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Échos de l’Histoire

Par Borokoff

A propos de Même la pluie d’Icíar Bollaín 3 out of 5 stars

Échos de l’Histoire

Sebastian, un jeune cinéaste fougueux et passionné débarque avec son producteur, Costa, en Bolivie pour réaliser une fiction inspirée par la découverte puis la colonisation par Christophe Colomb et les Conquistadores de la « Caraïbe ». Pendant que Costa se félicite du coût très peu élevé des figurants boliviens, une révolte gronde et enfle au sein de la population, accaparée par le prix exorbitant de la privatisation de l’eau. L’un des figurants, Daniel, qui joue dans le film de Sebastian Hatuey, un rebelle « indien » célèbre, est un leader charismatique de la fronde des Boliviens contre le gouvernement. La situation devient de plus tendue, à tel point que le tournage est bientôt menacé d’abandon.

Même la pluie s’inspire des évènements violents qui eurent lieu entre janvier et avril 2000 à Cochabamba (Etat du Chapare), la quatrième ville du pays située dans l’Altiplano bolivien. Des accords entre la ville et le géant californien Bechtel pour la privatisation de l’eau conduisirent à une véritable insurrection de la population (une personne fut tuée par balle) qui réussit à faire annuler cet accord. Même la pluie reprend habilement cette trame contemporaine pour tisser des liens avec l’Histoire et la découverte par Christophe Colomb de la « Caraïbe » qui marque le début de l’esclavagisme et le massacre par les Conquistadores des populations autochtones d’Amérique. Le tout sur fond d’évangélisme.

Mais le film ne tombe pas les rapprochements ni les raccourcis faciles. Il montre d’un côté une population, relativement pauvre, en un mot une proie facile pour un géant économique, mais aussi la capacité de réaction et de résistance qu’elle peut avoir face à ce Goliath. Daniel est un leader syndical gênant qui effraye le pouvoir bolivien, qui essaye par tous les moyens (dont le tabassage régulier) de le faire taire. Ironie de l’Histoire, dans le film de Sebastian (Gabriel Garcia Bernal), Daniel joue Hatuey, un « Indien » charismatique qui finit immolé par les Conquistadores (échec cuisant tant Hatuey est acclamé par les siens lors de sa mise à mort).

Mais Même la pluie est un film nuancé qui évite de tomber dans le manichéisme ou la démagogie, avec le personnage de Bartolomé de Las Casas (Carlos Santos) qui s’insurgea contre la violence faite aux « Indiens » par les Conquistadores. C’est un portrait nuancé d’un homme, un producteur de cinéma qui au départ traite avec mépris les figurants boliviens mais va peu à peu prendre parti pour la population dans son combat pour l’eau en la défendant jusqu’à risquer sa propre vie. Le dévouement dont il est capable à la fin du film va dans le sens d’une bravoure et d’un héroïsme qui le dépassent lui-même. Le personnage de Bartolomé de Las Casas renvoie alors à celui de Costa. Alors, bien sûr, le film verse un peu dans le mélodrame sur la fin (scène d’accolade avec Daniel/Hatuey), mais il y a un acteur absolument remarquable dans ce film, c’est Luis Tosar (Costa), dont la puissance dramatique est fascinante.

www.youtube.com/watch?v=4E3GHKOUv7A


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