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Interview Josy Malet-Praud : « Un, deux, trois, SOLEIL ! »

Par Manus

Interview Josy Malet-Praud : Ť Un, deux, trois, SOLEIL ! ť

Interview Josy Malet-Praud : « Un, deux, trois, SOLEIL ! »

«Les thèmes traitent de l’humain dans sa globalité, sa banalité, son inévitable imperfection, et pour autant parfois son extraordinaire capacité à se dépasser, à s’élever à l’occasion de circonstances particulières. »

 

Interview Josy Malet-Praud : « Un, deux, trois, SOLEIL ! »

Josy Malet-praud, une femme dynamique, à la personnalité affirmée et sensible a, après avoir suivi des études scientifiques, intégrée les classes de prépa-ENA, pour dans la foulée intégrer l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique : elle sera nommée directeur d’hôpital à Paris, puis en province, tout en conservant de nombreuses activités parallèles, d’enseignement et de conseil, notamment.

Malgré cette vie trépidante et exaltante, elle n’abandonnera jamais l’écriture, son blog en témoigne, son livre en est l’expression.

Une vie, un roman, qui dès le plus jeune âge semble avoir commencé.

1. Savina : Une vie passionnante, où l’écriture a toujours eu sa place.  Un fait révélateur à vos quatorze ans ?

Josy : J’ai plutôt le sentiment d’avoir vécu, toujours à cent à l’heure, plus d’une vie, reliées les unes aux autres par une heureuse curiosité permanente et un optimiste irréductible …

Quatorze ans. C’est l’âge où j’ai clairement pris conscience  qu’il fallait que je prenne la direction des opérations si je voulais échapper à un certain « déterminisme social » à la Durkheim. L’urgence était d’autant plus grande, que le confortable sentiment d’immortalité inhérent à la jeunesse avait déjà fait place à l’idée (saugrenue, oui, je sais) que je ne passerais probablement pas le cap des dix-sept ans. Enfin, j’avais aussi observé à quel point la mémoire humaine pouvait être infidèle, avec quelle facilité déconcertante elle pratiquait l’art de la distorsion en s’arrangeant des réalités pour en faire surgir, plus tard, un succédané qu’on nomme –les souvenirs. … Et ça me dérangeait.

D’où cette -première marche en écriture- à peu près organisée, vers quatorze ans. Il s’agissait d’un récit de vie d’un peu plus de cent pages qui n’a, heureusement, jamais été publié. Par ailleurs, indépendamment de ce besoin frénétique de -graver dans le marbre-, l’écriture était déjà un moyen d’évasion, une possibilité de création, de construction. Par chance, j’ai appris à écrire et lire très tôt. Peut-être que cet attrait précoce pour les lettres et les horizons qu’elles ouvrent expliquent en partie…l’auteur aujourd’hui ?

2. Savina : Comment conciliez-vous votre carrière professionnelle, vie familiale, et l’écriture ?

Josy : Le moins mal possible. Les trois pôles se sont rapidement  trouvés –à l’étroit. J’ai mis un terme à ma carrière professionnelle il y a une dizaine d’années, pour préserver ma vie de famille, tout en poursuivant la belle aventure de l’écriture. Ce sont les deux piliers sur lesquels je suis réellement en équilibre. Je ne vous dirais pas qu’il n’y a pas parfois quelques grains de sable dans les rouages de cette organisation, mais j’ai le bonheur d’être soutenue par un compagnon compréhensif et des adolescents respectueux de mon travail. Et puis, comme je suis plus inspirée le soir et la nuit, cela facilite les choses ; pas les réveils, en revanche…

3. Savina : Quand avez-vous réellement décidé d’écrire un livre et pourquoi ?

Josy : Je n’ai pas vraiment décidé. Je sentais que ça se produirait. J’ai été portée par les événements, favorisée par des occasions. Pourquoi ? Aucune idée…Je ne me suis jamais interrogée sur ce point, c’était une évidence. La question était plutôt : quand ? En attendant, j’ai continué d’écrire et de trimballer mes textes dans des cartons à chaque fois que je déménageais.  Et puis pour être totalement sincère, j’ai des pudeurs probablement un peu désuètes aujourd’hui : je n’imaginais pas proposer à un éditeur, des textes qui demandaient encore pas mal de travail. L’élément déclencheur est venu de l’extérieur. Avec une relation qui s’est nouée dans le cadre d’un atelier d’écriture auquel je participais. La –relation sympathique- s’est rapidement transformée en amitié véritable. Cette amie m’a encouragée à franchir le pas, et c’est grâce à elle que j’ai mis un pied dans la maison d’édition belge, Chloé des Lys. Première tentative auprès d’un éditeur, qui s’est traduite par un contrat : j’ai eu beaucoup de chance. J’en suis consciente.

