Il y a trois ans, jour pour jour, un avion me ramenait d'Afrique et me déposait, bouleversé, sous la pluie. Déjà trois ans et j'ai jamais vraiment su comment en parler, j'ai jamais vraiment pu écrire, mettre des mots sur cette aventure. Comme si je l'avais pas vécu pour de vrai, comme si c'était le fruit de mon imagination. Avec le recul, les souvenirs sont flous, les sentiments un peu oubliés, mais j'y pense en ce moment, ça me hante et j'ai besoin de raconter.
C'était en 2007. Un voyage humanitaire né d'un jumelage entre mon lycée de campagne et un lycée africain. Au Burkina Faso. Mon premier grand voyage. Mon premier vol. Ma première rencontre avec l'Afrique. La journée la plus longue de ma vie entre deux aéroports, Ouagadougou la nuit et les yeux grands ouverts malgré la poussière. De la misère, de la chaleur. La peau moite, impossible de fermer l'oeil sous les moustiquaires, les belles moustiquaires immaculées. La grande messe en couleurs, le rythme des djembés, le vieux bus qui traverse la brousse. De belles rencontres, des visages sans noms, des cigarettes échangés. Un orphelin que je tiens dans mes bras tremblants et qui pleure très fort. Une escapade en moto où je me suis plus libre que jamais, loin de chez moi, loin de moi, heureux.
J'ai retrouvé cette photo où je suis là, au pied d'un grand arbre, tout habillé de blanc, à sourire droit dans l'objectif. Je ne me suis pas reconnu et je n'ai aucun souvenir d'avoir pris cette photo. Je n'ai plus de souvenirs de l'Afrique. Juste des impressions, des images, de la musique. Quelques jours avant la fin du voyage, "Willow Weep for Me" qui résonne dans mes oreilles et une larme parce que je ne veux pas rentrer chez moi, je veux rester là, sur la terre africaine. Parfois, j'y repense. Aujourd'hui, j'y repense. Ca fait trois ans. Un jour, je retournerais en Afrique pour transformer mes impressions d'adolescent en émotions d'adultes.