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Je n'aime pas la voiture. D'aussi loin que je m'en souvienne, je n'ai jamais aimé. Je lui ai toujours préféré le train. Ne me demandez pas pourquoi, c'est comme ça et ça n'a rien à voir avec une quelconque tendance écologiste. Sans doute parce que j'y ai beaucoup plus de souvenirs. Bon, après je ne dis pas que je n'ai pas connu comme tout le monde ou presque, ces départs en vacances, en famille, vers le Sud de la France, au milieu des bouchons. Mais, bon, voilà, d'ailleurs, dit comme ça, ça ne fait pas forcément penser à des choses positives. Alors que le train. Après, c'est vrai, le train, je l'ai pris bien plus tard. Le train, ce n'est pas l'enfance. Le train, c'est Paris surtout. Et pour beaucoup de Provinciaux, Paris, c'est triste, c'est froid, c'est gris. Paris, c'est juste un passage obligé, parce que le boulot y est plus facile à trouver. Et Paris, on n'a bien souvent pas envie d'y rester. Alors que moi, non. Rien que le fait de devoir reprendre une voiture, je n'ai pas envie de retourner en Province. Non, je suis fainéant, je préfère prendre le train. Parce qu'on y voit les gens, les paysages. On a le temps de lire, d'écouter de la musique, de regarder des films, de manger, de dormir, de rêver un peu, de ne rien faire aussi, de vivre en fait. Et forcément, ça laisse plus de possibilités, plus de places pour le souvenir. Le train, c'est par exemple cette chanson de John Cale, sur un trajet Paris-Dunkerque, retrouver l'être aimé.
I suppose I'm glad I'm on this trainAnd it's longSomewhere between Dunkirk and ParisMost People Here Are Still AsleepBut I'm awakeLooking Out From Here - At Half-Past FranceLe train, c'est maintenant ma fille qui observe partout autour d'elle, qui fait des sourires aux gens, qui scrute par la fenêtre, qui nous questionne du regard, qui s'endort un peu dans nos bras, qui rit aux éclats. Et tant pis, s'il n'est pas toujours à l'heure, tant pis s'il y a des grèves. Je n'ai jamais aimé la voiture.