Comme l’espace illimité est le substrat du (vaste) espace enclot dans une forêt et (des petits espaces délimités par chacun des) arbres, ou encore de l’espace reflété dans un bassin et dans l’eau, de même il y a une Conscience illimitée, substrat des composés et des trois états de veille, rêve et sommeil sans rêve.
Vedântasâra 49.
Quand le pot est brisé, l’espace intérieur se fond en l’espace infini, indifférencié.L’entendement apaisé, limpide, il ne m’apparaît plus de différences.
Il n’y a pas de pot et pas d’espace confiné dans le pot. Il n’y a ni âme ni corps. Comprend le Brahman absolu, libre du sujet-objet.
Lorsque tout ceci est erroné, quand le corps et autres objets sont pareils à l’espace, alors tu comprends le Brahman. Il n’y a plus pour toi de séries sujet-objet .
Le soi naturel lui-même m’apparaît indifférencié du (soi) suprême : semblable au ciel et un, comment y aurait-il un méditant et un méditable ?
Je ne vois ni magie ni ombre ni leur absence. Tout cela est cette réalité une, limpide et semblable au ciel.
Je n’ai ni maître ni instruction, ni qualification ni activité : vois que je suis naturellement limpide, incorporel, semblable au ciel.
Il n’est pas besoin de connaissance, de raisonnement, de circonstances favorables, des instructions d’un maître ou d’union contemplative : je suis par nature Conscience, principe pareil à l’espace, naturel et immuable.
Esprit, mon ami, pourquoi tant de discours ? Mon ami, tout n’est que conjecture. Je t’ai dite l’essence de toutes choses : toi-même est le principe pareil à l’espace.
Où que meure le yogi, quel que soit son état, là il se dissout, comme l’espace d’une jarre dans le ciel.
Ce qui a été déclaré pareil à l’espace n’est autre que cette Conscience pareille à l’espace, parfaite, complète et omnisciente.
Elle pénètre complètement l’espace mais rien ne la pénètre. Elle se tient à l’extérieur et à l’intérieur, indivise et ininterrompue.
Je suis dépourvu de cause et toujours présent. Je suis sans opacité ni transparence et toujours présent. Je suis sans lumière ni ténèbres, je suis toujours présent. Je suis le nectar de la connaissance, la saveur égale (en toutes choses contraires), semblable au ciel.
L’absolu n’est pas libre par libération des liens. L’absolu n’est pas libre par purification de ce qui est (déjà) pur. L’absolu n’est pas libre par union ou séparation. En vérité, je suis libéré, pareil à l’espace.
Avadhûta Gîtâ .
Si le Soi n’est pas organiquement lié au corps mais seulement surimposé à lui, on est fondé à le considérer comme réellement absent de ce corps, lequel, de son côté sera comme « privé de soi ». L’on retombe ainsi dans la position nihiliste !
-Non, car le Soi, semblable en cela à l’espace cosmique, n’est pas organiquement lié à quoi que ce soit. Mais le corps est, de ce fait, aussi peu « privé de soi » que les objets deviennent inétendus à cause de leur absence de relation réelle avec l’espace. On ne retombe donc en aucune manière dans le nihilisme (I, 2, 58).
Comment donc est-il possible de surimposer le corps à un Soi inaccessible à la perception et aux autres (moyens de connaissance) ? Et comment s’opérera la surimposition inverse ?
- Il n’y a aucune difficulté à cela car les Soi nous est bien connu de par sa nature propre. Par ailleurs, il n’existe aucune règle prescrivant que la surimposition peut s’exercer seulement sur quelque chose d’accidentellement présent et non sur quelque chose de constamment présent. Ne projetons-nous pas sans cesse les aspects de « voûte » et d’«azuré » sur le pur espace cosmique ?(I, 2, 61)
Je suis toujours simple Conscience non duelle, omniprésente comme l’espace omniprésent (kham sarvagatam), antérieur à la naissance des quatre éléments (IX, 3).
Le même en tous les êtres et indépendant, je suis omniprésent (sarvagatam) comme l’espace (kham), impérissable, bienfaisant, homogène (nirantaram), sans parties et sans actions, je n’ai par conséquent aucun résultat à obtenir par tes efforts (Ô mon esprit !) (VIII, 3).
Upadesha Sahasrî II, 11, 3.
Râma : Comment l’univers peut-il se résoudre en la simple Conscience et comment celle-ci peut-elle produire celui-là ?
