Le nouveau film de François Ozon a tout pour agacer : un casting de haute volée, une ambiance seventies très “COGIP” et surtout un marketing de masse avec des affiches placardées aux quatre coins de France. Et pourtant, Potiche est une comédie d’un rare raffinement.
Dès les premières minutes du film, le ton est donné : Catherine Deneuve fait son petit footing dans la forêt avant d’écrire une poésie niaise sur les animaux qui l’entourent. Deux secondes plus tard, elle arrive dans sa magnifique demeure, accompagnée par un claquement de cuivres rappelant les plus belles heures du soap opera américain, Dynastie et Dallas en tête.
Les références sont nombreuses, garnies, belles, drôles, touchantes ; mêmes les allusions non déguisées à Nicolas Sarkozy font mouche. Dans des décors splendides, évoquant autant Maggie qu’un Cukor, une galerie de personnages caricaturaux et splendides se disputent, s’engueulent, se tirent dans les pattes. Si Catherine Deneuve est étrangement aléatoire, versant parfois dans la comédie pure, parfois dans la parodie, Judith Godrèche (et sa coupe à la Farah Fawcett), Jérémie Rénier (impeccablement “camp”), Fabrice Luchini, Gérard Depardieu et Karin Viard (en roue libre, un bonheur) s’en donnent à cœur joie. On a presque envie de citer Alain Resnais tant François Ozon, à sa hauteur, maîtrise magnifiquement bien ses acteurs dans l’espace incontrôlable du boulevard.
Difficile de ne pas s’étendre sur la réussite graphique (lumière, cadrages, décors voire les affiches) et musicale du film. Philippe Rombi est divin - comme d’habitude - et la sélection de chansons, du groupe Il était une fois à Michèle Torr en passant par une reprise de Jean Ferrat, insuffle beaucoup de vie à l’ensemble. On savait François Ozon doué pour musicaliser ses films, mais il se surpasse ici.
Comme un métronome, François Ozon a toujours oscillé entre émotion sensible et parodie acidulée : Angel, Sitcom ou encore 8 Femmes. Le dosage de Potiche est fabuleux, touchant une minute, hilarant la suivante et-ce avec un rythme endiablé. La gestion des entrées et des sorties, héritées sans doute de la pièce originale, frôle presque le génie avec des scènes splendides ; une séquence en particulier permet à Depardieu de briller comme rarement, passant du rire aux larmes en un instant.
Au fond, le titre du film, le rôle et le personnage semblent avoir été taillés pour Catherine Deneuve. Non pas pour la femme, même si le film est étonnamment politique, ni pour la comédienne mais pour l’icône. De la référence d’ouverture à Peau d’Âne à son intrigue générale, le film prouve et montre que Deneuve n’est pas seulement cette potiche, coincée dans des rôles bien précis, dans un cinéma bien délimité. Elle est libre, Catherine, et elle l’est jusqu’au bout des ongles.
En salles le 10 novembre 2010
Crédits photos : © Mars Distribution
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