Après les échecs cuisants de l'équipe nationale de football du Cameroun à la Coupe d'Afrique des Nations en Angola et à la coupe du monde Sud Africaine, « ceux qui voient le mal partout », l'expression est du goléador, avaient précipitamment fait de Samuel Eto'o Fils, le bouc émissaire de cette déroute. Glose hâtivement reprise dans des médias, mus par des ressentiments injustifiés, et plus avides de sensations morbides que d'information.
Lors de la conférence de presse du jeudi 9 septembre, face à un panel de journalistes insatiables d'attaques personnelles, Samuel Eto'o Fils a tout dit. En essayant de regrouper par thèmes les réponses, condensées et simplifiées, du capitaine des Lions Indomptables, la lumière jaillit d'elle-même.
Sur le Capitanat
Une rumeur malsaine prétendait que le goléador avait usurpé de son grade de Capitaine des Lions Indomptables au travers de sordides complots contre le vieux Lion Rigobert Song Bahanack. Ã- ce sujet, Eto'o Fils fait la révélation suivante : « voici la vérité des faits. Lorsque Paul Le Guen est nommé entraîneur de l'équipe nationale du Cameroun, nous avons quatre matches à gagner pour nous qualifier pour la Can et la Coupe du monde. En Autriche, j'ai une conversation de 3 minutes avec lui. Il m'annonce que Song me remettra le brassard de capitaine. Je lui réponds que je ne peux pas accepter cette offre tant que mon grand frère Rigobert est encore en activité au sein de cette équipe. Le Guen insiste ; je lui demande un temps de réflexion. Je contacte Gérémy Njitap qui me conseille d'en parler à Rigobert. Ce dernier me dit : « pas de problèmes, petit frère, j'attends le contact de Le Guen ». Par la suite, et sans mon accord d'ailleurs, Paul Le Guen annonce que je suis désormais le Capitaine des Lions Indomptables ».
Ã- ceux qui lui reprochent de n'avoir pas tenu sa promesse selon laquelle il devait remettre le brassard à Song, la réponse est claire : « l'équipe nationale est une institution. Il y a l'entraineur, le président de la Fédération camerounaise de football, le ministre des Sports et de l'Education physique ; je respecte l'institution. Et de toutes les façons, personne n'a réagit quand j'ai été nommé capitaine. Reste à savoir si les gens étaient sincères ».
Sur la CAN et le Mondial
« Ceux qui voient le mal partout » véhiculaient la rumeur selon laquelle le "Gagneur de Champions Leagues" serait responsable de l'ambiance malsaine qui a régné au sein des Lions Indomptables pendant ces deux compétitions. Ils glosaient également sur son ego surdimensionné, et sur biens d'autres délits encore, que le capitaine de l'équipe nationale va rapidement disqualifier.
« Il ne faut pas chercher à distraire les Camerounais ; il faut leur dire la vérité. J'ai fait mon rapport sur ces compétitions et je l'ai remis au ministre. Ce n'est pas à moi d'en parler ici. Les Camerounais doivent être informés car c'est l'argent de tous les Camerounais que l'on nous donne à nous les joueurs.
Le capitaine est celui qui facilite les relations entre les joueurs et les dirigeants. Dans mon rôle de capitaine, je suis limité mais, en tant que leader de l'équipe, je peux faire plus pour conduire mon pays à la victoire. Je suis surpris que l'on me reproche tant de choses car, j'ai tout fait pour que tout se passe bien. Ma préoccupation première a toujours été de bien représenter le Cameroun.
Pour anticiper sur la bonne ambiance au sein de l'équipe, je suis allé à Istanbul rencontrer Rigobert, en présence de Gérémy Njitap er d'une dame, une aînée dont je tairai le nom. Il n'y avait aucun problème. Il est surprenant que les problèmes soient nés au cours de ces compétitions. Et le grand frère Rigobert n'est pas le seul que j'ai rencontré ou le seul à qui j'ai téléphoné. Les gens n'ont pas été sincères. Ã aucun moment, le brassard de capitaine n'a semblé provoquer de malaises.
« Ceux qui voient le mal partout » cherchent à distraire les Camerounais. Je suis le capitaine et le leader de cette équipe, et je suis souvent consulté. Chose tout à fait normale. Chaque entraîneur a ses choix et je n'ai rien contre Paul Le Guen. Si j'avais un ego comme vous dites, je serais parti de l'équipe ».
Sur ses relations avec ses coéquipiers
Sur ce chapitre, les journalistes reprenaient, sans aucun recoupement, la rumeur suivant laquelle Samuel Eto'o Fils aurait des pouvoirs exorbitants au sein de l'équipe nationale, et auraient décidé d'en écarter certains joueurs avec lesquels il aurait des relations houleuses. Il se disait même qu'il avait offert des montres à ses coéquipiers et que certains les auraient refusées. Ragots d'arrière boutique magistralement démentis par le goléador.
« J'ai toujours été un meneur d'hommes. Ã- Majorque j'étais le capitaine de l'équipe. Et on a vu les résultats. J'ai joué avec les meilleurs footballeurs du monde et il ne s'est posé aucun problème. Je n'ai jamais cherché à être LA STAR du groupe. Mon souci est la victoire de l'équipe. C'est d'ailleurs pourquoi je peux jouer sur le côté ou en retrait, alors que je suis en mesure d'exiger de jouer en pointe. Ce qui compte en premier lieu, c'est l'équipe.
