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[Critique DVD] L’arbre et la forêt

Par Gicquel

[Critique DVD] L’arbre et la forêt

[Critique DVD] L’arbre et la forêt
On ne doit jamais dévoiler les intrigues d’un film , encore moins la fin . Ici le cas est encore plus extrême;toute révélation hâtive sur le secret de famille qui noue ce très beau film , en atténuerait sa portée .Et d’ailleurs dès les premières images, Olivier Ducastel et Jacques Martineau balisent leur mise en scène qui nous installe dans la confidence, sans trop en dire, sans trop en faire. Une entrée en matière mystérieuse, après l’enterrement d’un fils auquel le père n’assiste pas.

Un secret de famille, comme tant d’autres. Protégé par un cercle rapproché, ignoré par les autres , pourtant si proches.Le patriarche demeure impénétrable à toute divulgation, jusqu’à la mort de ce fils aîné .Lui savait la vérité …

[Critique DVD] L’arbre et la forêt

Ca se passe dans une propriété bourgeoise de Sologne .La famille s’y retrouve, autour d’une mère attentive, prête à évacuer les tensions perceptibles, de cette communauté, où les silences et les confidences sont emportés par les élans wagnériens et tonitruants que le père (et grand-père) inflige chaque matin au réveil.Ca peut paraître intenable  et pourtant une harmonie certaine y règne , par la grâce d’une belle fille, divorcée du disparu, au-dessus de toutes les contingences familiales, et d’un futur gendre , gentiment en retrait. On se tolère et l’on s’aime  , aidé en cela par une caméra attentive aux petits détails, aux agacements fugaces ,aux regards énigmatiques, tous ces petits riens qui après la mort et la révélation , vont permettre à la famille de se retrouver pleinement, sereinement.

A sa tête Guy Marchand , époustouflant dans ce rôle de décomposition , qu’il épouse avec une maestria toute en retenue et en superbe attention. Rigide et imperméable à tout sentiment, il parle à son arbre, témoin de sa faille et de ses tourments,de ce passé de guerre , et de ses années d’emprisonnement , pour des raisons politiques avaient dit ses parents. Françoise Fabian qui l’accompagne dans ce couple improbable,est la mère protectrice ,tout aussi remarquable, plus en retrait , mais si présente dans les regards et les non-dits. Un verre d’alcool aidant , la voici toute en confidence face à cette belle fille, délurée, que joue Catherine Mouchet .

[Critique DVD] L’arbre et la forêt

Catherine Mouchet et Sabrina Seyvecou

C’est l’un des très émouvants face à face que les réalisateurs filment avec une puissance extraordinaire, car toujours à distance, toujours sans parti pris,alors que la trame du récit permet tous les étendards possibles.

Je citerai encore François Négret en fils tout aussi intraitable qu’alcoolique, puis Sabrina Seyvecou , la petite fille du grand père énigmatique, une jeune femme en quête d’amour et de vérité.On pourra simplement reprocher aux deux réalisateurs, d’avoir calquer un tantinet leur direction d’acteurs sur cette histoire à l’apreté indéféctible. Mais l’ensemble épouse bien, malgré tout le réalisme ambiant et la dignité des grands silences quand ceux ci se rapportent à l’intime et à la mémoire . Cet arbre là ne cache pas la forêt, elle aussi baignée  un moment par la musique de Richard Wagner ( un magnifique survole de la canopée).  Il la révèle .

LE SUPPLEMENT
Attention, si vous n’avez pas vu le film, et que vous souhaitez le faire, je vous conseille de ne pas lire ce qui suit. Car le seul bonus proposé ici se réfère à toute l’intrigue du film.

[Critique DVD] L’arbre et la forêt

Deux réalisateurs, deux complices

Le paragraphe 175

Celui qui dans la constitution allemande désignait l’homosexualité comme une perversion, une maladie . Cet article permettait alors l’emprisonnement des homosexuels, ce qui fut le cas pour 10.000 allemands pendant la guerre. Ce document propose ici de retrouver le peu de survivants qui connurent l’enfermement dans les camps de concentration. Certains se laissent filmer à la va vite, mais ne témoigneront pas . D’autres évoquent  leur passé, en remontant très loin dans leur enfance. Ils parlent des camps de jeunesse, du romantisme qui s’en détachait et de la mise en avant  » de la nature, de l’amitié et du corps humain« .Heinz Dormer aujourd’hui grabataire se souvient de ses premières amours avec des garçons, chez les scouts, il avait douze ans . «  Je ne les ai pas oubliés, et j’ai aussi fait l’amour avec les chefs de 20-21 ans « . Les témoignages ainsi se succèdent, qui rapportent les mêmes valeurs sur la beauté du corps, inculquées par les nazis «  la race aryenne devant nous épargner la défaite » disaient-ils  » en nous montrant tout ce qu’il fallait détester chez les juifs« .

Puis les premiers tracas, la fermeture des lieux homosexuels, la traque, le département spécial à la Gestapo consacré  » aux crimes d’homosexualité« , le début de l’horreur jusqu’aux camps de concentration. Ils n’ont rien oublié.


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