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L’enfant seul

Par Borokoff

A propos de Miel de Semih Kaplanoglu 4 out of 5 stars

L’enfant seul

Dans un village turc, dans la région de l’Anatolie, Yusuf, un enfant de 6 ans, vit avec son père et sa mère dans une maison proche de la forêt. Mais le père de Yusuf, qui était parti poser  des ruches dans des arbres, ne revient plus…

Miel est le troisième volet de la Trilogie de Yusuf, après Yumurta (2007) et Milk (2008). Ce dernier est sorti  le même jour que Milk. Mais difficile de comparer Miel et Milk tant les deux films sont différents.

Yusuf est le personnage principal et récurrent de la trilogie de Semih Kaplanoglu. Dans Milk, c’est un jeune homme en passe de devenir un adulte. Dans Miel, il est encore un enfant introverti et si peu bavard que sa mère s’inquiète qu’il n’ait pas un problème dans son développement (« Il faut qu’il aille voir l’Imam »).  D’autant qu’il n’arrive pas à lire tout haut.

De quoi parle-t-on dans Miel ? De la disparition d’un être cher, de la religion, musulmane en l’occurrence, et qui constitue le socle des croyances dans la famille de Yussuf. Du moins un facteur « déterminant  dans les décisions que prennent (ses)personnages concernant leur devenir. » comme le précise son réalisateur.

La relation père-fils est traitée en profondeur dans Miel, comme la proximité que Yussuf ressent vis-à-vis de la forêt et de  la nature en général  (scène de fin notamment). Le film a en réalité été tourné aux alentours de Camlihemsin, un petit village non loin de la Mer Noire, au Nord-Est de la Turquie.

Et ce que raconte Miel, à travers la figure du père de Yussuf, artisan qui vit du miel qu’il récolte à la cime des arbres où il a posé ses ruches, c’est la vie de tout un monde agricole (le centre de l’Anatolie est connu pour ses cultures de vignes, d’oliviers, de figues et ses terres fertiles en général) voué à disparaitre. Comme s’il appartenait déjà au passé.

Un milieu rural dont les traditions (la mère de Yusuf travaille aux champs) sont mis à mal par la prolifération des nouvelles mines et des centrales électriques. En Anatolie, les ressources en eau disparaissent au profit des centrales électriques, symbolisant bien la difficulté voire  l’impossibilité pour certains Turcs de concilier tradition et modernité, alors même que cette région regroupe des Roums (Grecs d’Anatolie), des Juifs et des Musulmans depuis plus de 30 ans.

Tout cela, Kaplanoglu l’explique dans des interviews. Mais dans Miel, c’est avec poésie qu’il décrit la relation que Youssuf entretient avec la nature et les animaux. Tout en attention, en longs plans fixes, la caméra s’attarde sur les attitudes de Yusuf (Bora Altas, très bien dirigé) en classe, tantôt rêveur, tantôt extrêmement concentré. Mais toujours à hauteur de l’enfant. Le silence de Yusuf, dont on sent la douleur muette, en dit plus long qu’aucun discours sur le manque irremplaçable du père… Quant à la scène de fête champêtre dans les montagnes turques, par son contraste entre l’inquiétude de la mère de Yusuf et la vie et les couleurs des danses turques, elle vaut à elle seule le déplacement.

www.youtube.com/watch?v=sS92agPXoJk


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