Le problème au Cameroun, c'est qu'on n'a jamais été là mais on a vu. J'ai surpris des Camerounais parlant de ce qui s'était passé en Afrique du Sud, à un chef d'Etat qui avait demandé à me recevoir. Je leur ai demandé : mes frères est-ce que vous étiez là ? Je suis toujours très ami avec mes coéquipiers.
Je le répète, on cherche à distraire les Camerounais. Je n'ai jamais eu de problèmes avec Alexandre Song. Encore moins avec Achille Emana. Achille sait ce que j'ai toujours représenté pour lui. Il y a eu plusieurs entraîneurs au Cameroun ; Achille Emana ne jouait pas. Sur conseil de Roger Milla, qui m'a expliqué qu'avec quelqu'un comme Achille derrière moi, je serais plus efficace, j'ai pesé de tout mon poids pour qu'Achille joue. Et il a joué la CAN au Ghana. Tout comme j'ai pesé de tout mon poids pour que Thierry Henry vienne au Barça. Je suis toujours consulté. Pour les joueurs que vous dites exclus de l'équipe nationale, je n'ai aucune notification dans ce sens. Le problème au Cameroun est celui de la corruption. Vous faites ceci, on dit que vous avez payé. On dit du bien de vous, on dit que vous avez payé.
Au Cameroun, ce qui est une bonne idée devient un problème. J'ai offert des montres à mes coéquipiers au Maroc parce que j'estimais qu'ils le méritaient après notre victoire au Gabon. Le prix de la montre n'a aucune importance parce que c'est un cadeau et un cadeau c'est juste pour se souvenir d'une étape de la vie. Je me suis levé personnellement pour remettre la sienne à Rigobert Song, parce que c'est un grand frère. Tous les gars ont reçu chacun sa montre et il n'y avait pas de problème. Je vais vous dire : j'ai remis une prime de 200 millions à l'équipe et tout le monde a déchargé. Naturellement, j'ai prélevé ma part car, je suis aussi un joueur de cette équipe nationale ».
Sur son rendement au sein des Lions Indomptables
La rumeur véhiculée par « ceux qui voient le mal partout » affirmait que le capitaine des Lions Indomptables jouait à fond avec ses différents clubs et levait le pied en équipe nationale. Qu'il était un capitaine malchanceux. La réponse à ces persiflages est édifiante.
« L'analyse est erronée. Ce que je gagne en club ne peut pas me donner ce que je gagne en équipe nationale. Le Cameroun passe avant tout. Quand je reviens d'Angola après la CAN, Morinho, mon entraineur à l'Inter de Milan, me met sur le banc de touche pendant un mois ; et il a raison. Avant mon départ pour l'Angola, je devais me soigner de légères blessures mais j'ai dit à Morinho : j'aime avant tout mon pays. Son équipe tournait bien ; il n'avait pas essentiellement besoin de moi. Mais en tant que son meilleur joueur, il m'a tout de même aligné après quelques matches.
Le football au Cameroun aujourd'hui, c'est Eto'o. Comme hier, c'était Roger Milla. J'ai 100 sélections en équipe nationale et 50 buts marqués, soit 1 but tous les deux matches. Je pense que c'est un bon rendement. Tout le monde voit ce que je fais. Je suis un gagneur.
Quel entraineur pouvait prendre le risque de se passer de Roger Milla hier ? Quel entraineur peut prendre le risque de se passer de Samuel Eto'o aujourd'hui ? Je suis l'un des joueurs les plus professionnels au monde. Le joueur qui arrive avec une heure et trente minutes d'avance aux entrainements.
Avec l'équipe nationale, nous nous sommes qualifiés pour les deux compétitions majeures de l'année 2010. Avec l'équipe nationale nous gagnons certains matches, nous perdons d'autres. Avec l'équipe nationale, je joue avec les meilleurs joueurs du Cameroun mais, en club, je joue avec les meilleurs joueurs du monde. Vous n'allez pas me demander, par exemple, d'inventer un Messi pour le Cameroun ».
Sur l'avenir du football camerounais
« Je rêve d'une équipe nationale camerounaise comme celle du Ghana. Avec un bon esprit comme celui de l'équipe du GHANA ; On ne marchande pas sa place à l'équipe nationale. Il faut une équipe faite de discipline, de respect et de sincérité. Celui qui ne la voit pas comme cela ne devrait pas y venir. Vous avez vu mon collègue de l'Inter, Muntari , mis au banc à la CAN et le grand capitaine Appiah, réserviste en Afrique du Sud. C'est çà la discipline, le respect et la sincérité.
Je souhaite que nous ayons une bonne équipe à la CAN de 2012 et une très bonne équipe à la coupe du monde de 2014. La nouvelle génération de joueurs que nous avons est un très bon signe. Mais le problème c'est que les gens veulent des résultats immédiats.
Le football nécessite une action à long terme. Avec l'équipe actuelle, nous pouvons faire de bonnes choses. Depuis le match contre la Pologne, cela se voit. Maintenant, il faut travailler ».