Vâsishta : En vérité, seul l’espace de la Conscience - qui seul perdure quand a lieu la dissolution du cosmos - existe même maintenant, parfaitement vide de tout objet. Les concepts et notions mis en lumière par la Conscience en elle-même apparaissent sous la forme de cette création, à cause du mouvement des souffles au sein de cette Conscience, de même que les rêves qui surgissent au sein du sommeil. Autrement, il est absolument impossible pour une apparence d’apparaître hors de l’espace de la Conscience.
L’univers entier, toutes ces montagnes, le firmament, les âmes et les quatre éléments, tous ne sont que Conscience. Avant cette apparente création, quand seule la Conscience était, où étaient toutes ces apparences ? Espace, espace ultime, espace de Brahman, création, Conscience – tous ces termes sont synonymes. De même que la dualité (d’un sujet et d’un objet séparés et autonomes) expérimentée dans un rêve est illusoire, la dualité implicite dans la (notion de) création est-elle aussi illusoire. De même que les choses semblent exister et fonctionner au sein de la Conscience au moment du rêve, de même les chosessemblent exister à l’extérieur de la Conscience durant la veille. Aucun de ces deux états ne se produit en réalité. De même que seule la Conscience est la réalité (permanente) du rêve, de même la Conscience seule est la réalité de l’état de veille. C’est elle « Dieu », la vérité ultime, c’est elle que tu es, que je suis et qui est tout.
Râma : Comment tout cela a-t-il prit place dans la limpidité de la Conscience infinie ? Comment est-il possible que l’esprit, ce mélange d’être et de non-être, apparaisse en elle ?
Vâsishta : Râma, l’espace est triple : espace infini de la Conscience indivise (cit), espace fini de la conscience individualisée (citta) et espace sensible. L’espace infini de la Conscience indivise est en tout, au-dedans comme au dehors, en tant que simple témoin des apparences. L’espace de l’âme crée les divisions temporelles, englobe tous les êtres de sa créativité. L’espace sensible est le lieu où existent les quatre éléments. Ces deux derniers ne sont pas indépendants du premier, l’espace infini de la Conscience. En vérité, ils n’existent pas, cette tripartition n’ayant d’autre raison d’être que de suggérer la réalité à qui ne l’a pas comprise. Ce qui est compris alors, c’est précisément que seul existe l’espace de la Conscience.
Râma, quand cette Conscience semble penser « je suis doué de pensée » ou « je suis ce corps (perçu) », cela est l’âme. C’est à partirde cette notion erronée que tout le reste est forgé par l’imagination.
L’espace de la Conscience est Shiva Bhairava. Inséparable de lui est l’énergie de vibration, toute spirituelle. Parce que l’espace est leur forme véritable, elle et Shiva ont un corps bleu. De même que l’on prend conscience du mouvement de notre corps dans l’espace par le contact avec l’air, de même on prend conscience de l’énergie de la Conscience par le mouvement de cette énergie dans l’espace de la Conscience. Mais l’espace demeure immobile. L’espace de la Conscience est le « Je ». Il est identique au monde et à toi. Sans l’espace de la Conscience, le corps n’est qu’un cadavre.
Yoga Vâsishta Râmâyana
Un miroir reflète en lui l’espace et des images. Comment peuvent-ils être contenu dans le miroir ?
-Les objets demeurent dans l’espace (ils ne sont pas « dans » le miroir). Les objets et l’espace sont tous deux reflétés dans lemiroir. La disposition des objets reflétés dans le miroir correspond à celle des objets dans l’espace. (Mais) le miroir n’ayant que deux dimensions, comment l’espace et les objetspeuvent-ils exister en lui ?
Comment la métaphore de « l’espace dans les pots (flottants dans un bassin) » illustre t-elle ceci ?
-Il n’a pas de reflet dans l’espace confiné dans le pot. Le reflet n’apparaît que sur la surface d’eau enclose par le pot. Dans ces différents pots, l’espace est reflété également dans l’eau de chacun des pots et dans l’eau du bassin. De même l’univers se reflète en chaque individu.
L’ouverture des pots doit pouvoir dépasser la surface de l’eau du bassin.
-Certes. Si ils étaient immergés comment les distinguerait-on ?
Comment les reflets apparaissent en eux ?
