Magazine Culture

On y était - The Greenhornes à Londres

Publié le 08 décembre 2010 par Hartzine

On y était - The Greenhornes à Londres

Je défie quiconque de se plaindre de l’offre de concerts dont on bénéficie quand on vit à Paris. Pas de quoi s’ennuyer, non, vraiment. Et pourtant, faute de moyens, certains groupes doivent faire l’impasse sur la capitale française, nous obligeant à nous déplacer jusqu’à Londres, à dépenser la moitié de notre salaire chez Primark et à nous geler les miches sur les quais d’un métro qui n’arrive jamais. Mais ça fait cinq ans que le groupe le plus célèbre de Cincinnati, Ohio, n’a pas tâté de la scène, et ça vaut sans doute bien un aller-retour en Eurostar.

16h, il fait déjà nuit et l’air est glacial. Un coup d’oeil à l’intérieur du Cargo, le nouveau lieu londonien à la mode, pour goûter un peu aux balances, un détour par l’exposition Mick Rock à quelques pas de là, un tour chez Rough Trade, et il est déjà temps de retourner dans la salle : ce sera le premier rang ou rien. On traîne un peu au bar pendant que Patrick Keeler et Jack Lawrence discutent avec des fans et que Craig Fox, capuche sur la tête, traîne sans but sa face de crapaud dépressif, ignorant les regards curieux de son public. Huit ans qu’il attendait que ses deux potes de lycée lâchent leurs projets respectifs pour venir enregistrer un quatrième album avec lui, il est peut-être un peu las. Il faut dire qu’entre les tournées des Raconteurs et des Dead Weather et l’enregistrement d’un album avec cette vieille peau de Loretta Lynn, Jack et Patrick n’ont pas eu le temps de s’ennuyer. La faute à Jack White qui, comme toujours, attire comme un aimant les talents qui ont le malheur d’entrer dans son champ d’audition. Pour se faire pardonner, il a gentiment accueilli sur son propre label, Third Man Records, le nouvel essai des Greenhornes, sobrement intitulé ★★★★ (Four Stars) et dévoilé début novembre. Fidèle à son esthétique rétro, le trio continue sur la lancée d’un garage rock influencé par les 60’s qui n’a, contrairement à ce que l’on pourrait penser en lisant ces mots, rien à voir avec les différents projets de White. La voix très masculine de Craig Fox sauve en effet les Greenhornes de toute comparaison qui pourrait mal tourner : leur musique est plus lourde, plus virile et d’apparence plus solide, quitte à paraître un peu pataude parfois.

On y était - The Greenhornes à Londres

En live, la formule fonctionne à merveille : appuyé sur le subtil jeu de Patrick Keeler, qui mêle toucher délicat et martèlement brutal, les lignes de basse incisives de Jack Lawrence et les touches mélodiques de clavier de Mark Watrous, qu’on a déjà vu avec les Raconteurs, Craig assure la guitare et le chant à merveille, mais sans bouger d’un poil. Alors que Patrick fait corps avec sa batterie, les cuisses tendues et les poignets souples et sensuels et que Jack, libéré des égos démesurés d’Alison Mosshart et de Jack White se lâche, visiblement heureux de retrouver ses potes et une salle à taille humaine, ce qui devrait être le leader du groupe fixe l’horizon de son oeil vitreux, imperméable à toute l’affection que lui offre une fosse à qui il avait manqué. Cette absence de frontman est sans doute le plus gros problème des Greenhornes et la raison pour laquelle ils n’ont jamais connu le succès qu’ils méritent. Heureusement, ses deux acolytes rattrapent le coup et occupent la scène avec classe. On n’a jamais vu Little Jack, d’ordinaire extrêmement discret, aussi déchaîné. Téméraire, il prend même le micro pour chanter en solo Go Tell Henry, ultime preuve du plaisir qu’il prend à jouer sans l’oppression des grosses pointures des Dead Weather. Le sourire aux lèvres, il nous offre un rappel dantesque et interminable, sans cesse relancé par un beat et un coup d’oeil complice de Keeler à ses camarades et un mouvement de cheveux imperceptible de Craig.

A la fin du concert, les hipsters reprennent leurs droits dans la salle transformée en club. Dehors, le pavé est humide, l’air mordant et le métro n’arrive toujours pas, mais on ne regrette pas d’avoir traversé la Manche pour rapporter la preuve que, décidément, l’Ohio est une terre bien fertile pour la musique.

Photos

Audio

The Greenhornes - Jacob’s Ladder

Setlist

1. Going to the River
2. Saying Goodbye
3. Pattern Skies
4. Song 13
5. Too Much Sorrow
6. Underestimator
7. Shelter of Your Arms
8. Things She Says
9. There is an End
10. Better Off Without It
11. Go Tell Henry
12. Lies
13. Lost Woman
14. I’ll Go Crazy (medley)


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Hartzine 83411 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines