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Un journal des journaux

Publié le 02 juin 2008 par Menear
La lecture de Désordre, un journal (Publie.net) de Philippe De Jonckheere me rappelle aux journaux. J'ai toujours aimé lire des journaux. Des journaux d'écrivain mais pas que. Je piquerais volontiers n'importe quel carnet privé solidement emmuré dans un placard sous clé. Je piraterais volontiers des fichiers intimes que l'on protège via mot de passe. De gens connus ou anonymes je m'en fous. Simplement : la trace écrite (fixée) d'une existence à un moment donné. Un document. Pour entrer dans la tête ou, si ce n'est pas possible, dans les mots de leurs auteurs. Pour explorer les vies, les souvenirs des autres. Pour explorer les autres.
Les miens, également, de journaux, me sont utiles sans être précieux. Une masse d'informations importante que je stocke, que j'archive, si d'aventure j'en ai l'envie ou le temps. Le blog est pratique pour ça. Je reviens sur les mois passés relativement fréquemment. Pour me relire, pour me retrouver. Pour ça, le module de Pagination manque sensiblement ; j'aimerais pouvoir remonter le blog à la verticale comme on le ferait d'archives entassées. Pour cet ajout pour moi indispensable, j'attends que la version 2 de Dotclear sorte définitivement.
Je me retrouve à nouveau entre les murs de ma salle 202 pour y écrire quelques broutilles. J'y mange, j'y lis le journal de Philippe De Jonckheere en mangeant. J'en profite pour expérimenter la lecture écran qui passe à merveille avec mon petit Eeepc. Le grand bureau de prof est vide devant moi. Vide sauf : un lacet noir enroulé et un Petit Larousse Illustré de 1999 rafistolé au gros scotch. Derrière, contre le dossier de ma chaise plastique, le tableau blanc encore brillant des inscriptions de l'heure d'avant. J'arrive facilement à déchiffrer les lettres et les phrases. Il suffit de se décaler un petit peu, de suivre l'inclination de la lumière, de jouer avec les reflets.

There will be lots of forests
There won't be any more forest
There will be more and more wars
There will be lots of wars


Dehors il pleut par intermittence, j'aperçois quelques arbres, ceux du parc voisin probablement. J'ai ouvert la fenêtre – une heure de collégiens enfermés ça pue – et j'entends des bribes de conversations et des bouts de cris qu'ils poussent dans la cour juste en bas.

Quelque part je suis content que le quotidien le plus banal de ma vie actuelle puisse permettre l'écriture de ces quelques lignes. Mine de rien, cela me change de ces jours où le blog s'enterre avec moi dans les dilemmes de « Coup de tête », où mes 17h34 s'engluent devant l'écran (peu importe sa nature). Pas qu'il se passe réellement quelque chose par ici mais ça contribue au moins à donner l'impression que ça puisse être le cas.


Ce matin juste avant de partir, deux types sont venus « prendre des mesures »

l'expression prendre des mesures, ça me rappelle ces épisodes


je dis épisodes parce que j'ai toujours plus vu les adaptations de bande-dessinée que je n'en ai lu les albums


de Lucky Luke où, avant un duel dans la rue poussiéreuse d'un village du far west, le croque-mort (qui se baladait avec un vautour je crois) venait, justement, prendre les mesures des duellistes pour pouvoir ensuite concevoir le cercueil. Je vois ces deux types comme des croque-morts de notre vie de 2007-2008. Ils prennent les mesures, ils s'apprêtent à briser ce dans quoi nous avons vécu. Tant mieux, je me dis. J'aime autant me débarrasser définitivement des choses quand je n'en ai plus l'usage. Si je le pouvais, je brûlerais tout ce qui ne sert plus chaque année, dans un beau feu de joie


en vue de la réfection de notre appart pour l'année prochaine. Les deux types se pointent au moment où je m'apprêtais à m'en aller, ce qui fait que j'ai laissé deux étrangers chez moi pour je sais pas combien de temps, sensation toujours agréable. La réfection de l'appart on n'en profitera pas puisqu'on s'en va dans quelques semaines. La réfection de l'appart est en fait destinée à rendre notre chez nous habitable pour le futur principal du collège des Poulets. Qu'il ne soit pas habitable cette année ne posait par ailleurs aucun problème, cela va de soit.
J'en reviens à mes histoires de journaux. Quelque part je pense que l'expérience blog est en train de traîner. La suite tarde à venir et je sais pourquoi : cela demande beaucoup de travail, beaucoup d'effort. Je parle probablement chinois pour ceux qui ne savent pas que je prépare une suite à Omega-Blue. C'est dit. Mais l'expérimentation internet a un coût, cela s'appelle le temps. Ce nouveau projet tarde donc à se concrétiser. Cela fait pourtant plus d'un an que je l'ai mis sur les rails. Délicat.
J'en reviens à mes histoires de journaux. Mon quotidien ne se prête en général pas à ce genre de déballage biographique. D'ailleurs les déballages biographiques, je ne les apprécie réellement que lorsque les autres sont concernés. Moi, je passe entre les gouttes. Je ne me livre pas. Ou si peu. Je me répète. C'est aussi ça le but de la manœuvre avec ce projet-mystère. Me permettre d'aller un peu plus loin. Creuser plus et plus fort. Fragmenter plus. Brouiller les pistes. Verrouiller. Marcher au bord. La structure est en place, par ailleurs. Ne reste plus qu'à l'articuler, désormais.
Dehors il ne pleut plus, les arbres ne soufflent pas. Les cloisons tremblent par moment : on doit claquer des portes, on doit écraser des crânes contre les murs. Le même brouhaha difforme continue de se diffuser continuellement. Parfois, un connard ou un putain décolle plus haut que le reste.

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