Pitch : Angie se fait virer d'une agence de recrutement pour mauvaise conduite en public. Elle fait alors équipe avec sa colocataire, Rose, pour ouvrir une agence dans leur cuisine et aussi dans l'arrière-cour d'un bar miteux. Avec tous ces immigrants en quête de travail, les opportunités sont considérables, particulièrement pour deux jeunes femmes en phase avec leur temps.
Notre avis : Maître du réalisme social, habile défenseur des opprimés, Ken Loach s’attarde ici avec maestria sur les conditions de vie (professionnelles) des immigrés qui constituent une main d’œuvre peu qualifiée... Contrairement à ce que le pitch pourrait éventuellement faire croire, le film est loin d’être ennuyeux. Il se termine même un peu trop vite et un peu trop brutalement à notre goût.Dès les premières secondes, on plonge dans les réalités les plus cyniques du monde du travail. Ce sera en fait le but principal du film, atteint avec brio : peindre certaines injustices du monde profesionnel avec une justesse certaine.
Primé pour son scénario à Venise, It’s A Free World raconte un engrenage infernal qui oblige peu à peu une femme à exploiter la misère des autres pour sortir de la sienne. Que ce soit pour le réalisme de cet engrenage, pour la façon de nous le montrer (par accumulation, en crescendo très bien mené) ou pour l’acuité des questions sociales très actuelles que ce scénario soulève, cette récompense a été plutôt méritée.
La fin du film, qui "boucle la boucle", si elle est trop abrupte, a tout de même une grande qualité. Car en montrant une femme poussée à la fois par son instinct de survie mais aussi par sa volonté de réussir pour échapper à son destin, le film explique, en (dé)montant par l’exemple, comment la fatalité peut s’abattre sur certaines personnes, voire certaines classes. Car évidemment l’engagement politique de Ken Loach se cache dans tous ses films, y compris celui-ci. Mais il est ici peut-être arrivé à une version très aboutie (la plus aboutie ?) de cet engagement.
L’une de autres principales forces du film réside aussi dans le choix de Kierston Wareing pour jouer le rôle principal d’Angie. Cette jolie blonde volontaire a beau s’enfoncer dans le vice, elle est humaine, parfois pétrie des meilleurs intentions, parfois des pires. Elle devient attachante. On s'y reconnaît. Le spectateur finit presque par la trouver sympathique. C’est dans cette ambiguïté, voulue et défendue par le réalisateur, que le film est extrêmement habile : il évite ainsi l’écueil d’un manichéisme qui aurait été aussi irréel que malvenu.
Pourquoi y aller ?
Pour la force du scénario, pour l'actrice principale, qui est juste parfaite dans son rôle, et pour la pertinence des réponses qu'apporte le film à des questions très actuelles
Ce qui peut freiner ?
Le sujet et le style de Ken Loach, car il faut être un minimum sensible au sort des classes opprimées pour apprécier ce film.