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Morale et capitalisme, 2 : La voix humaine ?

Par Marcalpozzo

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   « Une génération qui ne pense pas est une génération qui n'existe pas », Mehdi Belhj Kacem

 J'avais publié en ligne ce court article, le 11 octobre 2005. Je le republie ici, in extenso, dans "Morale et capitalisme", en y apportant quelques modifications, car, ce texte me parait, malgré ses nombreux défauts, assez parlant pour la décennie qui vient. Devons-nous continuer à croire au progrès économique pour tous, à une démocratie qui valorise presque aveuglément l'égalité en droit comme en fait, quitte à encourager un égalitarisme sauvage, où la méritocratie sera bientôt totalement remplacée par la parentocratie, la médiocratie, la massocratie... Quelle est la voie humaine de demain ? Ne serait-ce pas la fraternité, plus que la liberté ou l'égalité, notions aujoud'hui galvaudées, délavées, malmenées ? Ces questions sont à trouver... Mais dans le cycle Morale et capitalisme, on voit, une fois de plus, que la morale est souvent, pour ne pas dire, toujours, exclue, par le capitalisme qui pose ses valeurs à partir d'un seul mot d'ordre "L'égoïsme et l'individualisme"...

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Morale et capitalisme, 2 : La voix humaine ?
A sa sortie, j’avais acheté le livre de Jacques Attali, La voie humaine, qui, à mon sens, est intéressant à plusieurs égards. D’abord, parce qu’il exprime ma vision de la collectivité, du sens de l’Etat, et de l’avenir. Comme vous le savez, je refuse le libéralisme sauvage, le modèle américain que l’on souhaite exporter ici, car je crains au taux d’égoïsme que ça génère, de haine et de jalousie pour l’autre (« Plus personne, ou presque, ne croit que changer la vie des autres est important pour soi »), même si je ne trouve pas que des reproches à lui faire.  La compétitivité, la guerre de tous contre tous, cela a du bon, pour pousser les hommes à se dépasser. Il suffit simplement de revenir au concept kantien d’insociable sociabilité, pour comprendre que cette formule n’est en rien un constat pessimiste. Mais tout de même… mon passé socialiste, mes idées (certes devenues depuis un peu libertaires, pour ne pas dire libertariennes) d’humaniste rousseauiste, me tiennent toujours, et m’empêchent de me laisser complètement aller à me réjouir du libéralisme spéculatif qui vient, l’arrivée d’un nouveau modèle exclusivement économique, qui sera, j’en suis sûr, le cauchemar de ce pays. « La marchandisation gagnant tout, jusqu’à l’homme lui-même, le monde deviendra une foire parcourue de bandes rivales. », nous promet Attali.

Attali nous dit : « Le marché devient chaque jour plus fort que la démocratie et il en menace même les institutions ». D’où vient donc cette menace sur la démocratie ?N'est-ce pas la démocratie elle-même qui est sa propre menace ? L’explication donnée par Attali est simple : « L’initiative privée avance au rythme choisi par chaque individu, alors qu’il faut une action collective complexe pour changer les cadres et les usages de la démocratie ». D’où l’intérêt du bien commun à remettre vite au premier plan. Bien commun que beaucoup aujourd’hui ignore, ne serait-ce par leur désaffection citoyenne, ayant perdu leur conscience politique : « Plus personne, ou presque, ne pense que voter peut changer significativement sa condition, a fortiori celle du monde. » Car, même s’il y a du bon dans l’économie de marché, dans la mondialisation, attention au marché tout de même qui continuera à progresser plus vite que la démocratie. Car, pour Attali, la mondialisation est entrain de tuer la démocratie, tout comme le fait l’économie de marché posée en reine du système social.

Toutes les tentatives passées pour encadrer le marché ou le soumettre ont sombré dans l’impuissance ou le totalitarisme (quand ce n’était pas les deux à la fois !). Certes, le marché à des vertus, Attali ne le cache pas, comment pourrait-il d’ailleurs ? Mais il s’agit de limiter son emprise sur chacun. D’abord, en étendant le champ de la gratuité « Bien des métiers marchands pourraient être remplacés progressivement par des activités gratuites et bénévoles, ce qui pourrait réduire la nécessité de disposer d'un revenu pour en bénéficier » ; en opposant le savoir au spectacle ; en renforçant la démocratie par la mise en œuvre de la responsabilité de tous. Et ce que les socialistes, encore trop engoncés dans le capitalisme, n’ont pas vu, en affirmant une prééminence du temps sur l’argent. Avoir comme dit l’auteur, « le sens du temps ». « Les biens essentiels sont l'ensemble des biens nécessaires à chaque personne pour pouvoir choisir librement son temps, pour avoir accès au "bon temps". »

« Le Temps est le bien le plus rare parce que c'est le seul bien qu'on ne puisse ni produire, ni donner, ni échanger, ni vendre » dit avec intelligence Jacques Attali, voilà pourquoi cette culture du toujours plus (de fric, et de choses matérielles) est à mes yeux délétères, destructrices, parce que cette culture est un mensonge, elle vous promet un bonheur différé, il s’agit de tenir le bonheur du temps présent. Mais le libéralisme aura, je pense, du mal, à nous l’offrir à tous.


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