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Il est dit que ce n’est qu’au moment où il s’apprête à tirer sa révérence que je ferai la connaissance de John Rebus, le héros récurrent de la scène policière écossaise ! Après dix-sept apparitions de bons et loyaux services dans les romans de Ian Rankin, le voilà qui se prépare à prendre sa retraite, dans une semaine exactement ! Pourtant il n’aura pas le temps d’y penser beaucoup car dès la première page il est déjà sur les lieux d’un crime , avec sa jeune co-équipière Siobhan Clarke qui doit prendre sa place. Nous sommes à Edimbourg, la nuit du " Mercredi 15 novembre 2006 » C’est le titre de la première partie. Il y en aura dix, une par jour, l’épilogue tombant le lundi 27 novembre de la même année, soit douze jours exactement après le démarrage de l’histoire ! L’action est ainsi menée tambour battant et le plaisir du lecteur n’en est que plus vifUn crime a été commis, la nuit, à Edimbourg. La victime est retrouvée, « réduite en bouillie », sur un trottoir, entre un parking et un cimetière! Ambiance!C’est un poète russe dissident. Justement, une délégation de Russes tout puissants s’affiche partout en ville. C’est dans cette direction que s’oriente l’enquête qui, naturellement, dévoilera bien des ententes tacites et illicites entre ces moscovites, et les politiciens véreux et nationalistes, les banquiers redoutables et surtout Big Ger Cafferty, le caïd de la ville qui n’a jamais pu être vaincu, l’éternel ennemi de l'inspecteur Rebus. Plus que l’intrigue elle-même qui a tout pour plaire aux amateurs de polars car tous les ingrédients nécessaires à la réussite s’y retrouvent très classiquement, ce que j’aime le mieux toujours c’est la personnalité du héros, particulièrement soignée ici, peut-être pour effacer la nostalgie de sa prochaine disparition. Qui est donc ce Rebus à la veille de sa retraite? Voici comment il se décrit, la nuit du meurtre alors qu’assis dans un fauteuil de la bay-window de son salon il déguste un whisky de dix-huit ans d’âge, «Du Highland Park acheté le week end précédent dont il restait encore deux ou trois bonnes doses. Clopes, alcool et une petite musique de nuit. A une époque cela aurait suffi à l’apaiser, mais quand il ne travaillerait plus? Qu’avait-il d’autre pour le soutenir? Une fille qui vivait en Angleterre avec un professeur d’université.Une ex-épouse désormais installée en Italie. Le pub. Sports? Aucun.Hobbies et distractions? Ce qu’il était en train de faire.»Rien de folichon mais il n’empêche ! Il va se donner à fond dans cette enquête! Bien entendu il aura tout le monde contre lui. Bien entendu sa propre hiérarchie lui mettra des bâtons dans les roues pour freiner son enquête.Bien entendu ses propres coéquipiers finiront par douter de lui mais c’est un teigneux, un vrai dur et un vrai bon à la fois en perpétuelle lutte contre les trop riches, les trop corrompus, les trop prétentieux alors la hargne et la chance ne le quittent jamais longtemps! Il est fort, très fort et quand on croit qu’il est fini il resurgit comme par magie et le suspens est là, jusqu’à la denière ligne de la toute dernière page.Oui, il est vraiment très fort, ce Ian Rankin! Exit Music de Ian Rankin (Le Masque (2010), 446 p. Traduit de l’anglais (Ecosse) par Daniel Lemoine, Blog qui en parle aussi: JM Laherrère