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“The Fool” : Warpaint déterre la hache de guerre

Par Kub3

The Fool est une double revanche. Avec ce premier album sombre et aérien, Warpaint ressuscite la scène féminine de Los Angeles tout en braquant les projecteurs sur une musique californienne en ébullition, trop souvent éclipsée par le dynamisme new-yorkais.

“The Fool” : Warpaint déterre la hache de guerre

Elles s’appellent Emily Kokal, Jenny Lee Lindberg, Stella Mozgawa et Theresa Wayman. Sous le nom de guerre de Warpaint, elles font partie de ces groupes dont on a l’impression de tout connaître avant même que leur premier LP ait pointé le bout de son nez. Les californiennes avaient en effet déjà frappé les esprits avec des titres sombres et féériques comme Elephants ou Billie Holliday.

Dans la digne lignée de l’EP Exquisite Corpse, The Fool est exactement ce que l’on attendait : un album onirique et une écriture qui s’affranchit volontiers de la linéarité. Il s’agit ici davantage de la balade progressive d’un somnambule que d’un discours structuré par une alternance de couplets et de refrains. Les atmosphères se succèdent les unes aux autres, du chaloupé Set Your Arms Down au berçant Baby et son discret canon final.

Le rythme lui-même est sans cesse soumis à de nombreuses ruptures qui vous accrochent l’oreille, à l’image de Warpaint ou de Composure, dont les changements de tonalité et les marmonnements rappellent ceux de Radiohead. Seule exception à cet ensemble relativement déstructuré, l’excellent Undertow et son organisation plus classique. Sans doute le prix à payer pour en faire un tube.

Parce qu’il faut toujours mettre un nom sur ce que l’on ne connaît pas ou ce qui déroute, le terme d’ “Heavenly Voices” a très vite été dégainé. A l’image de Zola Jesus – la grandiloquence en moins -, Warpaint semble en effet en mesure de remettre au goût du jour cette vague musicale faite de voix féminines éthérées et représentée par des groupes comme Cocteau Twins. Même si les nanas de Warpaint avouent n’avoir jamais écouté ces derniers avant que la comparaison ne soit faite par la presse…

On peut s’étendre un moment sur l’usage d’un mot un brin fourre-tout mais un constat s’impose : la scène musicale américaine semble prise d’assaut par des groupes à majorité féminine comme Dum Dum Girls, Best Coast, Zola Jesus et maintenant Warpaint. Qu’une formation soit exclusivement faite d’œstrogènes n’a rien de bien nouveau (souvenez-vous des Slits). Non, ce qui prête davantage à réflexion est que ces naissances convergent dans un seul et même berceau californien : Los Angeles. A croire, comme l’écrit avec justesse Stéphane Davet du Monde, que la cité des anges cherche à prendre sa revanche sur l’impérialisme new-yorkais, les femmes en première ligne.

Passées ces considérations techniques, il faut surtout retenir une chose à l’écoute de cet album : la maturité frappante de la musique de Warpaint. The Fool est à cent lieues d’un premier opus gentillet sur lequel on apposerait l’étiquette usée mentionnant “des débuts prometteurs, on attend la suite avec impatience”. Malgré quelques passages à vide (notamment sur les deux derniers titres), Warpaint témoigne ici d’une assurance désarmante, une identité en acier trempé. Écouter The Fool, c’est s’entendre chuchoter à l’oreille : “Prends garde à toi mecton, les femmes sont de retour.”

warpaint-the-fool
Warpaint – The Fool
Sortie le 26 octobre

Tracklist

01. Set Your Arms Down
02. Warpaint
03. Undertow
04. Bees
05. Shadows
06. Composure
07. Baby
08. Majesty
09. Lissie’s Heart Murmur


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