4. Savina : « Un, deux, trois SOLEIL !, est un recueil de nouvelles et de textes courts.  Ces nouvelles ont-elles un lien entre elles ?

Josy : Le fil conducteur n’est pas apparent et c’est logique : la variété prévaut à l’organisation thématique, d’autant plus que ces textes, à l’origine, n’avaient pas vocation à constituer un recueil. Pour autant, le lien existe : ils sont le reflet de ma vision du monde et des Hommes. On y retrouve toujours l’homme et la femme, leurs mises à l’épreuve du fait même de leur condition humaine, leurs réactions aux circonstances, aux situations dans lesquelles l’auteur les plonge à travers les récits. Le lien, c’est l’humain avec au-dessus de la tête, une étoile pour le guider, s’il le veut bien, celle que j’appelle « la dignité ».

5. Savina : Combien de nouvelles comporte ce recueil ?  Quels sont les thèmes qui en ressurgissent ?

Josy : Il  est constitué de vingt-deux textes, parmi lesquels une quinzaine de nouvelles au sens académique du terme. Les thèmes sont variés, traitent du rôle du hasard dans l’existence, de celui de la foi, de l’espérance, du poids du libre-arbitre, de l’importance de la dignité comme valeur fondamentale, à travers l’autopsie des comportements…Bref, de l’humain dans sa globalité, sa banalité, son inévitable imperfection, et pour autant parfois son extraordinaire capacité à se dépasser, à s’élever à l’occasion de circonstances particulières.

6. Savina : Ecrire des nouvelles vous permet-il de rendre l’histoire plus dense, plus puissante ?  Pour quelle raison avez-vous choisi ce type de structure ?

Josy : En effet, une nouvelle –réussie- répond, notamment, à ces deux impératifs : densité, que je traduirais par concision, et puissance, dans la mesure où elle doit soulever des émotions rapides, vives et suffisamment marquantes chez le lecteur.

C’est un genre qui me convient bien. Même pour un auteur perfectionniste comme je pense l’être, il est possible d’écrire une nouvelle dans des délais assez courts. Quand le temps est compté, c’est plutôt satisfaisant de pouvoir terminer un texte assez rapidement. J’insiste sur –relativement-, car évidemment, avant de considérer qu’un texte est abouti, il m’arrive d’y revenir cinq, six, dix fois...et même de laisser « dormir » l’ébauche quelques mois. Par ailleurs, une nouvelle, c’est d’abord une histoire, qui prend souvent pour point de départ la banalité du quotidien et finit par éclater comme un feu d’artifice du 14 juillet : j’aime bien pimenter le quotidien de mes personnages et les faire basculer dans l’impensable, l’improbable, l’inattendu.

Ceci étant, je n’ai pas vraiment choisi ce genre. J’ai commencé par écrire des nouvelles, un peu comme on s’entraîne à courir pour développer une certaine endurance. Ecrire un roman demande du souffle, une parfaite maîtrise sur la durée, et comme dans le sport, cette capacité à –tenir la distance- se développe par un entraînement régulier et des efforts progressifs. C’est la raison pour laquelle j’ai commencé par là …aujourd’hui, je ne crains plus la course de fond. Je ne dis pas que c’est facile, mais certainement plus accessible.

7. Savina : Une nouvelle parmi ce recueil vous tient-elle particulièrement à cœur ?

Josy : Si vous demandez à une mère quel est l’enfant qu’elle préfère, elle vous répondra : aucun, tous, ou bien … Je ne sais pas. Peut-être ai-je une affection particulière pour Anaïs, parce que je la connais bien cette petite fille ; pour  Elle, la Carabosse et l’Amazone parce qu’elle reflète, je crois, la complexité et la tendresse des femmes.

