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I'm not there

Publié le 29 décembre 2007 par Menear
Voilà un film qu'il fallait absolument que je vois, sans trop savoir pourquoi d'ailleurs parce que : aucune critique de lue jusque-là et à peine une couverture de je ne sais quel magazine cinéma aperçue, avec Cate Blanchett en couverture et le concept vaguement entendu comme ça, à la radio : une biopic sur Bob Dylan avec six acteurs différents pour l'interpréter. Résultat quasi instantané : faut-absolument-que-j'aille-le-voir-ce-truc.
I'm not there

Et donc je suis allé le voir ce truc. Premières impressions éclaires et quasi instantanées : bien fait, par un heureux hasard, d'avoir lu la biographie de François Bon il y a quelques mois, parce que le film de Todd Haynes n'est une biopic ordinaire, voire même pas une biopic du tout : un film pour initié, voilà ce que c'est, où l'on n'explique pas, on montre, on suggère, on hallucine, point barre. Alors quand on associe ce parti pris avec les quelques modifications d'identités des personnages (peu de vrais noms utilisés, on retrouve surtout des personnages fictifs, parfois un peu dur à identifier quand on ne maîtrise pas bien l'époque), on se retrouve avec un film parfois difficile à suivre.
Mais passé ces incongruités premières, I'm not there, c'est du tout bon. Six personnages différents, six facettes de la personnalité ou de la carrière de Bob Dylan (dont le nom n'est par ailleurs jamais prononcé), qui se succèdent ou s'entrecroisent voire se complètent. Ces fictions, recoupant des périodes incontournables comme le Dylan protestataires ou le Dylan en pleine transition électrique et des facettes moins évidentes (le Dylan rimbaldien, par exemple) trouvent leur place naturellement dans un film au montage énergique et incisif (surtout au début) et dont le rythme est peut-être son principal atout (exception faite pour la fin, peut-être).
I'm not there

Autre atout fort : le casting. Excellent, diversifié et cohérent, qui rassemble pourtant, pour le même « rôle », Christian Bale, Richard Gere et surtout Cate Blanchett, sidérante en Dylan star androgyne huée et épuisée par les tournées successives. Sans conteste le personnage clé du film, qui s'illustre également dans la scène phare : cette mise en image psychédélique et géniale de Ballad of a thin man (cf. la radio), version live revisitée par Cate Blanchett pour le coup. On y explore l'imaginaire dylanien brutalement, aux frontières du clip et de la rêverie. Impressionant.
I'm not there

Côté face, on peut regretter que deux fictions restent quand même moins percutantes que les autres : la partie « familiale » de la vie de Dylan , malgré une Charlotte Gainsbourg exemplaire, comme toujours, se révèle un peu anecdotique et surtout la partie « Billy the Kid », incompréhensible pour le non-initié que je suis, partie avec Richard Gere en vedette qui correspond également aux zones de longueurs que l'on peut déceler dans le film.
Toujours au niveau des bémols, et toujours pour un non-initié d'ailleurs, la difficulté parfois de s'y retrouver dans la fictionalisation des personnalités, disons, parallèles. Exemple : le nom de Joan Baez n'étant pas mentionné, on le travestit en nom fictif. En revanche, d'autres personnalités comme Allen Ginsberg, par exemple, gardent leur nom. Mystère.
I'm not there

I'm not there, c'est donc un très bon film (et dont le titre, « Je ne suis pas là », affirme d'entrée le parti pris osé du réalisateur : produire un film sur Dylan sans Dylan, l'évoquer sans le montrer, le réécrire sans le dire), certainement l'un des tous meilleurs vus cette année me concernant, mais tellement facile d'y passer à côté qu'il peut sans doute facilement décevoir. On sent que Todd Haynes, également réalisateur de Velvet Goldmine il y a quelques années (film qui reprenait la même recette, appliquée à la période glam des années 70), a gagné en maturité, parvenant à construire une (série de) fiction(s) de qualité, par rapport à un Velvet Goldime gentil et finalement très caricatural. Reste ce problème d'accessibilité qui devrait (a du) barrer l'accès du film au grand public, très certainement : être obligé de se farcir une biographie avant de se déplacer en salle pour comprendre un minimum d'éléments et de sous-entendu, il est clair que ce n'est pas idéal. La réussite intrinsèque du film passait peut-être par ce sacrifice là...

En bonus : ces deux vidéo avec un trailer (pour une fois) plutôt bien fichu et un extrait amusant (bien que non sous-titré) d'une rencontre Dylan/Ginsberg décalée. Et puis aussi : qu'en pense le biographe ? Le billet de François Bon en réaction au film.
[Article également disponible sur Culturopoing]

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