Saga Saw.
Tentative de synthèse.
Voilà, la semaine consacrée à ce pan de l'Histoire du cinéma d'horreur est à présent terminée. L'occasion de tirer des conclusions et de réfléchir de manière plus générale au phénomène Saw
Les films:
Saw
Saw II
Saw III
Saw IV
Saw V
Saw VI
Saw 3D: Chapitre Final
I- Bilan du phénomène.
Même si on déteste cette saga pour ce qu'elle est et ce qu'elle représente, on ne peut nier son importance et son influence sur le cinéma gore des années 2000. Établissons donc un petit bilan. Tout d'abord, les chiffres sont assez significatifs. Le premier film aurait pu être un direct to dvd. Avec un budget ridicule de 1 200 000$, personne ne s'attendait à la déferlante qui va suivre. Le film rapporte 103 096 345$ (55 millions environ sur le seul sol américain). Un record! Il n'est pas difficile de comprendre pourquoi les suites ont fusé, d'autant que le succès ne s'est jamais démenti jusqu'à ce sixième opus: Saw II: 4 000 000 $ pour 147 739 965 $, Saw III: 10 000 000 $ pour 164 874 275 $, Saw IV: 10 000 000 $ pour 139 352 633 $, Saw V: 10 800 000 $ pour 113 857 533 $, Saw VI: 11 000 000 $ pour 64 344 699 $ (aie) et le petit dernier ne démarre pas trop mal: 17 000 000 $ pour 24 200 000 $ en un week-end. Si on voit bien que film après film les recettes diminuent, le filon reste plus que profitable. Le bilan du sixième opus, sans être négatif, chute fortement, certainement à cause de la piètre qualité du cinquième film, de la lassitude et de la concurrence d'une autre débilité vaine: Paranormal Activity. L'ajout de la 3D au septième fil est certainement pour beaucoup dans le regain d’intérêt. En gros, pour 50 millions de budget, la saga a récolté 730 millions de dollars. Une vraie poule aux œufs d'or! Pas étonnant que LionsGate et Twisted Pictures ai fait cracher jusqu'à l'usure cette pauvre bête...
Pourquoi un tel succès est la question première qui vient à l'esprit. Je pense que les raisons sont multiples. Il faut évidemment signaler que la qualité ne rentre pas en ligne de compte (au grand dam de certains et à juste titre). Je pense que la série est née au moment le plus opportun. Les sagas d'horreur des années 80, tellement vieillissantes qu'elles n'effrayaient plus personnes, en étaient arrivés aux remakes et autres cross-over bidons pour continuer à rassembler. En parallèle, les histoires de fantômes n'effrayaient plus grand monde. En 2000, on veut du gore qui tâche, on veut tout voir et avec le plus d'effets possibles. Plus de place pour tous ces films fauchés fabriqués avec deux bouts de ficelles, si subjectifs soient ils... Les temps changent. Pourtant, le premier Saw peut rentrer dans cette catégorie. Mais le potentiel est là et cela, les producteurs l'ont bien compris. Tant est si bien que l'explosion de gore apparaît dès le second opus (et perd au passage la subtilité qui faisait la qualité du produit initial). On entre dans l'ère du torture porn. Choquer, en mettant en scène des sévices sadiques sans scénario pour enrober le tout. Cette saga cristallise à elle seule cette évolution du cinéma horrifique. Une autre raison évidente au succès de la franchise, c'est la censure. Cette dernière s'est toujours montrée sévère (à raison souvent) avec Saw. Le problème? Les interdictions (moins de 18ans tout de même pour le troisième opus) excitent les adolescents. La censure a donc fini par faire de la publicité aux films: aura sulfureuse, mise en lumière...
II- La violence au cinéma.
Éternel débat. Les adultes ont toujours reproché au cinéma (et aux jeux-vidéos) la violence qu'il met en scène, responsable de tous les maux qui touchent les adolescents, en oubliant qu'eux aussi dans leur jeunesse regardaient Jason et Mike Myers étriper des jeunes délurées dévêtues. Si nous ne nous attarderons pas plus sur ce débat stérile, il est important de noter que la saga Saw arrive comme un cheveu sur la soupe. Il propose aux yeux d'adolescents déchainés les pires sévices en repoussant les limites de ce que l'on peut montrer au cinéma. Le tout sans aucune justification à la violence. Du pain béni pour les détracteurs du cinéma. S'il est évident que ces films ne doivent pas être mis entre n'importe quelles mains, et en cela c'est aux adultes de rester vigilants, il est peu probable qu'un cochon tueur apparaisse dans la réalité. A chacun de se forger son opinion.
III- Créativité et rentabilité: deux matrices opposées?
Un autre débat éternel. Peut on allier créativité et rentabilité? Si des exceptions existent (James Cameron en est l'exemple parfait je pense), il n'est pas aisé de se positionner dans ce débat. En général, lorsque la matrice d'une œuvre est la créativité, elle est très peu rentable (car ce n'est simplement pas son but premier). Ainsi, le cinéma indépendant ne rapporte pas beaucoup d'argent alors que c'est avec lui qu'on trouve le plus d'inventivité artistique. D'un autre côté, lorsque le but du film est de rapporter de l'argent, il doit se plier aux attentes du public bridant ainsi toute créativité (c'est encore plus vrai lorsque le film est une suite). On pourrait longuement s’interroger mais ce serait un peu vain. Je pense que le public obtient ce qu'il réclame...
Et Saw dans tout ça? Sa rentabilité fait évidemment fi de toute créativité qui s'amenuise d'épisodes en épisodes. Après tout, pourquoi innover, si, avec un risque minimum, c'est à dire répéter toujours le même schéma, on fait toujours autant d'argent? Il n'y a pas besoin... On en revient à ce que je disais, le public obtient ce qu'il demande. On peut toujours pester contre le fait que ce genre de film fonctionne alors que des vraies œuvres se vautrent (ce qui est triste je suis d'accord) mais c'est pourtant une vérité qu'il faut accepter.
Au final, cette saga, est un véritable phénomène, une machine à fric que l'on peut condamner mais il est évident qu'elle a marqué à jamais le film d'horreur. Si aujourd'hui, les faux documentaires semblent revenir à la mode (Cloverfield, Paranormal Activity...), tout est passager et il est certain que nous recroiserons le tueur au puzzle plus rapidement que nous le pensons.