Magazine Bien-être

Soeur Katrei

Publié le 26 décembre 2010 par Joseleroy

Voici la rencontre de Soeur Catherine avec Maitre Eckhart :

"Soeur Catherine vient alors chez son confesseur : « Maître, lui dit-elle, pour l'amour de Dieu, écoutez-moi !

—D'où viens-tu ? lui demande-t-il ?

—De pays lointains.

—De quel pays es-tu ?

—Maître, ne me reconnaissez-vous donc pas ?

—Ma foi non !

—C'est pour moi un signe que vous ne vous êtes jamais connu vous-même.

—Tu dis vrai. Je sais bien que, si Je me connaissais moi-même aussi précisément que je le dois, Je connaîtrais toutes les créatures à la perfection.

—C'est vrai. Mais, Maître, laissons là ce discours. Pour l'amour de Dieu, écoutez-moi.

—Volontiers. Eh bien, parle. »

La fille fait sa confession à son vénérable confesseur comme il est maintenant en elle de le faire afin de réjouir son âme. « Chère fille, lui dit-il, reviens vite me voir I

—Si Dieu en dispose ainsi; j'en serai heureuse. »

Le confesseur va voir ses frères : « J'ai entendu un être, dit-il : je ne sais si c'est un homme ou un ange. Si c'est un homme, sache que toutes les puissances de son âme habitent au ciel auprès des anges et que son âme a reçu une nature d'ange. Sa connaissance et son amour sont au delà de tout ce que j'ai entendu dire jamais d'aucun homme.

—Dieu soit loué ! », répondent les frères.

La fille commence alors à parler au confesseur :  « Tant que je vivrai, il faut que vous gardiez pour vous ce que je vais vous dire.

—Je te donne ma foi que, tant que tu vivras, jamais je ne trahirai ta confession. »

Elle s'ouvre à lui et lui dit tant de merveilles qu'il s'étonne qu'un être humain ait pu jamais en souffrir en si grand nombre. « Maître, lui dit-elle, il me manque encore quelque chose. J'ai trouvé en rentrant en moi-même que je suis passée par tout ce que mon âme avait désiré, à l'exception d'une chose pourtant : ma foi n'a pas encore été mise à l'épreuve.

—Dieu soit loué de t'avoir créée ! Il faut maintenant que tu te laisses contenter.

—Non, jamais, tant que mon âme n'aura sa demeure dans les lieux de l'éternité I

—Si mon âme avait connu pareil essor que la tienne, j'en ferais pourtant bien mon affaire !

—Mon âme prend son essor par delà tous les obstacles. Mais elle n'a pas de ferme demeure. Sachez-le : il ne me suffit pas de vouloir !Ah, puissé-je seulement savoir ce qu'il me faut faire pour être établie constamment aux séjours de l'éternité !

— En as-tu un si grand désir ?

-Oui

—Si tu veux être confirmée, c'est de lui qu'il faut te dépouiller l

—Je le ferai bien volontiers. »

Peu de temps après, le confesseur rend visite à la fille : « Dis-moi, l'interroge-t-il, comment vas-tu à présent ?

—Mal, répond-elle. Le ciel et la terre sont trop étroits pour moi »

Il la prie de lui dire quelque chose ; « Je ne sait rien d'assez facile pour pouvoir l'exprimer.

—Fais-le pour l'amour de Dieu... Dis-moi une parole ! »

A farce d'insister avec amour, il obtient qu'elle parle. Elle lui tient alors des propos si merveilleux si profonds sur la pure vision de la Vérité divine qu 'il s'exclame : « Ces choses-là, sois-en certaine, sont inconnues de tous les hommes ! Si « n'étais prêtre et n'avais étudié les sciences divines, moi-même, elles me seraient étrangères !

—C'est cela que je vous reproche ! J'aimerais que vous les ayez découvertes par votre propre expérience.

—J'ai tant étudié que je connais tout cela aussi distinctement, tu peux en être sûre, que je me rappelle la messe que j'ai dite ce matin I Pourtant il est vrai que j'ai grand regret de ne pas posséder ces choses par l'expérience de ma vie...

—Prie Dieu pour moi» murmure la fille.

Sur ces mots, elle retourne à sa solitude et se consacre à Dieu. Mais cela ne dure pas longtemps. La fille revient à la porterie et demande à parler à son vénérable confesseur : « Seigneur, dit-elle, réjouissez-vous avec moi : je suis devenue Dieu!

— Dieu soit loué l s'exclame-t-il. Retourne à ta solitude, éloigne-toi des hommes. Si tu continues d'être Dieu, alors je me réjouirai avec toi »

Elle obéit à son confesseur et se réfugie dans un coin de la chapelle. Il arriva alors qu'elle oublia tout ce qui porta jamais un nom. Elle fut tirée si loin hors d'elle-même et hors de toutes choses créées qu'il fallut la transporter à l'extérieur de la chapelle.

Elle resta étendue pendant trois jours. On la tenait pour morte. Mais son confesseur déclara : « Je ne crois pas qu'elle soit morte. » Soyez sûr que, s'il n'avait pas été son confesseur, on l'aurait enterrée.

On essaya tout ce qu'on put pour savoir si l'âme était toujours dans le corps. Il fut impossible d'en rien savoir: « Assurément, dirent-ils, elle est motte.

—Assurément dit le confesseur , elle ne l'est pas! »

Au troisième jour, la fille revint à elle : « Hélas,  pauvre de moi, soupire-t-elle, suis-je donc encore ici ? » Son confesseur était déjà auprès d'elle : « Laisse-moi jouir des faveurs de Dieu, la pria-t-il : fais-moi connaître ce que tu as vu.

—Ma foi, dit-elle, je ne le puis. Ce que j'ai vu, personne ne peut le mettre en mots.

—As-tu à présent tout ce que tu voulais ?

—Oui, j'ai été confirmée! »

Source: Noël chez Eckart et les mystiques rhénans, Marie Anne Vannier, ed. Arfuyen.

couv7970g_130


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Joseleroy 216084 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines