Christian Bourgois
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Céline Leroy
Titre original : The Men’s Club
ISBN : 978-2-267-02117-2
Quatrième de couverture :
« Des gens ont lu ce livre comme une allégorie, comme de la misogynie ou de la propagande. Je voulais seulement décrire ce qui est vrai parmi certains hommes. C’est tout. » (Leonard Michaels)
« Selon Leonard Michaels, l’humour est l’instrument idéal pour décaper le monde ou relever ses bizarreries. Que ce soit sur une dizaine de pages ou en trois phrases, ces récits sont toujours remarquables. » (Amaury da Cunha, Le Monde)
« Une exploration de la violence, de la folie, des malentendus sexuels et amoureux, de l’effroi et du rire. Un observateur précis de la comédie qui éternellement se joue, que l’on se joue. Un écrivain. » (Olivier Renault, Art Press)
Mon avis :
Second roman de Leonard Michaels, Le club est paru en 1981 aux États-Unis, une adaptation cinématographique en a été tirée en 1986.
Le club, c’est l’histoire d’un groupe d’hommes qui se réunissent un soir chez l’un d’entre eux pour parler de tout et de rien, d’eux-même, de leurs vies, sans forcément savoir comment s’adresser la parole, ne sachant pas même comment ils en sont venus à accepter l’invitation, jusqu’à ce que leur hôte, Cavanaugh propose que chacun raconte l’histoire de sa vie.
Les femmes voulaient parler de colère, d’identité, de politique… Des affiches placardées sur les murs de Berkeley les incitaient à s’affilier à des groupes. Leurs présidentes passaient à la télévision. Des visages énergiques, directs. Aussi, quand Cavanaugh me téléphona pour me proposer de rejoindre un club où il n’y aurait que des hommes, j’éclatai de rire. Lentement, avec un grand sérieux, il a réitéré son invitation.
A partir de là, se met en place tout un mécanisme de structure du groupe et de décloisonnement. Chacun commence, hésitant à se raconter, et les histoires se font de plus en plus étranges, décalées, recelant une violence intrinsèque, touchant à la sexualité, aux rapports hommes-femmes (mais aussi, de manière plus ambigüe et sans doute aussi violente, aux rapports aux hommes entre eux, à la fois dans l’anecdote rapportée par le récit et dans le récit lui-même, pendant les heures de la nuit durant laquelle se tient cet étrange club.)
Misogynie ? Non, les femmes et les hommes croisés au cours de la lecture sont pourvu de caractères et de caractéristiques parfois surprenantes, et leurs travers sont sans aucun doute aussi agaçants que ceux des personnes que nous côtoyons en chair et en os chaque jour de notre vie. Il n’en reste pas moins que nous sommes dans une forme de réalisme cru, ordinaire et les réactions des uns et des autres sont à l’image de beaucoup de nos comportements : mélange de curiosité, de paresse, de désir -sexuel ou non- , de sentiments improbables, égoïsme teinté de compassion -mais lointaine, et de résignation -à quoi bon ? et surtout d’incompréhension, de quiproquo, de colère.
Comme dans Sylvia, on note chez Leonard Michaels un talent certain pour raconter des histoires en puisant dans les différentes psychologies de ses personnages, pour les mettre en scène et dissoudre petit à petit tout le cadre du récit, gommant toutes les ficelles maintenant la structure de ce roman. Au fil des heures et de la quantité de nourriture, de boisson ingurgitée, au rythme des joints, le mécanisme de réflexion de ce groupe d’hommes évolue sensiblement, comme les aiguilles d’une horloge qui s’accéléreraient jusqu’à perdre toute cadence. La fin -mais y a t’-il seulement une fin ou se pose-t-elle en introduction à autre chose ? – est imprévisible, d’une violence curieuse, peut-être plus que tout le reste et résume à elle seule tout l’esprit du roman, de cette camaraderie au milieu des malentendus et du baluchons de souvenirs traîné une vie durant.
Une première traduction de ce roman avait paru en 1983 chez Fayard.
Le club est paru en poche dans la collection Points Seuil en 2011