-L’espace seul ne peut refléter. Seul l’espace de la surface del’eau peut le faire. (Par exemple) le verre ne peut refléter des objets ; seule une plaque de verre teinté peut refléter. De même la simple Conscience ne contient pas d’objet ni ne les reflète. C’est seulement adjointe à l’esprit qu’elle reflète le monde. Ni dans le samâdhi ni dans le sommeil sans rêve le monde ne subsiste. Il ne peut y avoir de faux-semblant en pleine lumière ni dans l’obscurité totale. C’est seulement dans une demi obscurité que l’on peut prendre une corde pour un serpent. De même la pure Conscience n’est que lumière ; elle est pure connaissance. L’esprit surgissant en elle s’imagine à tort que les objets sont indépendants.
Donc l’esprit est le miroir.
-Esprit, esprit… qu’est-ce-que l’esprit ? C’est un mélange de Conscience (percevante) et de pensées (perçues). Par conséquent il est tout cela : le miroir, la lumière, l’obscurité et les reflets.
Mais je ne le vois pas…
-L’espace de la Conscience n’est que connaissance (: n’est jamais objet connu). Il est la source de l’esprit (: l’objet connu). A l’instant précis où il surgit, l’esprit n’est que lumière ; ensuite seulement la pensée « je suis cela » s’élève ; une telle représentation constitue l’âme et le monde. La première lumière est simple esprit, l’espace de l’esprit ou « Seigneur ». Il se manifeste en tant qu’objets. Parce qu’il contient tous ces objets en lui-même on le nomme « espace de l’esprit ». Pourquoi « espace » ? Comme l’espace contient les objets il contient les pensées, on l’appelle donc l’espace de l’esprit. En outre, de même que l’espace sensible englobe tous les objets sensibles, il est lui-même un contenu de l’espace de l’esprit, de même que celui-ci est contenu dans l’espace de la Conscience. L’espace ultime est donc la Conscience. Celle-ci ne contient rien. (Elle ne devient jamais elle-même objet de la connaissance d’un autre,)elle est toujours simple connaissance.
Pourquoi parler d’espace ? L’espace n’est pas conscient
-« Espace » n’indique pas seulement l’espace sensible inconscient mais aussi la pure connaissance. La connaissance n’est point uniquement connaissance des objets : cela est la connaissance relative. La simple connaissance est absolue, une, lumière transcendante !
Eh bien, devrait-on la visualiser durant notre méditation ?
-Pourquoi visualiser ? Nous pouvons penser à un autre seulement si nous sommes indépendant de lui, alors que nous ne pouvons être indépendamment de cette connaissance. Bien plutôt, elle seule est ! Comment peut-on l’imaginer être telle ou telle ?
Comment devons nous procéder ?
-Simplement délaisser ce qui est autre que soi ( :ce qui est connu).
Soit. Mais par la suite, j’oublie tout cela.
-Ton oubli implique la connaissance, parce que tu est conscient de cet oubli. Autrement, comment pourrais-tu le mentionner ? Par conséquent l’oubli n’est lui aussi que l’espace de la Conscience.
Pourquoi alors cela ne m’est-il pas clair ?
-La Conscience est pure et simple connaissance. L’esprit en procède. L’esprit est constitué de pensées. L’obscurité ou l’ignorance s’interposant, la simple connaissance apparaît autre que ce qu’elle est réellement. C’est elle qui est alors perçue en tant que « moi », « monde », remplis d’attachement et de haine. C’est pourquoi on dit qu’ils voilent la réalité.
Talks With Ramana Maharishi.
Objection (bouddhiste):
Qu’importe le soleil ou la pluie à l’espace : ils agissent seulement sur la peau. Si le soi est comme la peau, il est non éternel ; s’il est comme l’espace, il est comme non existant.
Et à l’apparition d’une pensée chez l’homme si (le soi) est modifié, il n’est pas éternel. S’il n’est pas modifié, on ne peut dire qu’il est le connaisseur.
Réponse :
Lorsqu’une fumée monte/s’élève dans l’espace, le fend-elle ou non ? Si elle ne le fend/repousse pas, la fumée est stationnaire. Si elle le fend, quelle sorte de fissure est-ce ?
De même que dans l’espace pur un cercle de nuages après s’être formé se dissipe tout à coups, de même ici dans le soi, tout cet univers.
De même qu’à la production, au maintien et à la destruction d’un pot, l’espace ne subit pas de production, maintien ni destruction, de même le je non plus dans le cas d’une pensée.
Naishkarmyasiddhi, II, 60,61,68,79.