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Pierrot le Fou, de Jean-Luc Godard

Publié le 03 septembre 2010 par Onarretetout

Pierrot_le_FouAu moment où Jean Seberg est vue sur un écran, dans une salle de cinéma, une caméra à la main, quand cette caméra semble pointée sur Jean-Paul Belmondo, assis dans la salle (derrière Jean-Pierre Léaud), Pierrot le Fou m’apparaît à chaque fois comme le miroir d’un autre film, A bout de souffle.

Une brune remplace une blonde. C’est encore le même acteur mais plus tout à fait le même homme. Lequel est le reflet de l’autre ? Cela vaut aussi pour l’histoire racontée, car il y a une narration, quoi que certains aient pu dire.

Mais ce film est surtout un poème, là où le mot est allé avec l’image, comme le soleil avec la mer. Il n’y a pas que Rimbaud, mais peu importe que l’on reconnaisse toutes les citations, utilisées là comme matériau, comme ces livres empilés dont on ne connaîtra pas tous les auteurs. Les textes mêmes qu’écrit le personnage interprété par Belmondo (« Je ne m’appelle pas Pierrot, je m’appelle Ferdinand ») sont tronqués. L’œil du spectateur n’a jamais le temps de tout lire ou de reconstituer tout le texte. Peu importe. Ce sont des mots qui s’ajoutent aux mots et qui, peu à peu, font une sorte de tableau vivant.

J’ai longtemps vu le personnage interprété par Anna Karina comme une femme superficielle («Qu’est-ce que j’peux faire ? J’sais pas quoi faire !») mais après cette récente diffusion sur Arte, je ne le pense plus. Dans ce film poétique et pictural, elle est la couleur indispensable à la réalisation de l’œuvre. Elle meurt d’une balle de revolver parce que Poiccard, dans A bout de souffle, meurt d’une balle de revolver (Poiccard, c'était dans le dos). Godard réécrit non pas l’histoire d’une relation homme-femme, mais son point-de-vue mouvant sur sa propre existence, et pas sous un angle anecdotique mais à partir de questions essentielles : Qu’est-ce qu’un nom ? (« Joyce a essayé mais on doit pouvoir faire mieux ») Que faire des mots ? (et il découpe RIVIERA en VIE et RI/RA, par exemple) A quoi sert la poésie ? A rien sans doute selon les critères de rentabilité, mais à vivre, à traverser la France (« Allons-y, Alonso »), à finir en feu d’artifice. Même s’il n’est pas cité, la fin du film me fait penser à René Char : « La vie commencerait par une explosion et finirait par un concordat ? C’est absurde. » (Feuillets d’Hypnos)

Vous pouvez lire une analyse de Julien d’Abrigeon en cliquant sur l’affiche.

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