du marché mondial.

    Ainsi, l’on nous dit aujourd’hui que les producteurs de lait français doivent s’aligner sur les Allemands. Pourquoi sont-ils plus bas ? Mystère et boulle de gomme. A moins qu’on leur fît payer moins cher les aliments pour le bétail, le matériel agricole, etc. Ce qui est tout à fait possible : en France, les prix font 3 ou 4 fois la culbute, les margoulins ayant l’art de plumer les clients dans les plus grandes largeurs ! Sinon, demain l’on trouvera encore moins cher : le lait chinois, par exemple… mortelle mélamine comprise ?

    La situation actuelle ressemble trait pour trait à celle de l’été 2008 : spéculation sur les matières premières agricoles et notamment le blé, du fait de la sécheresse et du refus de la Russie d’exporter du blé. Les mêmes prétextes de mauvaises récoltes étaient invoqués il y a deux ans. Les prix – du pain, de la farine et des pâtes alimentaires sont déjà partis en flèche lors même que les récoltes précédentes ne sont pas épuisées ! L’on parle d’une augmentation concomitante du prix de la viande.

    Non seulement les poulets – logique mais uniquement pour les poulets de grain – mais aussi du porc, de bœuf, etc… Faut pas se foutre de la gueule du monde ! A qui fera-t-on croire que l’on nourrit le porc ou les vaches avec du blé ? Dans ce monde complètement pourri tout est prétexte pour les margoulins de s’enrichir sur le dos des consommateurs.

    Certains redoutent le retour des “émeutes de la faim” dans les pays du Maghreb et de l’Afrique sub-saharienne. Ventre affamé n’a pas d’oreilles. Le Niger est déjà confronté à la disette, de façon endémique. Il faut être un c… patenté comme Minc pour oser parler de «mondialisation heureuse» !


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