Le problème, c'est qu'on s'est tellement préparé à passer une bonne soirée, un bon spectacle, que lorsque le type en question se met à parler, avec ses mots à lui et ses gestes à lui et ses explications à lui, pendant un quart d'heure, on se dit qu'on s'est trompé, qu'on s'est préparé à passer une bonne soirée mais qu'on ne s'est pas préparé à en passer une mauvaise. Zut. Mauvaise pioche.
Le marionnettiste pendant près d'un quart d'heure explique à l'avance la genèse de son projet, la conception de son « spectacle vieux de dix ans », la signification de tous les signes et symboles qui s'y déroulent, quelques références politiques orientées également, quelques pensées personnelles sur le bien de la planète... Beaucoup d'autres trucs de ce genre encore. Du coup, au terme de son petit speech, on se rend vite compte que le spectacle dont la durée, vingt minutes, est indiquée au programme, va durer aussi longtemps que le discours du bonhomme. C'est exactement ce qui se produit.
Comme le spectacle est mauvais, je me retrouve un peu déconcerté. Je me rabats sur ces choses simples qui d'ordinaire satisfont ma curiosité sur le moment : le mouvement des marionnettes, fluides, saccadées, humaines, bestiales, la coordination des mouvements du marionnettiste avec ses créatures, l'alternance des figures et des types de personnage. Le spectacle qui m'intéresse le plus à moi, ce sont les mimiques du marionnettiste, mimant toujours la démarche et l'allure de ses compagnons sculptés par ses propres soins. L'image en elle-même est intéressante, saisissante, indépendamment du fait que ce « spectacle vieux de dix ans » semble avoir été improvisé dix minutes plus tôt.
Lorsqu'à la fin, le marionnettiste utilise une marionnette à main aux excentricités capillaires amusantes, l'homme dans la marionnette récite un discours convenu sur la planète avec sa voix d'homme normal de tous les jours alors que n'importe quel enfant vous dirait (moi le premier) qu'une marionnette aussi bizarre ne parle pas comme ça... Quelle déception.