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Interview Play Paul pour Luxuriant n°16

Publié le 24 novembre 2010 par Nobody

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Le petit prince de la musique électronique française s’appelle Play Paul. Après une éclosion en pleine French Touch 1.0 avec le groupe Buffalo Bunch et son acolyte Raw Man , Paul a décidé de faire voler en éclat les standards du genre, produisant avec le même brio de la « Hooligan House » pour Defected, de l’ « Electro énervée » pour International Deejay Gigolo Records, le mythique label de DJ Hell ou de la « Tropical » sensuelle sur Kitsuné. Le frère de Guy-Man des Daft Punk nous fera l’honneur d’un dj set éclectique le 26 novembre au Am Puff pour la soirée Micro-Clubbing.

1)   Paul, on va commencer par essayer de comprendre d’où vient ton nom…

Je cherchais un nom avec Paul qui est mon prénom. J’ai accolé le « Play » pour faire référence à Prince Paul du groupe « De La Soul ».. D’ailleurs c’est généralement moi qui trouve les noms des groupes comme Buffalo Bunch, Raw Man, We In Music… Mes parents étaient publicitaires, j’ai le sens de la formule choc, ceci explique donc cela !

 2)   Ta formation, ton background ?

J’ai appris un peu de solfège comme tout le monde mais je n’ai pas une formation de musicien classique. J’ai commencé comme batteur dans le groupe « Seven Tracks » que nous avions monté avec Romain Tranchart (moitié de Modjo, NDLR) quand nous étions au lycée Carnot. Nous jouions du hard rock dans pas mal de clubs parisiens et des labels se sont intéressés à nous. Mais nous avons dissolu le groupe avant de signer.

 3)   Il y a eu la French Touch et tes contributions sur Crydamoure. Comment fonctionnait le label ?

Un label a l’époque, c’était très funky dans sa gestion. Guy-Man et Rico ne s’occupaient pas trop de la comptabilité par exemple. C’était une époque où nous vendions beaucoup de disques. « T.I.T.T.S » s’est écoulé à 10000 exemplaires. Pour mon frère comme pour Thomas Bangalter, posséder un label était le moyen de produire de la musique avec une certaine assurance en terme de vente. Mais il faut bien voir que ni l’un ni l’autre n’ont fait ces labels pour l’argent.

 4)   Est-ce vrai que tu avais apporté le premier Buffalo Bunch à Thomas Bangalter alors que celui-ci venait de produire le jour même « Music Sounds Better with you » ?

C’est exact. Romain et moi sommes arrivés chez le père de Thomas. Il était avec Alan Braxe. Thomas a écouté notre morceau et il a adoré. Ils nous ont demandé si nous étions ok pour écouter un truc qu’ils venaient de produire dans l’après-midi et dont ils n’étaient pas très satisfaits. C’était « Music Sounds Better with you ». On a pris une claque. Le soir-même, ils l’ont joué au Rex dans un mini-live pour la sortie de « Vertigo », le maxi d’Alan Braxe sur Roulé et on a repris une seconde claque. Pour l’anecdote, Thomas Bangalter souhaitait produire un album des « Buffalo Bunch ». Ca ne m’intéressait pas car je n’aimais pas la House et tout ce qu’on produisait à l’époque. Je sais que Romain était ultra partant mais j’ai préféré décliner l’offre.

 5)   Tu as signé des maxis sur Defected, label très house avant de partir sur Gigolo. Ces grands écarts sont caractéristiques de l’étendu de ton talent ?

En fait, j’ai vécu ces sorties comme une libération, surtout avec le morceau « Love Song » car c’était le premier track que je faisais de A à Z, sans sample. C’était ma musique et le premier morceau où je chante. J’y ai mis toutes mes influences. Je suis content que DJ Hell m’ait signé. Mes deux maxis ont d’ailleurs très bien fonctionné en terme de vente. Hélas le label est un peu dans le trou aujourd’hui…

Pour Defected, j’avais envie de produire un track de « Hooligan House » destiné aux clubs anglais. Hélas, j’ai signé sur le mauvais label pour ça car il est très orienté « vocal house ». Ca n’a donc pas pris.

 6)   Tu es maintenant sur Kitsuné. Pourquoi ce choix ?

Je ne suis pas sur Kitsuné. En fait pour chaque track ou maxi que je produis, je sollicite les labels. Gildas est très bon ami de mon frère. Et il m’avait donné l’opportunité d’installer mon studio au sous-sol du magasin, je lui faisais donc logiquement écouter mes productions.

 7)   Tu m’as dit un jour que tu étais entrain de tuer Play Paul petit à petit… Finalement il est tjrs là !

Je te l’accorde ! En fait, cela dépend de mes productions et je change d’identité en fonction des styles musicaux.

 8)   Où en es-tu de Ryskee ?

