Magazine Culture

Le plus bel âge – Joanna Smith Rakoff

Publié le 29 novembre 2010 par Sukie

Il est difficile d’écrire ou de parler de “notre” génération, sans trébucher sur des clichés. Il suffit de jeter un coup d’oeil dans les médias, de lire les blogs, les bouquins, d’écouter les conversations.  A les entendre, on est tous révoltés, galérant à trouver du boulot,  ivrognes,assoiffés de liberté à n’importe quel prix, nous la génération Y, celle qui a grandi avec Internet, avec son lot de super-héros,  de références, de nombrils vivants, parvenus digitaux érigés en superstars à une époque où la réputation vaut son pesant d’or. Tout ce que je lis de nous me procure si peu d’émotion. Cibles marketing, addict à tant de choses, égomanes cyniques, démonstratifs, ivres de reconnaissance, tout est si peu subtil et léger. L’humain est supplanté par son image, si facilement froissable.
Le plus bel âge – Joanna Smith Rakoff

Le roman de Joanna Smith Rakoff est venu apaisé cette mise en perspective indigeste, pansant quelques aigreurs. Et pourtant, l’âge qu’elle titre être le plus beau n’est pas si gai. En quatrième de couverture, le New York Observer décrit le roman comme drôle, acerbe et inoubliable. Inoubliable, dans sa façon d’être générationnel, le roman s’ouvre sur un mariage. Nos protagonistes, membres d’un même groupe d’amis, ont 26 ans. Même si c’est le seul point commun que je partage avec eux ( je ne suis ni new-yorkaise, ni juive, ni sur le point de me marier), je me suis reconnue dans les vicissitudes endurées par nos 6 personnages principaux 620 pages durant. L’écriture est fluide, les situations cocasses, elles décrivent avec justesse ce passage vers la vie adulte, faite de coups de poing, d’espoirs et de désillusions. Les chemins de Lil, Sadie, Emily, Beth, Dave et Tal se croisent et décroisent au fil d’une histoire rythmée par des ellipses, passant d’un instant T à un instant V sans transition, mais avec une fluidité déconcertante. On est souvent déstabilisé, mais jamais vraiment perdu.

Ils connaîtront l’amour et le désamour, le 11 septembre, l’échec professionnel et personnel, les galères du quotidien, le boom d’internet, les épreuves de l’amitié. Parfois invraisemblable, on se laisse tout de même embarqué par les histoires des uns et des autres, comme si l’on espérait dans notre propre quotidien, trouver de l’inattendu dans cette semi-tragédie. Ca frôle parfois le pathos, pas plus que les blogueurs qui romancent leur vie ceci dit. Est-ce que j’ai pleuré. Non mais j’ai bien failli.

Je suis restée sur ma faim en arrivant à la dernière page, avec ce sentiment d’inachevé. Comme dans la vraie vie, les personnages ne sont pas cloisonnés aux 620 pages qui ont déjà été écrites…

Enfin.

J’aurais bien aimé écrire ce livre.

A défaut, je vous en livre un extrait. On parie sur une adaptation au cinéma ?

“Quelques jours après sa rencontre avec Will Chase – car c’était ainsi qu’elle la considérait à présent : une rencontre, comme lorsqu’on tombe nez à nez avec un ours dans la forêt -, Beth commença a éprouver un sentiment proche de la panique. Malgré son refus affiché de la culture dominante – en particulier de la monogamie-, elle s’était attendue au moins qu’il lui passe un coup de fil, mais rien? Et, ce dimanche là, elle se dirigeait vers un restaurant où elle avait dîné avec lui. Elle avait rendez-vous avec Emily, dont l’appartement était bien, comme Beth l’avait pensé, juste à côté, dans la 8e rue nord.”


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Sukie 1316 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine