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Twelve pieds sous terre (déjà mort)

Par Borokoff

A propos de Twelve de Joel Schumacher 3 out of 5 stars

Twelve pieds sous terre (déjà mort)

À New York, Mike, dit « White Mike », a délaissé ses cours et son école privée de l’Upper East Side pour devenir un dealer de marijuana. Issu d’un milieu modeste (son père tient un restaurant), il choisit ses acheteurs (ses victimes ?) parmi des jeunes adolescents aussi riches que oisifs. Mais tout dérape le jour où le cousin de Mike, Charlie, est assassiné par Lionel (’50 cent’), un dealer de « twelve », un mélange de cocaïne et d’ecstasy dont les jeunes raffolent. Mais que « White Mike » a toujours refusé de vendre.

Adaptation du roman éponyme de Nick McDonell, écrit à l’âge de 17 ans, Twelve raconte la longue descente aux Enfers d’un adolescent de 17 ans (joué par Chace Crawford, alias Nate Archibald dans Gossip Girl) aussi paumé que livré à l’errance.

Ce qu’il y a de remarquable dans Twelve, qui est un thriller très réussi, c’est d’une part la manière avec laquelle Schumacher parvient à décrire le désoeuvrement terrifiant qui règne dans ces milieux huppés new-yorkais, d’autre part l’originalité de la construction du film lui-même, dont toute la narration est dite en voix-off par la voix de l’acteur Kiefer Sutherland.

Si l’on s’attend, avec ce procédé narratif, au début du film, à un thriller « barbant », il n’en est rien. L’acteur qui joue le personnage de « White Mike », s’il souffre de certains tics d’acteur de série télé, a une vraie profondeur, un monde à lui qui lui permettront, on le sent, de sortir de l’enfer et de l’impasse dans lesquels il s’est fourré. La psychologie de Mike est assez poussée. C’est un solitaire méfiant, qui parle très peu, un homme « sans qualités » comme dirait Musil. Traumatisé par les images de sa mère morte, atteinte d’un cancer (flashs back dans une lumière blanche spectrale). Mais un homme qui erre sans but et ne fait rien de sa vie.

Malgré toutes les saloperies qu’il refourgue à ces petits bourgeois défoncés, ces filles surfaites et sur maquillées, « White Mike » n’est pas un mauvais bougre ». Energique, il déteste les milieux sociaux où il « travaille », comme son altercation avec un jeune joueur d’escrime en atteste. On n’arrive pas à imaginer qu’il soit mauvais au fond. Du moins, ses yeux disent le contraire. Mais soit par faiblesse, soit par facilité ou manque d’ambition, « White Mike » s’est laissé porter par un univers et un système qui le payent bien.

Mais on sent, un peu comme le personnage de Norton dans La 25ème heure de Spike Lee, qu’il y a quelque chose en lui de plus profond, quelque chose de sensible et qui pourrait le faire changer, aller au delà de l’échec dans lequel il se complait. Se sauver de son manque de passions. De la passivité dans laquelle il s’est enfermée. Il y a quelque chose qu’il ne supporte plus en lui-même. A-t-on des raisons d’y croire ?

« White Mike » manque de repaires, traîne sa longue carcasse comme un vagabond dans les rues jusqu’à parfois dormir dans des chantiers.

Et la fin du film, toute en renaissance dostoïevskienne (on pense à Raskolnikov après tout le mal qu’il a fait) fait s’illuminer enfin ce visage morne de jeune homme qui semble (re)naître à la vie. Et y trouver un sens. Par amour ? Peut-être. Chut ! On ne dira rien, Buffalo 66

www.youtube.com/watch?v=S9VVHACOUZE


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