Je vais sortir le second maxi de Ryskee en janvier « Horrors of Love ». J’ai travaillé avec Jenny Wilson, une chanteuse suédoise. J’apprécie énormément les voix scandinaves des femmes-enfants. Elles ont un timbre très particulier qui colle parfaitement avec ce que je voulais. Sur le premier Ryskee, c’est Leslie Ming qui était une connaissance de ma petite amie de l’époque. Je nourris une certaine déception pour ce premier titre. « Leave me amor » était un morceau que j’avais dans les cartons depuis un moment et que je considérais comme une arme secrète.  Radio FG a commencé à le jouer et Ministry of Sound s’est intéressé immédiatement pour le signer. Les choses ont malheureusement traîné et j’ai perdu 6 mois avec eux pour ne pas le signer au final. On a quand même réussi à vendre 5000 en digital.

 9)   Est-ce que tu as un regret de cette époque, d’être passé à côté du tube parfait comme certains de tes potes ?

Je ne nourris aucun regret car j’ai toujours choisi de faire la musique  que j’aime et de produire mes propres morceaux. Quand tu te lances, tu peux soit chercher à gagner de l’argent et faire tout pour ça comme David Guetta, soit avoir une approche différente et faire ce que tu aimes. Ca ne m’intéresse pas d’avoir ma gueule coller dans tous les magazines comme cela fut le cas pour Justice. Je m’inscris dans cette perspective de rester discret. Ce goût de se cacher comme mon frère l’a fait avec les Daft Punk, doit être génétique…

En tout cas, me concernant, je produis la musique que j’ai envie de produire. Et je ne m’arrête pas à l’electro. Je me tourne vers le rap, le R’n’B. Le problème reste hélas les maisons de disque. J’avais commencé un projet rap avec un chanteur antillais mais les labels ont refusé le projet car ça n’était pas assez « caillera » pour eux. Pour la petite histoire, j’avais produit un morceau pour Diam’s avant qu’elle ne sorte son « DJ » et sa maison de disque a refusé le track !

 10)  Tu m’as dit un jour devoir faire des remix pour payer tes factures, tu en es toujours là ?

Je corrige, j’ai fait un jour le remix du « If I ever feel better » de Phoenix parce que Romain et moi avions besoin d’argent. Nous n’étions pas franchement content de notre travail. Mais au mastering, ça a tout changé ! Et voilà le morceau est sorti et a cartonné en club. D’ailleurs, tout ce qui a bien fonctionné pour nous était les morceaux dont nous étions les moins satisfaits !

 11)  C’est quoi la vie de Play Paul ?

Je ne sors plus. J’en avais marre de me réveiller le matin avec la gueule de bois ! Je me lève donc tôt et je file bosser. Vicarious Bliss qui est parti aux Pays-Bas enregistrer son album m’a passé son studio et ça fait vraiment du bien car je travaille dans d’excellentes conditions. De plus, plusieurs artistes sont au même endroit comme Chloé donc il y a une vraie stimulation.

 12)  Tu es plutôt un musicien ou un artiste.

Je me sens définitivement comme un musicien même si je ne veux pas me limiter à ça. Je crois que pour être artiste, il faut être névrosé. Prend Serge Gainsbourg, le plus grand artiste français de tous les temps n’était pas le mec le plus serein de la Terre. C’est pour cela que je me considère plus comme un musicien que comme un artiste. Ce ne sont pas les artistes nevrosés qui manquent autour de moi!

Mais j’ai très envie de me lancer dans l’écriture de scénarios, j’aime beaucoup le cinéma.

 13)  L’impact de facebook ?

Facebook est une vitrine importante pour moi. Ca me permet de libérer mon côté réactionnaire contre la dérive de notre société, aliénée par TF1 et Canal+ ! En tout cas, le web a un gros impact sur la musique. On ne vend plus de disques, certes, mais on réussit à toucher beaucoup de personnes en un minimum de temps.

14)  Tu en es où de tes relations avec les Daft ?

Elles sont excellentes. C’est vrai qu’à la sortie du second album j’ai été très critique car ils y avaient trop de samples. Mais j’ai compris par après que les Daft avaient réussi à se faire plaisir directement sur le deuxième album ce qui arrive plus généralement sur le troisième pour la majorité des groupes. Nous nous sommes réconciliés après la claque qu’ils m’ont mis à Bercy en 2007.

 15)  On ne te saoule pas trop avec eux, avec ton frère ?

Non je ne me plains pas, on ne me parle pas beaucoup d’eux. En fait, on a une relation de frangins et ça s’arrête là. Je ne suis pas dans leur business et je ne sais pas ce qu’ils font. Je suis peut-être même le moins bien placé sur leur sujet ! Je sais juste que pour l’instant, ils sont à LA, ils sont salariés et hébergés par Disney et c’est tout !

 16)  Pourquoi n’avoir jamais rien produit avec ton frère ?

Et bien c’est une bonne question !Quand il rentrera des Etats-Unis, je vais l’inviter à produire de l’Eurodance avec moi. On est tous les deux fans de mecs comme Benny Bennassi !

 17)  Comment tu imagines le Luxembourg ?

Je suis super impatient de m’y rendre car je trouve ce pays très spécial. J’ai appris qu’il y avait une langue particulière. J’aime bien l’accent des luxembourgeois d’ailleurs !


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