Magazine Culture
Le film fantastique avec monstres en culottes courtes est devenu un genre à part entière, de Dorothy à Joshua, d’Esther à ces Children-là, chacun s’essaie à donner au mal le visage de l’innocence, surfant par là même sur un politiquement incorrect sous-jacent, vague idéale pour une transgression maximale de la morale et du bon goût. Ici, le britannique Tom Shankland adopte pas mal de codes habituels : la famille, la neige, le lieu isolé pour installer son petit jeu de massacre et faire jaillir la tension d’un peu partout (le bois, la cuisine, la cabane à outils). Du blanc immaculé et virginal, symbole de la pureté de l’enfance, au rouge sang qui vient tâcher leur terrain de jeu, il n’y a qu’un pas, franchi subtilement, dans un crescendo de cris et de larmes, de suspense oppressant et d’horreurs en tout genre. Shankland réalise un film absolument sérieux, maîtrisé, acéré ; où l’atrocité fuse en tout sens, à l’intrigue bourrée de paradoxes (comment oser se défendre contre un ennemi au visage de bambin ?), d’explorations thématiques intéressantes (le rapport de la mère à l’enfant) et de séquences terrifiantes, formellement irréprochables (la première mort, qui ouvre le bal, est particulièrement bien amenée). S’en suit, au-delà d’une première lecture amplement satisfaisante (soit la série B dans toute son efficacité, en tout et pour tout), de quoi nourrir les plus exigeants, avec cette belle histoire d’amour entre une mère (Eva Birthstle) et son ado de fille (Hannah Tointon). La demoiselle, rebelle, tatouée d’un fœtus sur le ventre en rappel de l’avortement auquel elle a survécu, et sa maman, stricte et distante, vont – à mesure que le danger les menace- se rapprocher et s’unir, se défendre et s’aimer, sous l’œil discret d’une caméra qui multiplie références (Shining notamment) et finesse (dans le portrait de groupe), jusqu’au final curieux et passionnant où l’amour maternel, enfin acquis, sonne tout aussi vite la fin des réjouissances. Plutôt pas mal, donc.