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"Pieds nus sur les limaces" : jumelles

Par Vierasouto


26 - 11
2010
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Pitch.
A la mort de leur mère, deux soeurs se retrouvent dans la maison familiale vide, l'une civilisée, mariée à un avocat, l'autre, sauvage, associable. Pourtant, elles ses ressemblent plus qu'il n'y paraît...

Deux soeurs, Clara, et Lily, l'une hyper-civilisée, sous contrôle, l'autre animale, sans tabous, sans censure, associable. Pourtant pas très différentes, liées par le suicide de leur père et aujourd'hui l'accident de voiture mortel de leur mère. Clara s'est efforcée d'être une fille modèle pour plaire à ses parents, à épousé Pierre, un avocat. Lily, au contraire, est restée une enfant sauvage, révoltée par les interdits et injustices de la société.

 
Le film est centré sur le portrait de deux femmes, surtout celui de Lily (Ludivine Sagnier), celle qui dérange, à la fois enfant et mature, qu'on aurait taxée de demeurée autrefois, sans tabous, sans peur, disant les choses, sans rien censurer, comme elle les pense. Confectionnant des pantoufles en fourrure avec des animaux morts, jetant tous les meubles au feu après la mort de sa mère, se roulant dans l'herbe, la boue, proposant son corps à des hommes que ça déconcerte souvent. Car le mari de Clara va être rapidement écarté, dans cette relation fusionnelle entre les deux soeurs, il n'y a pas de place pour un homme investi affectivement, aucun espace pour un étranger à la famille.

 
Face à elle, Clara (Diane Krüger), la soeur aînée, qui revient à la maison à la mort de leur mère. Une mort étrange, au volant de sa voiture, une rupture d'anévrisme, un accident sans abîmer sa voiture qui reste plantée dans le champ avec Lily qui regarde la scène pendant une heure avant d'avertir les secours. Clara, mariée à V, avocat en ville, prend un congé pour s'occuper de Lily. Petit à petit, Clara va rejoindre Lily, lui ressembler, se retrouver comme elle s'est niée, devenir elle-même au prix d'un conflit intérieur violent. Ca commence par les vêtements, d'abord, Clara porte les robes de sa mère, prend la place de la mère auprès de Lily, la materne, la protège, puis, les relations s'inversent, c'est Lily qui aide  Clara à devenir ce qu'elle aurait pu être : une jumelle de Lily, habillée comme un sac, s'étendant aussi sur l'herbe, couchant avec un camionneur de passage parce que quand on a un corps, c'est pour s'en servir, comme dit Lily.
En deux mots, Clara serait la version sophistiquée de Lily, la femme que Lily aurait pu devenir si elle avait tout censuré, inversement, Lily serait le noyau dur de Clara, sa forme brute qu'elle a occultée. Ainsi, le film amène le spectateur à être obligé de se poser la question de la normalité : qu'est-ce qui est normal? Ne pas supporter l'injustice et les limites, le carcan des usages de la société, ou enfermer ses frustrations dans un personnage lisse, intégré en société, avec le risque d'exploser? Le film est porté par l'interprétation assez exceptionnelle des deux actrices, Ludivine Sagnier, actrice plus douée que beaucoup mais dont je n'apprécie pas toutes les prestations (celles où elle en rajoute, dans le dernier Corneau, par exemple), semble avoir trouvé un rôle si fort qu'elle n'est pas obligée de livrer une performance, avec "La Californie", film injustement oublié, c'est sûrement son meilleur rôle depuis ses débuts, elle y est étonnante de naturel. Paradoxalement, Diane Krüger a un rôle encore plus difficile, tout en nuances avec un personnage très évolutif.

 
La fin optimiste est un peu comme la fin des films de Douglas Sirk : un faux happy end : Lily a rendu Clara libre de ses désirs mais que vont-elles devenir exclues de la société, considérées comme des excentriques, voire des parias? Les gens supporteront-ils longtemps leur différence qui leur renvoie une image de liberté qui pourrait les faire ses remettre en question? Retour à "La Mauvaise réputation" de Brassens ("...Non, les braves gens n'aiment pas que on suive une autre route qu'eux...")
"Pieds nus sur les limaces", le film, est tiré du livre éponyme de la réalisatrice et romancière Fabienne Berthaud dont c'est le quatrième ouvrage. Un livre qui reparaît en livre de poche pour l'occasion. Après la rencontre chez Haut et Court avec Fabienne Berthaud et Ludivine Sagnier (lire le compte rendu...), j'ai lu ce livre : et je dois dire que j'ai été assez stupéfaite par la version sombre et réaliste du roman par rapport au film ciblé sur la lumière des choses et des gens, on en a d'ailleurs parlé lors de la rencontre... Fabienne Berthault aurait pu oser filmer la version du livre, beaucoup plus douloureuse, réaliste, parfois trash, mais complémentaire pour ne pas dire plus... le film paraît, en comparaison, la version idéalisée du livre... 

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Mots-clés : avant-Premières, cinéactuel, cinéma français, , Fabienne Berthaud

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