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Chaussures vides/Scarpe vuote, de Sylvie Durbec (par Laurent Grisel)

Par Florence Trocmé


 

Durbec
Ce recueil se compose de deux parties.  
Dans la première, notes au jour le jour, d’un seize à un trente juillet d’une année qu’on ne connaît pas, d’une résidence au monastère de Saorge, au-dessus de la vallée de la Roya, entre Nice et Turin.  
Les premiers poèmes sont de nuit. L’immense nuit, « d’étoile à étoile », nuit des sensations et idées incontrôlées : 
[...] quelle est cette intuition 
qui me permet de comprendre la nuit et 
  son contraire 
(p.13) 
Les trois derniers s’ouvrent au « travail des sources », au travail de la jardinière, à l’écriture prise dans les sources, dans l’histoire des vallées, l’hospitalité. 
Dans la deuxième partie, le poème qui donne son titre au recueil part du vide, celui des chaussures d’une passante en allée pour toujours. 
Sur ce thème les séquences suivantes offrent dérives et variations. Nous allons dans les pas de Sylvie Durbec marcheuse mais aussi dans ceux de Sebald, de « Paul Brusson qui est né à Ougrée en avril 1921 et arrêté en 1942 », « enfermé à Breendonk, en Belgique », le seul camp ouvert dans ce pays par les nazis pour y concentrer les juifs avant leur déportation vers les camps de destruction, dans ceux d’Érasme, et même en tapis volant jusqu’à Tabriz. Ce vide appelle toute l’humanité. 
Les paysages et les lieux résonnent des paroles qui y ont été prononcés, du bruit des pas contre le sol dans les couloirs, sur les sentiers : 
j’entends les pas des hommes perdus.  
(p.31) 
Février et avril sonnent ensemble comme un accord des deux mains sur le clavier : 
Les arbres en février dépouillés comme la pluie 
tissaient des nuits aveuglées. 
Les mêmes en avril frissonnent de plaisir  
(p.39) 
L’italien, que l’auteur parle et traduit (lire Sento le voci / J’entends des fous sur le site remue.net) y affleure. C’est nécessaire et doux. 
Par moments le poème s’ordonne en quatrains, le vers devient régulier ou quasi, des rimes s’embrassent. Comme si le recueil tout entier était pris dans une très longue durée de vies et de générations et que celles-ci appelaient dans la langue même. 
par Laurent Grisel 
 
Sylvie Durbec,
Chaussures vides / Scarpe vuote
 
Les Carnets du Dessert de Lune, Bruxelles, 2010 
site de l‘éditeur 
ISBN 978-2-930235-98-1 
56 p., 11 €  
Sylvie Durbec et la petite Librairie des Champs  
Poésies.Choisies.net, Le site de Laurent Grisel 


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