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Lettre à mon ravisseur

Publié le 08 novembre 2010 par Clarabel

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Un thriller psychologique qu'on ne peut ni arrêter, ni oublier. Une petite phrase anecdotique, glissée en quatrième de couverture, à laquelle je ne prête plus attention depuis longtemps, et là, si j'avais su... l'aurais-je cru ? Car c'est la stricte vérité ! Ce roman envoûte, embobine, assomme, subjugue et assène une grosse claque. Ce roman est incroyable ! J'ai été incapable de fermer l'oeil de la nuit, incapable de reposer le livre avant de l'avoir fini, incapable de prendre du recul, incapable d'avoir le moindre discernement, la plus petite lucidité. J'étais dupée, complètement bluffée.
C'est l'histoire d'une jeune anglaise de 16 ans, Gemma, kidnappée à l'aéroport, pratiquement sous les yeux de ses parents, par Ty, un marginal qui vit dans le désert australien, où il va l'emmener, après l'avoir droguée et avoir masqué son identité, parce qu'il l'a choisie. Elle, et pas une autre. Objectivement, ce comportement criminel est condamnable, je ne reviens pas là-dessus, mais l'histoire démontre que le contraire est possible aussi, on peut aimer et détester la personne qui nous a fait du mal, on peut nouer une relation de confort et de sécurité avec son bourreau, c'est complètement dingue et c'est le pari réussi de l'auteur.
L'histoire est absolument inattendue, elle dépasse les considérations psychologiques visant le syndrome de Stockholm, même si elle ne les écarte pas non plus, et nous raconte plus simplement comment cela est possible. C'est à travers une lettre adressée à son agresseur que Gemma nous raconte ce qu'il s'est passé, ce qu'elle a vécu et éprouvé, sans tabou, puisqu'on parle aussi bien de colère, d'anéantissement, d'incrédulité, de dégoût et de fascination aussi. On plonge alors dans une ambiance hallucinante, à huis clos, dans la cabane au beau milieu de nulle part.
Et c'est avec la rage du désespoir que Gemma va chercher à s'enfuir, par tous les moyens. Cela lui sera d'autant plus douloureux de réaliser qu'elle est bloquée et dépendante de Ty, elle le déteste tellement, elle s'en veut aussi de le trouver beau et attirant et de penser à lui de cette façon. Mais ce n'est pas ce qu'il y a de plus étrange, car leur relation n'est jamais violente, au contraire. Ty va trouver des trésors de patience pour amadouer la jeune fille, pour partager son monde et ses mystères, pour espérer la séduire. Gemma sera sensible à ses efforts, appréciera ce qu'il aime (la nature, les étoiles), sera attendrie par son histoire d'enfance malheureuse, touchée par ses déclarations d'amour. C'est mal, se dit-on, il ne faut pas. Hélas, tout comme Gemma, on cesse de voir Ty comme un psychopathe, l'effroyable et inexplicable fascination glisse sur le lecteur. Au risque de nous faire oublier son crime, ou presque. C'est fou ce que ce livre inspire, en plus de l'angoisse, du stress et de l'envie de savoir comment tout cela va finir. C'est fort et bizarre. Limite malsain. Mais c'est un livre inscrit pour durer et hanter nos mémoires. 

« Et regardons les choses en face, tu m'as bien enlevée, mais tu m'as sauvé la vie aussi. Et entre les deux, tu m'as fait connaître un endroit différent et magnifique, que je ne pourrai jamais m'arracher de l'esprit. Pas plus que toi d'ailleurs, tu es inscrit en moi à jamais. »

Lettre à mon ravisseur - Lucy Christopher
Gallimard, coll. Scripto (2010) - 340 pages - 13€
traduit de l'anglais par Catherine Gibert

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