Une voûte en niche creuse et une trompe saillante au-delà d'un mur plan pour une statue de Vierge à l'enfant, quai de la Ligne à Avignon (84).

La ville d'Avignon recèle, nous l'avons déjà signalé dans un précédent article, de nombreuses niches abritant des statues de la Vierge, niches qui se présentent quelquefois comme de discrets « chefs-d'œuvre » de stéréotomie. Quoi de plus normal au demeurant dans une ville qui abritait encore au début du XIXe siècle deux sièges de Compagnons tailleurs de pierre, un de Passants (que Laurent Bastard et moi avons longuement étudié dans Travail et Honneur), l'autre d'Étrangers dont nous ne savons hélas presque rien.

Voici l'une de ces statues de la Vierge qui se trouve sur les bords du Rhône, sur le Quai de la Ligne, au pied du grand escalier du rocher des Doms, menant au jardin jouxtant la cathédrale.

© Photographie Jean-Michel Mathonière, D.R.

A cet emplacement, l'enfant Jésus regarde comme en direction de la chapelle Saint-Bénézet, sur le pont d'Avignon, chapelle au demeurant soutenue par deux magnifiques trompes (voir l'article qui leur est consacré). La statue est logée dans une niche voûtée « en niche creuse » — dont les voussoirs forment comme une auréole rayonnante — dont la base est agrandie par une avancée soutenue par une trompe « saillante au-delà d'un mur plan ». Il s'agit là de deux figures stéréotomiques très classiques, mais dont le côté presque banal (il en est d'autres parmi les niches avignonnaises, j'y reviendrai au fil de mes promenades et de vos envois) ne doit cependant pas faire oublier qu'il s'agit là de réalisations très soignées, tant en matière d'épure que d'exécution, telles que les affectionnaient particulièrement les Compagnons tailleurs de pierre.

On peut trouver l'épure de la trompe saillante au-delà d'un mur plan dans de nombreux traités de stéréotomie, tel le Traité élémentaire de coupe de pierres de Simonin qui est l'un des plus communs au début du XIXe siècle, période dont date semble-t-il cette réalisation.

© Cliché Jean-Michel Mathonière

L'épure de la niche se trouve elle-aussi dans de nombreux traités. Nous reproduirons plutôt ici celle qu'en donne le Compagnon Passant tailleur de pierre Jean-Jacques Laurès, dit La Tranquillité de Caux, telle qu'elle figure dans ses archives. Elle rachète ici une ½ tour ronde concave et une ½ tour ronde convexe ; la vue frontale reste néanmoins identique.

© Cliché Jean-Michel Mathonière, D.R.

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)