8. Savina : Editée aux éd. Chloé des Lys, un hasard, un coup de chance, ou une volonté d’intégrer cette équipe qui vous correspond ?

Josy : « Les trois, mon Capitaine »… Un hasard puisque je dois d’être publiée à une rencontre inopinée évoquée tout à l’heure. Un coup de chance ensuite, dans la mesure où cet auteur connaissait les Editions Chloé des Lys : elle m’en a donné les coordonnées et m’a fortement incitée à m’en servir. Quant à la volonté d’intégrer l’équipe, elle n’est apparue qu’ensuite, une fois le contrat signé. Je suis arrivée un peu comme un nouveau-né dans cette grande communauté, un peu étrangère aussi puisque je ne suis pas belge. L’intégration ne fut ni difficile ni longue : les auteurs publiés par les Editions Chloé des Lys cultivent pour la plupart l’Art de la main tendue. Si vous savez tendre la vôtre aussi, vous pénétrer dans une équipe où vous n’êtes jamais isolée, jamais égarée.

9. Savina : Avez-vous d’autres projets en écriture en chantier ?

Josy : Oui, bien sûr. J’ai ouvert le chantier d’un roman depuis un petit moment. C’est un euphémisme : cela fait trois ans déjà ! Vous voyez, quand je parle de –course de fond- ! J’en avais rédigé une première version provisoire quand je me suis aperçue, que non, décidément, ça n’allait pas ! Plutôt que de procéder à des rafistolages approximatifs, j’ai recommencé à zéro. Aujourd’hui, les fondations sont plus solides et j’avance, quand bien même je reviens souvent sur mes pas pour conduire le roman dans des voies qui s’ouvrent d’elles-mêmes et auxquelles je n’avais pas pensé au départ. Il m’arrive aussi régulièrement de le remanier : je pars à la chasse aux longueurs, aux incohérences potentielles, et même parfois j’évacue des paragraphes entiers qui, avec le recul, me semblent médiocres, mal écrits, peu pertinents, etc. Parce que je suis exigeante, parce que je suis de celles qui doutent avant, pendant, après.  Néanmoins, j’espère le terminer dans le courant de l’année prochaine.

Entre temps, j’ai composé un second recueil de nouvelles qui se trouve entre les mains du Comité de lecture. A suivre…

Enfin, j’alterne toujours l’écriture du roman avec celle de nouvelles ; cela me permet de m’aérer l’esprit. Le passage d’une écriture à l’autre constitue des pauses indispensables. Suivre le fil d’un roman en gestation au-delà de trois ou quatre heures d’affilée est épuisant. Et surtout risqué : on part facilement dans des digressions, des impasses, on ne tient plus aussi bien les rênes… Il faut savoir, je crois, s’arrêter pour mieux repartir.

10. Savina : Que représente l’écriture pour vous ?

Josy : Que pourrais-je répondre ? Un épanouissement. Des ailes pour voler. Des outils pour bâtir. Ecrire est pour moi un acte naturel, inné, j’y trouve un plaisir intense, et je me sens « chez moi » dans l’écriture ; ne pas écrire me donne immédiatement le sentiment très désagréable d’un manque, d’une vacuité. Ce que Gabriel Garcia Márquez résume, lui, bien mieux  lorsqu’il écrit : « Le simple plaisir de la narration est peut-être l’état de l’homme qui s’apparente le plus à la lévitation ».

11. Savina : Un dernier mot pour les lecteurs de ce blog ?

Josy : Oui, bien sûr. D’abord et surtout,  je les remercie de m’avoir lue ; et d’autre part, à ceux qui prendront le chemin de l’édition, j’aimerais dire que dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, quoi qu’on en dise, je suis convaincue que tout reste ouvert à celui qui ne renonce pas. 

Savina : Je vous remercie, chère Josy, de nous permettre de découvrir votre si riche personnalité, et ce recueil qui, incontestablement, dégage joie de vivre, bonne humeur, et de nombreux clins d’yeux.

Savina de Jamblinne.


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