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"The Housemaid" de Im Sang-soo, ou la servitude volontaire

Publié le 24 septembre 2010 par Artemisia72

The Housemaid est un film coréen, sorti le 15 septembre dernier ; un très beau film, avec Jeon-Do-Yeon, Lee Jung-Jae et Youn Yuh-jung...
Une jeune fille un peu naïve, Euny, est embauchée comme aide-gouvernante dans une riche famille ; au début, tout le monde est charmant avec elle, l'époux - un "maître" plutôt séduisant -, l'épouse, enceinte jusqu'aux yeux de jumeaux, la gouvernante en titre... Puis le maître se glisse dans son lit, et tout dérape : avant même qu'elle ait conscience d'être enceinte, la gouvernante la dénonce à l'épouse et à la diabolique mère de celle-ci. Tout le film racontera les efforts vains et désespérés d'Euny pour sauver son bébé, et se sauver elle-même, dans cette terrifiante famille où tout peut se régler par un gros chèque, mais où l'on ne recule ni devant une tentative de meurtre, ni devant un empoisonnement...

Plus que l'oppression, le film semble une illustration cruelle de la "servitude volontaire" selon La Boétie : le personnage troublant de la gouvernante, incapable de choisir entre le camp des maîtres et celui des domestiques, et qui réagira trop tard, en est l'incarnation même ; mais Euny elle aussi, aveugle, incapable de fuir à temps malgré les avertissements...

Tout le monde rivalise ici de cruauté et de servilité : le maître, qui peut-être n'eut pas été hostile à Euny et à son bébé, mais qui se contentera d'une vague protestation verbale contre sa belle-mère et sa femme, coupables d'avoir fait absorber à Euny des substances abortives ; la gouvernante, complice active de la belle-mère, avant de tourner casaque ; la belle-mère et l'épouse, victimes consentantes du pouvoir de l'argent – la mère expliquant à sa fille qu'elle doit bien accepter les infidélités du mari, prix à payer pour une vie confortable et riche...

Seule étincelle de pureté dans cet univers oppressant : la fillette du couple, polie et respectueuse, qui s'est réellement attachée à Euny, et assistera, pétrifiée d'horreur, à la scène finale...

Si le film nous révèle quelques aspects pittoresques de la société sud-coréenne, à demi occidentalisée (le maître joue Beethoven au piano et semble apprécier les grands crus), là n'est pas l'essentiel : ce qu'il donne à voir, ce sont les ravages du pouvoir et de l'argent sur l'individu et la société. Un thème universel et magnifiquement traité.


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