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Louise Bourgeois : une dernière autobiographie balzacienne…

Par Artilt

Louise Bourgeois

Par Fabienne

C’est dans l’intimité de la Maison de Balzac que Louise Bourgeois a choisi d’exprimer pour une dernière fois son art : des œuvres dédiées à l’héroïne Eugénie Grandet.

Louise Bourgeois, artiste plasticienne majeure de la scène contemporaine décédée en mai dernier à New York, à l’âge de 98 ans avait exprimé le désir il y a deux ans de cela de présenter un travail réalisé en relation avec une héroïne notoire de Balzac : Eugénie Grandet. Ce travail de l’artiste franco-américaine trouve tout naturellement son espace d’exposition depuis hier à la Maison de Balzac .

Née en France en 1911, Louise Bourgeois vivait depuis 1938 à New York. Sa pratique de plasticienne systématiquement matinée d’une logique émotionnelle complexe s’est basée sur l’exploitation de thèmes récurrents : ses expériences de la vie. Elle s’était inventée une logique émotionnelle et artistique qui a traversé les différents courants sans perdre de sa singularité et en échappant de façon systématique à toute forme de classification.

Une œuvre autobiographique réalisée à partir de matériaux et d’éléments divers : des supports de propos lourds de sens, ses peintures, dessins, gravures, objets et sculptures-installations monumentales ne traitent que d’intime. Soucieuse de la condition féminine, autre thème qui se retrouve tout au long de son œuvre, Louise Bourgeois, se refusait au titre de « féministe » mais préférait admettre « s’occuper du féminin ».  Influente et reconnue, elle a su imposer une œuvre riche et polymorphe, les souvenirs d’enfance, l’humain, les relations amoureuses et sexuelles, la famille ont été source d’un art du « trauma » dans lequel souffrance et démons sont transformés et transcendés pour devenir « garantie de santé mentale ».

Je n’ai jamais fait de mal à une mouche. En fait, j’essaie de tout réparer. [...] Le but de ces pièces est d’exprimer des émotions. [...] Mes émotions sont mes démons.

C’est à partir des années 70 qu’elle connaîtra la notoriété avec des œuvres de plus en plus violentes « qui parlent souvent de meurtre ». C’est ainsi qu’elle va intégrer ses célèbres représentations du père : le phallus ( « fillette » ) et  de la mère ( « l’araignée ») :

Araignée • Louise Bourgeois

En 1982, à l’âge de 71 ans, elle deviendra la première femme à être honorée d’une rétrospective au MOMA, le Museum of Modern Arts de New York. S’en suivront en 1995 puis 2008 deux rétrospectives de son œuvre au Centre Georges Pompidou.

L’artiste se livre une dernière fois…

Aujourd’hui et seulement quelques mois après la disparition de l’artiste, la Maison de Balzac devient le théâtre d’une rencontre entre deux femmes dont les histoires et le parcours sont intimement liées.

Le roman de Balzac : Eugénie Grandet, favorablement accueilli par le public dès sa publication en 1833 traite de sujets chers à Louise Bourgeois (famille, douleur et solitude) et met en scène une héroïne dont l’épanouissement est systématiquement compromis : « celle à qui l’on ne donna jamais la chance de grandir » -selon les dires de l’artiste.

Louise Bourgeois, Eugénie Grandet

Louise Bourgeois, Eugénie Grandet, 2009 Courtesy Cheim & Read, Hauser & Wirth and Galerie Karsten Greve © Adagp, Paris 2010 Photo: Christopher Burke

Eugénie Grandet devient tout naturellement un personnage source d’ « identification récurrente ».

le prototype de la femme qui ne s’est pas réalisée. Elle est dans l’impossibilité de s’épanouir. Ce personnage de Balzac est la prisonnière de son père qui avait besoin d’une bonne. Son destin est celui d’une femme qui n’a jamais l’occasion d’être une femme…

Attachée à ce personnage d’une grande complexité, c’est dans les liens qui unissent les destins de l’héroïne du roman et de l’artiste que vont se construire les œuvres qui vont investir la Maison de Balzac mais également dans le souvenir de la mère de Louise Bourgeois, tisserande de métier.  Revenant à la broderie, elle livre -parfois avec humour et délicatesse- dans ces dernières réalisations une vision du monde désuète et onirique, évocatrice d’un passé lointain et perdu depuis longtemps…

Pour compléter la visite, l’exposition s’accompagne de lectures et d’ateliers, à découvrir dès aujourd’hui -sur réservation-.

Louise Bourgeois : Moi, Eugénie Grandet…
Exposition du 3 novembre 2010 au 6 février 2011
Maison de Balzac

47, rue Raynouard 75016 Paris


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